L’Afrique, les États-Unis et l’Europe ont demandé vendredi à Kinshasa de respecter le choix des électeurs congolais après le scrutin présidentiel historique de dimanche dernier pour désigner le successeur du président Joseph Kabila.
La puissante Église catholique congolaise demande exactement la même chose. Sa conférence épiscopale a même suscité la colère de la majorité pro-Kabila et de la commission électorale pour avoir laissé entendre qu’elle connaissait déjà le nom du vainqueur.
La commission électorale n’a toujours pas précisé si elle proclamerait dimanche comme prévu les résultats provisoires ou si elle reporterait son annonce à cause de la lenteur de la remontée des résultats.
L’élection présidentielle de dimanche doit désigner le successeur de Joseph Kabila, premier dirigeant congolais à renoncer au pouvoir sous pression de la Constitution et non des armes.
Trois candidats -sur 21- sont vraiment en course pour sa succession: le candidat du pouvoir et de M. Kabila, l’ex-ministre de l’Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary, et les deux oppsosants Martin Fayulu et Félix Tshisekedi.
Ces élections sont “historiques“, a répété un porte-parole des Nations unies vendredi qui ajoute: “Il est important que le calme continue à prévaloir, pendant le comptage des voix et l’attente des résultats“.
Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni vendredi à huis clos pour discuter de l’élection mais, après deux heures de discussion, les membres du Conseil ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur un communiqué commun. Plusieurs pays, y compris d’Afrique, ont estimé qu’il était prématuré de le faire, ont rapporté des diplomates.
Avant cette réunion, l’Union européenne avait demandé que “les résultats dont la proclamation est attendue soient conformes au vote du peuple congolais”.
“L’UE s’associe aux appels, entre autres de la mission d’observation électorale de l’Union Africaine et du président de la Commission de l’UA“, a écrit Bruxelles.
Le ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders a demandé une “pression maximale” de la communauté internationale sur les autorités congolaises.
“Quel que soit le résultat, il doit être communiqué. Quel que soit le nom du nouveau président, même si cela va vers un autre candidat que celui du pouvoir”, avait déclaré M. Reynders à quelques heures de la réunion du Conseil de sécurité.
Les Etats-Unis, l’UE et l’UA sont “en train d’accorder leurs points de vue” sur l’attitude à tenir vis à vis de la situation en RDC, a ajouté M. Reynders à l’agence Belga. Ex-puissance coloniale, la Belgique est membre non-permanent du Conseil de sécurité.
Souvent considérée comme le “syndicat des chefs d’Etat africain” qui défend les intérêts des pouvoirs en place, l’UA a aussi estimé vendredi que “le respect des résultats de l’élection est crucial“.
Les Etats-Unis ont déjà fait valoir une ligne dure en cas de fraude: “Ceux qui sapent le processus électoral, menacent la paix, la sécurité ou la stabilité de la RDC, ou bénéficient de la corruption, risquent de ne plus être les bienvenus aux Etats-Unis ou d’être interdits d’accès au système financier américain“, a prévenu le département d’Etat.
Intimidation et harcèlement
En RDC, la journée a été marquée par les réactions très virulentes de la majorité pro-Kabila et de la Commission électorale contre l’Eglise catholique.
La Conférence épiscopale (Cenco) affirme connaître le nom du vainqueur et demande à la Commission électorale de proclamer les résultats dans la “vérité et la justice“.
Le secrétaire général de la Cenco l’abbé Donatien Nshole a fait cette déclaration jeudi en présentant le rapport préliminaire des 40.000 observateurs électoraux de l’église catholique.
Cette déclaration “viole gravement la Constitution“, a tempété le porte-parole de la coalition au pouvoir Front commun pour le Congo (FCC), Barnabé Kikaya Bin Karubi.
Le porte-parole, également conseiller de M. Kabila, “déplore, dénonce et condamne fermement l’attitude partisane, irresponsable et anarchique de la Cenco“.
“L’annonce des tendances (…) par monsieur l’abbé Nshole est de nature à intoxiquer la population en préparant un soulèvement dont la Cenco sera seule responsable“, a écrit le président de la commission électorale Corneille Nangaa dans un courrier au président de la conférence épiscopale Mgr Marcel Utembi.
Le président de la Céni a demandé “un démenti formel” à la Cenco. Une copie de sa lettre a été envoyée au procureur général de la République.