“Sortir sans haine”, Oui, c’est la marque des grands Hommes.
Mais garder en mémoire que la conquête du pouvoir par les populistes se fait par des méthodes anti-démocratiques, dont la manipulation et l’asservissement d’institutions judiciaires.
Les peuples devront également les reconquérir pour restaurer les démocraties dans un certain nombre de pays dans le monde, et pas les moindres.
Les plus touchés par ce phénomène sont malheureusement les dictatures d’Afrique noire francophone sous l’influence de la France, qui laisse croupir et parfois mourir des prisonniers politiques dans un silence pour le moins complice et assourdissant.
C’est pour cela que notre organisation existe et il s’agit d’un combat de tous les instants.
Ça suffit!
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« Je sors sans haine » : l’ancien président brésilien Lula libre après un an et demi en prison
Et soudain, Lula sort. Il passe une grille, fait quelques pas. Le sourire est timide. Le regard un peu perdu. Vite, on l’entoure, on l’acclame, on l’embrasse. Il se retrouve. S’arrête. Lève le poing. « Lula Livre ! Lula Livre ! », chante la petite foule habillée en rouge, qui l’attend depuis des heures, à la sortie du siège de la police fédérale de Curitiba. Dans la voix des partisans de l’ancien président, on le sent, ce n’est déjà plus une revendication ou un slogan. « Lula livre », est devenue une affirmation. Un cri de victoire.
Il est un peu plus de 17 h 30, et Lula est sorti de prison, après un an et demi passé derrière les barreaux. Tout est allé si vite, dans ce Brésil dribbleur comme aucun, capable d’interminables replis comme d’inimitables accélérations, d’échappées par les belles par les latérales. Il y a moins de 24 heures, le Tribunal suprême du pays déclarait que nul ne pouvait être emprisonné au Brésil avant l’épuisement de l’ensemble de ses recours, pavant la voie pour la libération de l’ancien président. Le reste, ce vendredi 8 novembre, s’est passé comme une lettre à la poste : il a suffi aux avocats, en début d’après-midi, de déposer une demande auprès de la juge locale, qui n’a pas cherché à lutter. En quelques heures, Lula était dehors. Libre, donc.
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A toute vitesse, dans la journée, les militants du parti des travailleurs (PT) de Lula ont monté une scène, face à la prison. Là se croisent les visages de la vie de l’ancien métallo devenu président : syndicalistes à casquette rouge, professeurs d’université en chemise blanche bien repassée, jeunes gauchistes barbus, caciques indiens en coiffe traditionnelle… Tous venus l’embrasser. A peine sorti, sans attendre, face à la foule, Lula s’empare du micro. Ça se voit : l’homme a une fringale d’estrade. 580 jours sans scène, sans applaudissements, sans public, ça a dû être un supplice pour cet acteur politique sans pareil, peut-être le plus grand de l’histoire du Brésil.
Un Lula offensif sorti de prison
« Rien ne peut me vaincre ! », lance Lula, qui commence par remercier la « vigilia », ce groupe de quelques centaines de fidèles, qui a organisé un campement de fortune face à sa prison. « Vous avez apporté l’énergie démocratique dont j’avais besoin pour résister », poursuit-il, ému, embrassant même sous les vivats sa nouvelle amoureuse, Rosângela da Silva, dite « Janja », sociologue et militante du PT. « J’ai réussi la prouesse d’être emprisonné et de me trouver une amoureuse ! », plaisante l’ex-président. Lula rigole. La foule s’amuse. Les pétards éclatent. Les poings se lèvent, se rouvrent, l’index et le pouce déplié en forme de « L », comme signe de ralliement.
Mais vite, le ton se fait offensif. Le visage se ferme. L’ex-président tonne « cette vilenie et cette crapulerie du côté pourri de l’Etat brésilien », contre ce « gang et cette bande mafieux », c’est-à-dire la justice, la police et les médias, qui ont osé le mettre en prison et « tenté de criminaliser la gauche, le PT et Lula » lui-même. « Je sors sans haine, car à 74 ans, il n’y a de place que pour l’amour dans mon cœur », affirme Lula. Faut-il le croire ? Car de toute évidence, c’est bien un Lula en mode combat, vêtu symboliquement de noir, prêt à en découdre qui est sorti de prison. Un Lula offensif, « guerrier du peuple brésilien », comme le surnomment ses partisans.
18 h 10, fin du discours. Seize minutes seulement. Les poings se baissent. Tant pis pour le chronomètre : la gauche brésilienne est à la fête. Elle en a trop avalé des couleuvres, elle en a trop subi des défaites, depuis la destitution de Dilma Rousseff jusqu’à l’élection de Jair Bolsonaro, pour ne pas célébrer, rien qu’un peu. « La libération de Lula, c’est une première victoire ! », se félicite Taliria Petrone, députée du Parti socialisme et liberté (PSOL), un parti concurrent du PT et critique de Lula. « C’est un événement qui peut amener la gauche à se réunir contre l’extrême droite, pour élaborer un nouveau projet de société. » Après la victoire de la gauche aux élections en Argentine et les manifestations monstres contre le gouvernement de droite au Chili, « tout cela pourrait marquer le début d’un printemps latino-américain ! », rêve déjà la jeune parlementaire, âgée de 34 ans.
