Ce lundi 18 février 2019 au Tribunal de Première Instance du centre administratif de Yaoundé s’est ouverte l’audience prévue dans le cadre du jugement des premiers manifestants pacifiques arrêtés en relation avec la ‘’marche blanche’’ pacifique du 26 janvier 2019 à Yaoundé. À 11h57 l’appel des accusés à comparaître devant la barre s’est fait entendre.
D’emblée ce jour, seuls 30 PV(Procès Verbaux) d’enquête préliminaire ont été retenus sur les 43 initialement introduits par le procureur de la République comme pièces à conviction. Auparavant un débat avait permis grâce à la ténacité des avocats de la défense de faire respecter l’ADD, c’est-à-dire le jugement d’Avant-Dire Droit par lequel le juge avait procédé à la jonction des affaires durant l’audience de vendredi dernier. En effet contrairement à ce jugement initial, le président de la collégialité désormais en charge de connaître de cette affaire a évoqué tout de go l’existence de trois jugements d’ADD et donc de la division en trois lots distincts de ces affaires. Or cela ne correspondait nullement à ce que le juge de vendredi, juge remplacé désormais par un trio de magistrats, avait décidé deux jours plus tôt.
Le président du tribunal finira par accéder aux revendications des avocats de la défense qui demandaient mordicus que soit appliqué le premier ADD en vertu duquel toutes les affaires étaient jointes en une seule. Ainsi calmera-t-il la suspicion des avocats qui dénonçaient déjà l’existence de deux audiences, l’une publique et l’autre secrète.
L’examination des prévenus va s’ouvrir dès 14h05 min. L’assistance va ainsi entendre avec stupeur témoigner de leur calvaire arbitraire bon nombre de marcheurs blancs pacifiques du 26 janvier 2019.
Ainsi en est-il du cas de cette jeune femme de 24 ans inscrite en cycle doctoral à l’Université de Yaoundé I, qui après s’être faite gratuitement molester à la matraque sur le lieu de son arrestation, a par la suite été ‘’punie’’ pour avoir demandé à être auditionnée en présence d’un avocat, et surtout pour avoir refusé d’admettre comme vrai le mensonge à elle suggéré par ses geôliers de la police qui la forçaient à dire qu’elle avait acceptée de prendre part à la marche blanche pacifique du 26 janvier 2019 en échange de la somme de 5mille FCFA. Ses geôliers l’ont par conséquents menacé verbalement et torturé moralement en faisant inutilement traîner en longueur ses formalités d’audition et de déferrement.
Idem pour ce jeune informaticien infographe dont l’enquêteur va lui dire être un bassa comme lui aussi, pour ensuite lui faire l’incroyable ‘’reproche’’ de savoir ce qu’il faisait dans une ‘’affaire de bamiléké’’.
De la stupéfaction, le tribunal va se voir plonger dans l’horreur absolue avec l’évocation des cas comme celui de ce jeune résistant témoignant qu’en compagnie de trois autres marcheurs pacifiques il va se faire embarquer sur les lieux de la marche (rond-point poste centrale) par des hommes en civil avec des armes de guerre au poing. Ils seront jetés dans un pickup banalisé qui va prendre la direction du Ministère de la Défense, et s’engouffrer dans son enceinte. À l’intérieur un homme en pantalon treillis militaire va les accueillir. Les manifestants pacifiques seront ensuite sauvagement roués de coups et battus cruellement avec des machettes par leurs tortionnaires-kidnappeurs.
Cette abominable basse besogne accomplie, ces hommes vont extraire les manifestants pacifiques du Mindef et aller les remettre entre les mains de la police, alors qu’ils viennent de leur infliger des sévices physiques graves.
Idem avec le cas de cette jeune dame diabétique, souffrant aussi de rhumatisme et d’hypertension. Son insuline lui est refusée en prison parce que le médecin de la prison n’aurait pas encore établi l’ordonnance nécessaire. Ce qui entraîne le rejet des médicaments que ses proches lui apportent sur la base d’ordonnances établies en dehors de la prison. De plus, ayant perdu ses lunettes, sa vue est au plus bas du fait d’une tension oculaire résultant de son diabète.
Elle accuse formellement les policiers d’en avoir profité pour lui faire signer un PV d’audition qu’elle n’a pu relire et qui est truffé de contrevérités. Avec en prime le fait qu’initialement poursuivie pour défaut de CNI (conformément à son PV d’audition à la police), elle a vu ses charges soudainement modifiées et commuées arbitrairement en attroupement et rébellion entre autres. Une vraie bizarrerie si l’on s’en tient au fait qu’elle s’était trouvée prise à son corps défendant dans la débandade des personnes fuyant la charge des forces de l’ordre non loin de la SNI le 26 janvier 2019. Dans la bousculade qui s’en est suivie elle a perdu son sac contenant ses lunettes et papiers divers.
Sans prétendre à l’exhaustivité, soulignons enfin la ruse indigne employée par certains policiers véreux au Commissariat Central numéro un. Ces derniers n’ont pas hésiter à dissuader les personnes arrêtées d’attendre la présence de leurs avocats pour répondre à leurs auditions sur PV. Promettant aux personnes répondant aux auditions en l’absence de leur avocat, une libération rapide.
Au finish, 12 accusés se seront succédés les uns après les autres devant la barre du tribunal durant cette audience, tandis-qu’elle s’est achevée à 19h pile sur un renvoi au 25 février prochain. Le président du tribunal ne manquant pas de dire à la défense, aux prévenus et à l’assistance que 3 à 4 audiences maximum suffiront pour clore cette affaire.
Il faut signaler que la jonction de ces affaires à désormais lié le sort de quelques victimes de la MIDA et celui des résistants marcheurs blancs pacifiques du 26 janvier 2019 à Yaoundé. Les avocats quant à eux se sont spontanément constitués pro bono, autrement-dit sans exiger le paiement d’honoraires en vue de tous les défendre.
À suivre sous peu, les éléments du dossier qui font s’écrouler comme un château de cartes truquées l’accusation contre les manifestants pacifiques impliqués dans la marche blanche du 26 janvier 2019 et les organisateurs de celle-ci.
Olivier Bibou Nissack porte-parole Maurice KAMTO