Plus de 100.000 enfants devraient mendier de façon forcée dans les rues du Sénégal
Maltraitances, viols, abus sexuels, séquestrations, mises en danger, traites des personnes et exploitations … C’est un rapport accablant que publie ce mardi 11 juin Human Right Watch et la Plateforme pour la promotion et la protection des droits humains (PPDH) au Sénégal. Un rapport fruit de mois de travail de recherche et d’entretiens, sur les abus contre des enfants talibés au Sénégal. “On estime qu’ils sont plus de 100.000 forcés à mendier dans tout le pays”, écrit Lauren Seibert, chercheuse adjointe sur l’Afrique de l’Ouest auprès de la division Afrique à Human Rights Watch.
100 à 1250 francs CFA par jour
Les deux organisations dénonce des systèmes d’abus à grande échelle. “Des milliers de ces enfants vivent dans une misère abjecte, privés d’une nourriture suffisante et de soins médicaux“, selon Lauren Seibert. “Ce sont des abus, comme il peut y en avoir ailleurs, dans d’autres écoles, mais ils sont très répandus”, ajoute, dans une interview à la DW, Mahamadou Wane, coordinateur de la PPHD. Certains enfants interrogés par les deux organisations rapportent qu’ils sont contraintes de fournir des sommes quotidiennes allant de 100 à 1 250 francs CFA.
Plus grave encore, Human Rights Watch évoque les morts des seize enfants tablibés, en 2017 et 2018. Tous seraient morts de suites “d’abus, d’actes de négligence ou de mise en danger de la part de maîtres coraniques ou de leurs assistants“.
Appels au gouvernement et à la justice
Pour tenter d’enrayer la situation, le gouvernement sénégalais a déjà mis en place un certain nombre de mesures. En 2016 et 2018, plusieurs plans avaient notamment été mis en place “pour sortir les enfants de la rue“. “Mais ça ne suffit pas, et dès qu’on s’attaque aux écoles coraniques, des conservateurs crient au scandale, comme si on s’attaquait à l’institution“, estime Mahamadou Wane. “Cela n’est pas le cas du tout, on s’attaque aux abus. Il y a des lois, elles doivent s’appliquer.“
La plateforme pour la promotion et la protection des droits humains et Human Right Watch appellent également le gouvernement à mieux encadrer les écoles coraniques. “L’an dernier, une loi a été adoptée en conseil des ministres, mais elle n’est toujours pas arrivée devant l’Assemblée nationale. Or elle contient des dispositions, comme pour réglementer l’ouverture des écoles, cela apporterait une vraie révolution“, estime Mahamadou Wane.