Mandela Center International, ONG internationale à Statut Consultatif Spécial auprès des Nations Unies,porte à l’attention de la communauté nationale et internationale
1. Qu’au terme d’un communiqué rendu public le 27 juin 2019 par le Département fédéral des Affaires Étrangères Suisse (DFAE),les protagonistes (Gouvernement et séparatistes)de la crise sociopolitique qui secoue les régions anglophones du Cameroun depuis octobre 2016 ont autorisé le Gouvernement suisse à mener des négociations pour un retour à la paix à travers une solution pacifique et un dialogue inclusif pour une paix durable;
2. Que la Suisse mène ces négociations de paix en collaboration avec le « Centre pour le dialogue humanitaire » (HD Centre), réputé pour son rôle de facilitateur dans la résolution des conflits dans le monde ;
3. Que le Conseil Fédéral du gouvernement suisse avait annoncé qu’une « deuxième rencontre avec divers groupes d’opposition camerounaise a eu lieu en Suisse du 25 au 27 juin 2019 dans le but de préparer les futures négociations de paix entre le gouvernement camerounais et l’opposition politique »;
4. Que selon des informations dignes de foi en possession de Mandela Center International, la rencontre de Genève avait rassemblé des représentants des dirigeants séparatistes SISIKU AYUK TABE et Samuel SAKO, ainsi que ceux des mouvements de libération : Ambazonian Recognition Collaborative Council (ARCC), Federation of Southern Cameroons Women’s Organizations (FSCWO), Movement for the Restoration of the Independence of Southern Cameroons (MoRISC), Republic of Ambazonia Nationals (RoAN), Southern Cameroon Liberation Council (SCLC), Southern Cameroons Congress of the People (SCCOP), Southern Cameroon People Organisation (SCAPO), Ambazonian People’s Restoration Movement (APERM), etc, bien que certains artivistes avaient refusé de faire le déplacement estimant que “des règles équitables” n’étaient pas au rendez-vous ;
5. Que suite à ses nombreuses prestations sur les plateaux de télévision au Cameroun concernant la crise anglophone, le sieur Abdul Karim Ali a été sollicité par le gouvernement suisse à travers S.E. Pietro Lazzeri, Ambassadeur de Suisse en République du Cameroun, en République de Guinée Équatoriale et en République centrafricaine pour amener les leaders sécessionnistes sur la table des négociations ;
6. Qu’il convient de rappeler que Abdul Karim Ali, originaire du Nord-Ouest, âgé de 38 ans, est ingénieur Microsoft de l’institut d’ingénierie informatique Microsoft en Inde après avoir fréquenté simultanément les écoles primaires anglo-arabes et islamiques, au CPC Bali, à CASST Bambili dans la région du Nord-Ouest du Cameroun et a étudié la théologie chrétienne et les hautes études islamiques au Cameroun;
7. Qu’Abdul Karim Ali est aujourd’hui, un érudit musulman de la Bible, conférencier motivateur et conférencier, activiste des droits de l’homme et instructeur en études islamiques;
8. Que c’est à ce titre qu’il s’est rendu en Suisse en début septembre 2019, un voyage facilité et financé entièrement par gouvernement suisse et le Centre pour le dialogue humanitaire (HD);
9. Qu’à son arrivée à Genève, en Suisse, il s’est rendu compte que certains activistes de la cause anglophone étaient aussi conviés à la réunion notamment BOH Herbert, Dr AKAWANGA Ebenezer, Dr Sako, etc ;
10. Qu’au terme de la réunion qui a vu la participation d’organisations internationales, et était axée sur le conflit armé dans les régions anglophones, il a pris une série de photos avec ces leaders et un CD sur la République d’Ambazonie lui a été remis;
11. Qu’à son retour au Cameroun, Abdul Karim était logé à l’hôtel Novotel à Douala aux frais des organisateurs et a participé à une émission animée par B. Jonathan sur la chaine télévision Equinoxe, à Douala, le mardi 24 septembre 2019, au cours de laquelle il a déclaré que “la situation actuelle dans la zone anglophone du Cameroun ne sera résolue que par la négociation et non par le dialogue … Je n’arrêterai pas de dire la vérité même si cela me coûte la vie.”;
12. Que ce n’était pas la première fois qu’Abdul Karim s’en prend ouvertement au régime du président Biya pour dénoncer ce qu’il a appelé une gestion catastrophique de la crise;
13. Qu’au lendemain de l’émission, à la demande de l’ambassadeur Suisse, S.E. Pietro Lazzeri, qui l’a joint téléphoniquement, il s’est rendu à Yaoundé pour lui donner le compte rendu de sa mission en Suisse;
14. Qu’il a été chaleureusement accueilli et félicité à l’ambassade et l’ambassadeur lui a proposé une note officielle de félicitation pour ses bons et loyaux services en faveur de la paix dans la résolution de la crise anglophone;
15. Qu’à sa sortir de l’ambassade, vers 15h00, ce mercredi 25 septembre 2019, Abdul Karim Ali a été enlevé par des gendarmes lourdement armés et postés à l’entrée et conduit dans un premier temps à la brigade territoriale de Bastos, Yaoundé et ensuite au Service Central des Recherches Judiciaires (SCRJ) du Secrétariat d’Etat à la Défense (SED), chargé de la gendarmerie nationale où il est toujours détenu dans des conditions inhumaines;
