La dictature camerounaise était pourtant prévenue, notamment après la première condamnation surréaliste du prisonnier politique Marafa Hamidou Yaya à 25 ans d’emprisonnement pour une prétendue “complicité intellectuelle de détournement de deniers publics”, ramenée récemment à 20 ans par une Cour Suprême aux ordres de Paul BIYA. Cette sentence inique n’avait en effet aucun fondement juridique.
Le Comité des Droits de l’homme de l’ONU rend une décision (avis) demandant la libération et le dédommagement de Marafa Hamidou Yaya (photo)
Le Président Paul Biya (83 ans, 33 années de règne) et ses principaux lieutenants dont son ministre de la justice Laurent Esso, ont d’abord voulu procéder à l’élimination politique d’un prétendant sérieux à la présidence du Cameroun.
Y sont-ils définitivement parvenus? À l’évidence NON.
Car cette instrumentalisation de la Justice à des fins de séquestration de concurrents politiques les plus redoutés, maintes fois utilisée depuis l’arrestation du Professeur Titus Edzoa en 1997 pourrait bien connaître son premier échec cette fois-ci. En effet l’innocence de l’ homme d’état Marafa Hamidou Yaya ne fait plus l’ombre d’un doute, et est unanimement reconnue par la communauté internationale. Sa détermination à concrétiser son ambition présidentielle s’en trouve d’autant renforcée, qu’il jouit indéniablement comme nul autre avant lui d’une réelle assise populaire sur toute l’étendue du territoire camerounais, et particulièrement dans le grand Nord.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques (CL2P)
UN ORGANE DES NATIONS UNIES CONCLUT QUE LA DETENTION DE MARAFA HAMIDOU YAYA EST ARBITRAIRE EN VIOLATION DU DROIT INTERNATIONAL
Lors de sa 75e Session tenue au siège des Nations Unies à New York du 18 au 27 avril 2016, le Groupe de Travail des Nations Unies sur la Détention Arbitraire a jugé que la détention du prisonnier politique camerounais Marafa Hamidou Yaya est illégale. Conformément à ses méthodes de travail, le Groupe de Travail a d’abord transmis au gouvernement du Cameroun ses conclusions, et ce, deux semaines avant qu’elles ne soient communiquées à l’avocat de Marafa le lundi 27 juin 2016. La décision intervient juste après le récent jugement rendu par la plus Haute Cour du Cameroun, réduisant la condamnation de Marafa de 25 à 20 ans d’emprisonnement pour son rôle dans l’échec de l’achat d’un avion présidentiel pour les déplacements du Président Biya.
L’avocat de Marafa Hamidou Yaya, le Professeur Ndiva Kofele Kalé, un universitaire et praticien du droit (membre du Barreau Camerounais et habilité à ester devant la Cour Suprême des Etats Unis et dans l’Etat de l’Illinois) qui œuvre dans le domaine du Droit Pénal International et la Protection des Droits Humains, a assigné le gouvernement du Cameroun devant le Groupe de Travail des Nations Unies en juin 2015 pour violation du droit de son client à un procès équitable parmi d’autres droits humains fondamentaux internationalement protégés. Le 1er Juillet, le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire a demandé au gouvernement du Cameroun de lui soumettre un mémorandum de réponse ce qu’il a fait le 30 septembre. L’avocat de Marafa a ensuite introduit des observations supplémentaires suite à la soumission du gouvernement le 13 novembre 2015. Au vu de la grande quantité de documents que chacune des parties a déposé en appui de leurs positions respectives, il a fallu au Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire de novembre à avril 2016 pour délibérer sur la requête de Marafa avant de finalement se prononcer en juin.
L’organe des Nations Unies a demandé à ce qu’il soit libéré immédiatement et soit indemnisé par le gouvernement du Cameroun pour les dommages occasionnés par la privation de sa liberté. Le Groupe de Travail a estimé que la détention de M. Marafa violait les articles 9 et 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que les articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Dans sa décision, le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire recommande la possibilité d’un nouveau procès où tous les droits de la défense devront être entièrement respectés, pourvu que le Ministère Public ait des raisons valables de poursuivre Marafa. Il a appelé le gouvernement du Président Biya à prendre des mesures diligentes pour répondre aux besoins nés de la santé déclinante de Marafa qui s’aggrave au point de devenir irréversible. Le Groupe de Travail a également saisi Monica Pinto, la Rapporteure Spéciale du Conseil des Droits de l’Homme sur l’indépendance des juges et des avocats pour qu’elle prenne toute action appropriée.
