À l’ouverture de cette réunion de haut niveau convoquée par le président rwandais Paul Kagame, par ailleurs président en exercice de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat a adopté un ton plus ferme, depuis la tenue des élections générales du 30 décembre 2018 en RDC.
“Pour parler franchement, de sérieux doutes sur la conformité des résultats proclamés persistent”, a-t-il lancé devant les Chefs d’État d’Afrique du Sud, de Zambie, de Namibie, d’Ouganda, du Rwanda, du Congo, de Guinée, d’Éthiopie et du Tchad.
Pour le président de la commission de l’Union africaine, “même si jusqu’ici la situation sur le terrain reste fort heureusement globalement calme, il n’en reste pas moins qu’elle demeure hautement préoccupante.”
Toutefois, le journaliste et analyste politique Louis Keumayou se veut plutôt prudent quant aux réelles intentions de l’UA et de la SADC. Selon lui, “ces deux organisations régionales (ndlr, SADC et UA) par principe de subsidiarité sont en train de jouer la carte de la real politik. Et la real politik, c’est un moindre mal d’avoir une transition avec Joseph Kabila qui n’est plus au pouvoir et un opposant qui prend le relai. Si cela peut garantir la paix et la stabilité, ces deux organisations vont acheter immédiatement”, a expliqué le journaliste dans une interview avec la DW.
Parmi les participants à cette réunion d’Addis Abeba, il y a les présidents sud-africain Cyril Ramaphosa, angolais Joao Lourenço, namibien Hage Geingob et zambien Edgar Lungu de même que le ministre tanzanien des Affaires étrangères Augustine Mahiga et l’ambassadeur zimbabwéen en RDC Raphael Faranisi.
Louis Keumayou pense aussi que “ces pays ont énormément pesé pour qu’il y ait une transition. Ce serait difficile aujourd’hui qu’ils boudent leur plaisir de constater qu’il y a effectivement une transition puisque Kabila est parti. Son dauphin n’a pas gagné. Et c’est un opposant qui vient au pouvoir. Car il y a une situation de fait aujourd’hui : il y a une transition. Elle est peut-être contestée, mais, elle est là. À la différence de plusieurs pays comme le Cameroun, ou le Congo-Brazzaville où il n’y a pas eu de transition.”
Le rétropédalage de la SADC
La Communauté de développement d’Afrique australe pour sa part, s’est contentée d’appeler dans un communiqué les acteurs politiques congolais “à obtenir des réponses à leurs doléances électorales et dans le respect de la Constitution”.
Pourtant, cette organisation (SADC) avait admis quelques jours plus tôt qu’il vallait la peine d’un “recomptage des voix”, confortant une demande en ce sens de l’opposition conduite par le candidat Martin Fayulu de la coialition Lamuka.
Mais le politologue Jean-Jacques Wondo Omanyundu considère que “la SADC continue de mettre autrement la pression sur le pouvoir organisateur et la juridiction chargée de régler le contentieux pour qu’au finish, il y ait une décision qui soit dans le sens de la vérité des urnes. Sachant qu’une décision qui n’irait pas dans le sens de ce qui a été réellement exprimé dans les urnes risque vraiment de déstabiliser et de créer un chaos.”
La commission électorale nationale indépendante (Céni) avait proclamé vainqueur de la présidentielle, le candidat Félix Tshisekedi avec 38,57% des voix, contre 34,8% pour Martin Fayulu qui a dénoncé un “putsch électoral” opéré par le président sortant, Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001.
L’Église catholique et plusieurs médias internationaux ont également soutenu que le vrai vainqueur de la présidentielle est le candidat de la coalition Lamuka, avec environ 60% des voix.
La grande inconnue reste la réaction des partisans de Martin Fayulu, si celui-ci n’était pas déclaré vainqueur de ce scrutin dans la proclamation définitive attendue de la cour constitutionnelle.