Il devait s’agir de l’ultime renvoi du procès d’Amadou Vamoulké. Pourtant, à l’issue d’une nouvelle audience, ce vendredi 1er mars, un 17e renvoi a été prononcé au 1er avril prochain. Plusieurs ONG et parlementaires français dénoncent sa détention « illégale » et « arbitraire ».
Surnommé le « Doyen » ou « Monsieur Propre », Amadou Vamoulké est incarcéré depuis juillet 2016. L’ancien dirigeant de la Cameroon Radio Television (CRTV) est poursuivi pour détournements de fonds – 6 millions d’euros -, au profit de la chaîne de télévision publique qu’il a dirigée entre 2005 et 2016. À l’issue d’une audience très attendue, vendredi 1er mars, un dix-septième renvoi a été prononcé, l’audience étant fixée au 1er avril prochain.
Les ONG insistent sur l’incarcération « illégale » d’Amadou Vamoulké, qui bénéficie officiellement du statut « d’inculpé libre » et dont le procès « ne se tient pas dans les délais impartis ».
Mobilisation pour obtenir une libération
De nombreuses organisations de défense des droits humains dénoncent la détention « illégale et arbitraire » et demandent la remise en liberté d’Amadou Vamoulké, 69 ans, emprisonné depuis plus de 30 mois. De nombreuses organisations de défense des droits humains dénoncent sa détention « illégale et arbitraire » et demandent sa remise en liberté.
Alain Massé, ex-directeur général de Radio France qui est à la tête du Comité international pour la réhabilitation et la libération d’Amadou Vamoulké (CIRLAV), connaît bien le journaliste, pour l’avoir côtoyé personnellement. Pour lui, Amadou Vamoulké a été « puni pour avoir tenté de faire valoir des principes éthiques ».
Reporters sans frontières (RSF), la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (Fidh), ou encore le Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac), appellent les autorités camerounaises à mettre fin à la « cabale judicaire » contre l’ancien dirigeant de la radiotélévision publique camerounaise.
« Après plus de deux ans et demi de détention provisoire, le caractère arbitraire et politique de la détention de ce journaliste ne fait aucun doute », affirme Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF.
Alice Nkom, avocate d’Amadou Vamoulké, pointe pour sa part un procès « inégalitaire » et des « accusations sans fondement ». « Les éléments de preuves contre lui ont pratiquement tous été rejetés. Il n’y a pas assez de charges permettant un débat », plaide l’avocate.
Saisine du Groupe de travail sur la détention arbitraire de l’ONU
L’affaire Amadou Vamoulké est également venue s’immiscer dans le débat politique français. Dans une lettre ouverte datée du 31 janvier 2019, neuf parlementaires issus de sensibilités politiques différentes ont demandé à Emmanuel Macron et à son ministre des Affaires étrangères, Jean Yves Le Drian, de faire pression sur Yaoundé et d’utiliser « leurs relations diplomatiques privilégiées afin d’assurer la réhabilitation et la libération la plus rapide possible » du journaliste.
Parmi les signataires, on trouve Jean-Christophe Lagarde (UDI, centre-droit), Éric Coquerel (LFI, gauche radicale), Esther Benbassa (EELV, écologistes) ou encore Sébastien Nadot (non-inscrit).
Quelques jours plus tard, le Quai d’Orsay a répondu dans une lettre que « l’accusation n’a pas apporté de preuve de la pertinence de son action » et qu’il suivra « avec la plus grande attention » les conclusions du Groupe de travail sur la détention arbitraire de l’ONU, saisi par RSF le 16 janvier dernier. « S’il n’y a pas d’aboutissement, nous prévoyons d’envoyer une délégation de parlementaires français au Cameroun », assure Sébastien Nadot.
Que faut-il donc attendre de la 17e audience prévue ce vendredi 1er mars ? L’avocate du journaliste, Alice Nkom, espère que cet ultime renvoi « prouvera que les charges contre Amadou Vamoulké ne peuvent pas être maintenues et que les poursuites seront abandonnées ».