Lorsqu’on lui a demandé de réagir à la décision, le Professeur Kalé s’est exprimé comme suit :
« La décision du Groupe de Travail innocente mon client et confirme ce qu’il a toujours dit, c’est-à-dire, qu’il est innocent de toutes les accusations portées contre lui. Mais avant que cette décision historique ne soit interprétée à tort et travers dans des exposés verbaux et autres analyses sans fin, laissez-moi noter les trois points suivants. Tout d’abord, contrairement aux affaires de Thierry Atangana et Lydienne Eyoum où le gouvernement camerounais n’a déposé aucune pièce de procédure, dans ce cas-ci, le gouvernement a non seulement déposé mais a même demandé un délai de 60 jours supplémentaires pour préparer sa réponse à ma demande préliminaire. Les mémoires du gouvernement tout comme ceux du plaignant ont été accompagnés par des documents justificatifs. D’ailleurs, ces documents étaient si volumineux qu’ils ont contribué à prolonger les délibérations du Groupe de Travail. L’important ici est que ce n’est pas un jugement par défaut mais le résultat motivé d’un litige dans lequel il a été permis aux deux parties de présenter leurs arguments. Et les six éminents juristes qui composent le Groupe de Travail avaient devant eux les mêmes documents que le Ministère Public qui avait mis en accusation Marafa ; les juges de la Haute Cour de Mfoundi qui l’ont déclaré coupable et les honorables juges de notre Cour Suprême qui ont confirmé le jugement de première instance. Pourtant après avoir examiné les mêmes preuves, le panel de juristes du Groupe de Travail est arrivé à la conclusion opposée ! Comment se fait-il que nos juristes se soient ainsi trompés ? C’est peut-être en cherchant à répondre à cette question que le Groupe de Travail a décidé de saisir la Rapporteure Spéciale des Nations Unies sur l’indépendance des juges pour un examen plus poussé. Dans tous les cas, cela ne donne pas une bonne image du système judiciaire camerounais vu que cette saisine, met maintenant en doute son indépendance et impartialité tant vantées. Ma seconde observation est que le Cameroun, en tant qu’Etat partie au Pacte International relatifs aux droits civils et politiques, est juridiquement lié par cette décision et ne peut refuser de l’exécuter. Enfin, je garde l’espoir que le Président Biya fera ce qui est juste en donnant instruction au gouvernement de respecter la décision des Nations Unies à son encontre et de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la privation de liberté injuste et arbitraire de M. Marafa. Ce qui est en cause ici, c’est la volonté du Cameroun de respecter l’Etat de Droit pas seulement en théorie mais aussi dans la pratique. Le pays doit prouver sa volonté de résister à la tentation de s’aligner sur la conduite d’Etats voyous qui bafouent les décisions des tribunaux internationaux et qui par la même deviennent complices de l’affaiblissement des efforts de la communauté internationale/mondiale pour protéger des victimes de violations des droits humains parmi les plus vulnérables ! »
Sous l’autorité du Bureau du Haut-Commissariat aux Nations Unies pour les Droits de l’Homme, le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire a été mis en place en 1991 pour enquêter et se prononcer sur le respect par les Etats de leurs obligations internationales en matière de droits humains. Il reçoit des requêtes émanant de plaignants individuels et de mis en cause (les Etats), et décide si l’affaire représente une détention arbitraire (c’est-à-dire illégale, ou interdite). Il faut rappeler que le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire s’était déjà prononcé contre le gouvernement du Cameroun dans les affaires Michel Thierry Atangana Abega contre Cameroun, Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire, Opinion numéro 38/2013, Document des Nations Unies A/HRC/WGAD/2013/38 (2014) et Pierre Roger (alias Lapiro) et autres contre Cameroun, Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire, Opinion No. 32/2011, Document des Nations Unies A/HRC/WGAD/2011/32 (2011). La décision du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire sur Marafa qui est juridiquement contraignante sera maintenant communiquée au Conseil des Nations Unies pour les Droits de l’Homme.