16. Que selon sa mère, Mme Hadjia Amina Ali, à qui Abdul Karim Ali a communiqué le contact de l’ambassadeur avant son déplacement sur Yaoundé, « la dernière fois que j’ai parlé avec mon fils, c’est quand il a quitté l’ambassade de Suisse (…) Lorsque nous avons parlé à 15 heures, mon fils m’a dit qu’il se rendait à Douala après avoir rencontré l’ambassadeur de Suisse pour libérer l’hôtel et se rendre à Bamenda. Mais, deux heures plus tard, il ne répondait plus aux appels, jusqu’à ce que nous apprenions de son arrestation sur les réseaux sociaux » ;
17. Que Mme Hadja Amina Ali a appelé à plusieurs reprises l’ambassadeur de Suisse, ce mercredi 25 septembre 2019, après 15 heures, mais sans aucune réponse : «J’ai parlé à l’ambassadeur, il m’a dit que la Croix-Rouge Suisse et d’autres organisations internationales des droits de l’homme avaient été prévenues, mais je n’ai pas réussi à voir mon fils à ce jour», a-t-elle déclaré;
18. Que selon ses conseils, Maîtres Christopher NDONG, YONG et NDETAN Victor, tous avocats au Barreau du Cameroun, le défenseur des droits humains, réputé pour ses positions tranchées en faveur de la cause de la minorité anglophone persécutée au Cameroun serait poursuivi pour complicité d’acte de terrorisme, complicité de
sécession et complicité d’apologie au terrorisme;
19. Que selon de l’article 2 de la Loi camerounaise N° 2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme, Abdul Karim Ali risque une peine de mort;
20. Qu’au terme de son audition, il a été déféré au Tribunal Militaire de Yaoundé qui jouit d’une compétence nationale, le mardi 1er octobre et le Commissaire du gouvernement, le Lieutenant-Colonel ERIC THADÉE ENGONO, a ordonné un SOIT FAIT RETOUR pour un complément d’enquête et depuis il est toujours détenu incommunicado (sans droit de visite) dans des conditions exécrables dans les locaux du SED;
21. Que toutes les tentatives de Mandela Center International de joindre les autorités de l’Ambassade suisse à Yaoundé se sont soldées par l’échec et l’Ambassadeur n’a fait aucune déclaration à ce jour;
22. Qu’il s’agit clairement d’une arrestation illégale d’un activiste des droits de l’homme, sans aucun mandat ni titre de justice suivie d’une détention arbitraire qui est une violation du droit à la liberté et s’inscrit dans le non-respect du droit national et des standards internationaux auxquels la République du Cameroun a librement souscrit ;
23. Que selon le Groupe de travail sur les détentions arbitraires auprès des Nations unies (créé par la résolution 1991/42 du Conseil des droits de l’Homme), « la privation de liberté est arbitraire lorsque la privation de liberté résulte de poursuites ou d’une condamnation relatives à l’exercice de droits ou de libertés proclamés dans les articles 7, 13, 14, 18, 19, 20 et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aussi, pour les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans les articles 12, 18, 19, 21, 22, 25, 26 et 27 de cet instrument (catégorie II) » ;
24. Que selon l’article 9 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme : “Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé”;
25. Que l’article 9(1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques stipule que: “Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire”;
26. Que le droit à la liberté de la personne mentionné dans l’Article 6 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples a été violé sur toute la ligne: «…Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraires. Nul ne peut être privé de sa liberté,… » ;
27. Que les droits civils et politiques sont des droits fondamentaux de l’homme, inhérents à la notion même d’individu et sont totalement protégés par des textes à valeur constitutionnelle, comme la Loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
28. Que l’État Camerounais a l’obligation de se conformer, en toutes circonstances, aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’homme, adoptée le 9 décembre 1998 par l’Assemblée générale des Nations Unies, en particulier ses articles 1 et 12.
Eu égard à tout ce qui précède, Mandela Center International :
1. Condamne, avec des termes très durs, la détention arbitraire d’un activiste des droits de l’homme, contrairement aux principes fondamentaux des droits humains, au lendemain d’une parodie de Grand Dialogue National à Yaoundé;
2. Exige, avec fermeté, du Gouvernement camerounais, sa libération immédiate et sans condition ;
3. Demande, avec insistance, au Gouvernement Suisse de faire la lumière sur ses offres de négociations pour un retour à la paix à travers une solution pacifique et un dialogue inclusif pour une paix durable dans le cadre de la crise anglophone au Cameroun;
4. Recommande vivement à la communauté internationale et aux organisations des droits de l’homme d’accentuerla pression sur le régime de Yaoundé pour mettre rapidement un terme à la persécution des défenseurs des droits de l’homme au Cameroun.
Fait à Yaoundé, le 06 octobre 2019
Le Secrétaire Exécutif Permanent
Jean Claude Fogno