François Compaoré, le “petit président”, frère cadet de Blaise Compaoré, a été arrêté dimanche matin à l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle, une information confirmée par la préfecture de Paris et le ministère de la Justice au Burkina.
François Compaoré était en provenance d’Abidjan, sur un vol régulier de la compagnie français Air France, lorsque la police a procédé à son arrestation.
Selon une source de la police des frontières de Roissy, “la police des mers et des frontières le suivaient, ils attendaient l’ordre des juges pour exécuter le mandat”.
“Son avocat en a été informé. Pour le moment, il est en détention, et c’est au juge de le libérer ou de confirmer l’arrestation jusqu”au procès”, explique la même source.
“Dans ce cas précis, je doute fort qu’il ne soit pas envoyé au Burkina Faso parce que sa résidence n’est pas établi en France, et même s’il fait régulièrement des voyages vers la France, il sera ramené vers le pays qui a émis le mandat d’arrêt”, conclut la source.
Dans un communiqué, Thomas Borrel, porte-parole de l’association Survie, a déclaré que “c’est une bonne nouvelle qu’un suspect majeur comme François Compaoré soit enfin arrêté en France, alors qu’il se targuait récemment dans la presse de pouvoir circuler librement dans l’Hexagone”.
Il poursuit : “ce premier signal positif doit désormais être suivi d’autres actes essentiels à la coopération avec la justice burkinabè : l’extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso pour qu’il y soit jugé dans le cadre de l’affaire Norbert Zongo”.
L’avocat de la famille Zongo “soulagé”
Il était retenu dimanche dans les locaux de la police aux frontières (PAF) et devait être présenté au parquet général de Paris “sous 48 heures”, a déclaré Me Pierre-Olivier Sur.
François Compaoré “a été entendu trois fois par la commission d’enquête internationale et trois autres fois par une juridiction d’instruction au Burkina Faso, or chacune de ces deux procédures l’a disculpé” dans ce dossier, fait valoir son avocat en France.
“Le pouvoir en place, qui ne parvient pas à retenir de charges contre Blaise Compaoré change aujourd’hui son fusil d’épaule et accuse son frère”, estime Me Sur. “Comme dit la fable : “‘si ce n’est toi, c’est donc ton frère'”.
L’avocat de la famille de Norbert Zongo s’est dit “heureux” et “soulagé” de cette arrestation.
“Je suis très fier de ce combat pour la justice qui a été mené par tout le peuple burkinabè, et aussi par vous les journalistes”, a déclaré Me Bénéwendé Sankara à l’AFP, joint par téléphone depuis Abidjan.
L’affaire Zongo, “c’est une quête de vérité et de justice des Burkinabè, qui sont extrêmement attachés à ce dossier”, a estimé l’avocat.
Mandat d’arrêt international
En juillet dernier, la justice burkinabè avait lancé un mandat d’arrêt international contre François, le frère cadet de l’ex-président Blaise Compaoré dans l’affaire de l’assassinat du journaliste d’investigation Norbert Zongo en décembre 1998.
François Compaoré, un des personnages les plus impopulaires des 27 ans du régime Compaoré, est poursuivi pour “incitation à assassinats”, avait indiqué l’avocat de la famille Zonzo, précisant qu'”il y a eu quatre crimes”, l’assassinat de Zongo et de trois compagnons.
Journaliste d’investigation et directeur de publication de l’hebdomadaire L’indépendant, Norbert Zongo et trois de ses compagnons ont été retrouvés morts carbonisés dans leur véhicule le 13 décembre 1998 dans le sud du Burkina.
Auteur de plusieurs enquêtes retentissantes démontrant la mauvaise gouvernance sous le régime du président Compaoré, M. Zongo travaillait au moment de son assassinat sur la mort de David Ouédraogo, chauffeur de François Compaoré, frère cadet et conseiller économique du président Compaoré surnommé le “petit président”.
François Compaoré, “le petit président”
François Compaoré, personnage très influent du régime déchu, un temps inculpé de “meurtre et recel de cadavre” après la mort de son chauffeur, n’a jamais été inquiété dans le dossier Zongo.
Il s’est enfui du pays lors de l’insurrection populaire d’octobre 2014 et a obtenu en même temps que Blaise Compaoré la nationalité ivoirienne.
Longtemps laissé dans les tiroirs, le dossier Norbert Zongo a été rouvert à la faveur de la chute de M. Compaoré fin octobre 2014, chassé par la rue après 27 ans au pouvoir.
En décembre 2015, trois ex-soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), l’ancienne garde prétorienne de M. Compaoré – dissoute après sa tentative de coup d’Etat mi-septembre 2015 – ont été inculpés par la justice.
Le mandat d’arrêt lancé par la justice burkinabè contre Blaise Compaoré et sa présence à Abidjan avaient envenimé les relations entre les deux voisins avant un réchauffement en 2016.
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La France donne son aval à l’extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso
Le frère de Blaise Compaoré, l’ancien président déchu, est mis en cause dans l’enquête sur l’assassinat en 1998 du journaliste Norbert Zongo.
Le « petit président » sera-t-il jugé dans son pays ? La justice française a autorisé, mercredi 5 décembre, l’extradition de François Compaoré vers le Burkina Faso, où le frère de l’ancien président déchu, Blaise Compaoré, est mis en cause dans l’enquête sur l’assassinat du journaliste Norbert Zongo en 1998.
La cour d’appel de Paris a donné son feu vert à cette extradition, à laquelle le parquet général s’était déclaré favorable, mais qui, pour être effective devra également faire l’objet d’un décret gouvernemental. La décision de la cour a déjà fait l’objet d’un pourvoi en cassation de la part des avocats de François Compaoré, 64 ans. Par ailleurs, l’un des défenseurs de M. Compaoré, Pierre-Olivier Sur, annonce son intention de demander la comparution du juge d’instruction burkinabé pour « faux en écriture publique », après que le cour d’appel de Paris a relevé que l’une de ses citations n’était pas « correcte ».
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Assassinat d’un journaliste
Au Burkina Faso, François Compaoré est accusé d’« incitation à assassinat » dans l’affaire Norbert Zongo, du nom du directeur de publication de l’hebdomadaire L’Indépendant. Le journaliste avait été tué, avec trois personnes qui l’accompagnaient, dans des conditions mystérieuses, le 13 décembre 1998, alors qu’il enquêtait sur la mort de David Ouedraogo, le chauffeur de François Compaoré.
Lire aussi Burkina Faso : où en est l’affaire Norbert Zongo ?
Classé en 2003, après un « non-lieu » en faveur du seul inculpé, le dossier Zongo a été rouvert à la faveur de la chute du président Blaise Compaoré à la fin octobre 2014, chassé par la rue après vingt-sept ans au pouvoir.
Sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis mai 2017, François Compaoré avait été interpellé à l’aéroport de Roissy à la fin octobre 2017. Son avocat avait alors exprimé son indignation quant à cette « manœuvre politique » visant à atteindre par son biais l’ex-président, également sous le coup d’un mandat d’arrêt international dans le cadre de l’enquête sur la répression de l’insurrection d’octobre 2014. François Compaoré avait été placé sous contrôle judiciaire fin 2017 mais d’après son conseil, ce contrôle est désormais levé et M. Compaoré est libre de ses mouvements.