Six gardes du corps de Paul Biya condamnés
Une semaine exactement après l’agression d’un journaliste de la RTS devant l’Hôtel Intercontinental, le Ministère public a annoncé, mercredi après-midi, l’arrestation de six membres du service de sécurité du président Paul Biya. Quelques heures plus tard, selon nos informations, les cinq hommes et la femme identifiés par la police judiciaire ont tous été sanctionnés par ordonnance pénale à des peines privatives de liberté avec sursis.
Deux gardes du corps sont condamnés à des peines de 3 mois de prison avec sursis pour contrainte et appropriation illégitime d’un objet (il s’agit du téléphone portable du journaliste) sans dessein d’enrichissement. Les quatre autres écopent de peines de 4 mois de prison avec sursis pour les mêmes faits auxquels s’ajoute une infraction de dommage à la propriété (les lunettes brisées du journaliste).
L’affaire est instruite par le procureur général Olivier Jornot.
Les faits datent du 26 juin. En fin de journée, Adrien Krause, un journaliste de la RTS, se rend à proximité du célèbre hôtel surplombant le quartier des Nations pour «prendre la température» auprès des opposants au président camerounais en poste depuis 1982. Ce dernier loge vraisemblablement à l’hôtel Intercontinental, raison pour laquelle une manifestation se prépare.
Invité de l’émission Forum sur la RTS, le journaliste a détaillé les événements, images confuses à l’appui (on y voit uniquement l’assaut du service de sécurité): une dizaine d’hommes à la carrure de gardes du corps ont fondu sur le groupe réuni sur la voie publique. Si les manifestants ont fui, le journaliste, lui, est resté sur place. Le service de sécurité le met alors au sol, l’immobilise, arrache sa sacoche, «fait ses poches», saisi son téléphone, son matériel ainsi que son porte-monnaie. Ses lunettes sont jetées au sol et écrasées.
Assistant à l’agression, deux assistants de sécurité publique dédiés à la sécurité diplomatique ne réagissent pas. Leur infériorité numérique aurait justifié leur passivité, ont expliqué les autorités genevoises. Quant au journaliste de la RTS, il a pu récupérer ses affaires plusieurs heures après les faits au terme de longues discussions. Ses images n’ont pas été effacées. Il souffre d’hématomes et de contusions et a déposé une plainte pénale.
Alors que la Suisse joue actuellement un rôle de médiateur pour apaiser les conflits qui secouent le Cameroun, cet événement a suscité de nombreuses réactions, du Département fédéral des affaires étrangères au Conseil d’État genevois, qualifiant l’agression de «totalement inacceptable».
Par Luca Di Stefano et Fedele Mendicino
source: Tribune de Genève