Ce ne sont que quelques phrases, mais elles pourraient changer la face de l’élection présidentielle au Cameroun. Au lendemain du scrutin tenu dimanche 7 octobre, Maurice Kamto, le candidat du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), a revendiqué, contre toute attente, sa victoire devant des dizaines de journalistes réunis dans son quartier général de campagne à Yaoundé.
« J’ai reçu pour mission de tirer le penalty historique. Je l’ai tiré, le but a été marqué », a annoncé lundi celui qui, durant les deux semaines de campagne électorale, sillonnait le pays en maillot des Lions indomptables, l’équipe nationale de football, et ballon rond à la main. Il promettait alors à ses partisans de « tirer le penalty au soir du 7 octobre ».
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L’ancien ministre délégué auprès du ministre de la justice, qui avait claqué la porte du gouvernement en 2011, a par ailleurs appelé Paul Biya, président du Cameroun depuis bientôt trente-six ans, à organiser « une transmission pacifique du pouvoir ».
La réaction des autorités ne s’est pas fait attendre. Maurice Kamto s’est mis « manifestement hors-la-loi », a déclaré lundi à l’AFP le ministre de la communication, Issa Tchiroma Bakary. La loi électorale dispose que les résultats sont proclamés dans les quinze jours suivant le scrutin par le Conseil constitutionnel. « On ne peut pas vouloir gouverner le Cameroun et se mettre au travers des lois qui gouvernent le Cameroun », a encore déclaré le porte-parole du gouvernement sur France 24. La veille, pourtant, il promettait « la victoire triomphale » de Paul Biya.
Bourrages d’urnes et achats de voix
« En ce moment, vous devez savoir qu’il y a des opérations pour frauduleusement changer les résultats. Les fraudes se poursuivent à une échelle que vous n’imaginez pas. Nos tendances et les remontées que nous avons du terrain montrent très clairement le sens de la victoire », explique Olivier Nissack, le porte-parole de Maurice Kamto, sans pour autant donner de chiffres ni expliquer comment ses équipes sont parvenues à ces conclusions. « On sait d’après nos calculateurs que désormais, l’écart ne peut plus être rattrapé par le président sortant », argue-t-il.
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Outre le MRC, d’autres partis d’opposition dénoncent des « fraudes » ayant entaché le scrutin à un tour. Ils citent les bourrages d’urnes, les falsifications de procès-verbaux, les achats de voix, l’absence de bulletins au nom de certains candidats dans les bureaux de vote, des scrutateurs des partis refoulés lors du dépouillement, l’utilisation d’encre non indélébile…
« A Yaoundé 5, par exemple, nous avons découvert une fabrique de fausses cartes électorales destinées à alimenter le candidat du parti au pouvoir », fulmine Emile Bindzi. Le porte-parole de Cabral Libii, plus jeune candidat à la présidentielle, assure que le parti a recensé « des fraudes sur tout le territoire et même dans la diaspora ». « A Marseille et Bruxelles, nos représentants ont été refoulés et interdits dans les bureaux de vote », précise-t-il.
Forte abstention en zone anglophone
Selon l’article 133 du Code électoral camerounais, les candidats ont jusqu’à soixante-douze heures après le scrutin pour déposer leurs requêtes auprès du Conseil constitutionnel. Lors des précédentes présidentielles, les plaintes déposées par les partis d’opposition n’ont jamais abouti. « La justice est pour les forts, déplore Emile Bindzi. Mais nos équipes travaillent afin de déposer des requêtes auprès de l’institution étatique chargée du contentieux électoral. »
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Du côté du Social Democratic Front (SDF), qui dénonce « des anomalies », les conseillers juridiques travaillent en vue de « faire des recours ». « Nous comptabilisons tous les résultats dans tous les bureaux de vote au Cameroun », souligne Henry Kejang, responsable médias de la campagne du candidat Joshua Osih. La direction générale des élections (Elecam) a quant à elle confirmé, lundi soir, la forte abstention qui a prévalu dans les zones anglophones. Le taux de participation officiel et les résultats sont attendus d’ici au lundi 22 octobre.