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Un Jair Bolsonaro resté silencieux
Mais au Brésil, tout le monde est loin de se réjouir. Car Lula divise. Il suscite l’amour autant qu’une haine viscérale. « Lula libre, c’est l’institutionnalisation de l’impunité », enrage ainsi le député Marco Feliciano, pasteur évangélique et membre de la majorité, estimant que le Tribunal suprême a commis rien de moins qu’un « homicide » contre « le peuple brésilien ». « Aujourd’hui est un jour très triste pour qui travaille et qui est honnête dans ce pays », a réagi sur les réseaux sociaux Eduardo Bolsonaro, parlementaire et fils du président. « Vous qui célébrez la liberté de Lula, vous célébrez aussi la libération des voleurs, des assassins, des pédophiles et des violeurs », pouvait-on aussi lire sur des « posts » ultraviolents de la twittosphère d’extrême droite.
Et Jair Bolsonaro, dans tout cela ? Le locataire de l’Alvorada (la résidence présidentielle à Brasilia) est resté ce vendredi inhabituellement silencieux, évitant les commentaires comme les journalistes. Paradoxalement, « la sortie de Lula de prison pourrait être une opportunité pour lui, analyse Eduardo Mello, politologue à la Fondation Getulio Vargas (FGV). Avec Lula en scène, Bolsonaro dispose d’un ennemi clair, identifié. Cela peut réveiller les sentiments anti-PT et anti-Lula d’une partie de la population, repolariser la société, et faire revenir dans son giron des électeurs qui s’étaient éloignés de lui ces dix derniers mois. »
A Curitiba, face à la prison, les partisans de Lula rêvent de construire un monument, en hommage à l’ancien « prisonnier politique », histoire d’acter qu’une page s’est définitivement tournée. Et pourtant : Lula n’est « que » libre. Condamné en seconde instance, il n’est ni blanchi ni innocenté et pourrait très bien un jour retourner derrière les barreaux, si ses recours sont rejetés. Une demi-douzaine d’affaires pendent d’ailleurs par ailleurs au nez de l’ancien président. En vertu de la loi dite « ficha limpa », il ne peut enfin occuper de charge publique ni être candidat à aucune élection, et surtout pas au scrutin présidentiel de 2022.
Mais Lula, c’est une évidence, ne s’arrêtera pas. Ce samedi, il devait se rendre pour un grand meeting au siège du syndicat des métallurgistes de Sao Bernardo do Campo, près de Sao Paulo, là même où le 7 avril 2018 il s’était rendu à la police, après plusieurs jours de résistance. Là, dans ce triangle mythique de l’ABC, cœur industriel et syndicaliste du Brésil, il sera auprès des siens, tel un prêtre en son église. Et ensuite ? Nul ne sait trop encore. Pourrait-il déménager dans Nordeste, bastion de la gauche ? Prendre la tête d’une « caravane » et faire le tour du pays ? Quitter le pays et aller en Argentine, assister à l’investiture d’Alberto Fernández ? Une chose est sûre : éligible ou non, Lula est en campagne, micro à la main. Et l’on peut penser qu’il ne le lâchera plus.
Bruno Meyerfeld (Sao Paulo, envoyé spécial)
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Brazil’s former president Lula walks free from prison after supreme court ruling
- Workers’ party leader had been held for 580 days for corruption
- Court rules incarceration unlawful until appeals exhausted
Brazil’s former president Luiz Inácio Lula da Silva has been released from prison where he was serving a 12-year corruption sentence, after a supreme court ruling that delighted his supporters and infuriated followers of the far-right president Jair Bolsonaro.
He was greeted by hundreds of supporters wearing red vests emblazoned with his face outside the federal police headquarters in the city of Curitiba, where he has been imprisoned for 580 days.
In a speech to the crowd, Lula thanked party militants who had camped outside throughout his imprisonment, and attacked the “rotten side” of the police, prosecutors, tax office and justice system for jailing him.
“They did not imprison a man. They tried to kill an idea,” he said. “Brazil did not improve, Brazil got worse. The people are going hungry. The people are unemployed. The people do not have formal jobs. People are working for Uber – they’re riding bikes to deliver pizzas.”
Lula was imprisoned in April 2018 after a sentence for corruption and money laundering handed down by the controversial judge Sergio Moro was upheld by an appeal court. He has always proclaimed his innocence and argued the case against him was politically motivated.
On Thursday, Brazil’s supreme court ruled defendants could only be imprisoned after all appeals to higher courts had been exhausted, paving the way for Lula and another 5,000 prisoners to be freed.
The decision followed revelations on investigative website the Intercept Brasil that Moro had colluded with prosecutors leading the sweeping corruption investigation, known as Operation Car Wash, into bribes and kickbacks at the state oil company Petrobras that imprisoned Lula, powerful business leaders, middlemen and politicians from his Workers’ party and its political allies.
Polls had showed Lula was leading in last year’s presidential election, but the conviction removed him from the race, giving Bolsonaro a clear run.
Bolsonaro then named Moro his justice minister, heightening the sense of injustice. The president appeared to recognize the former judge’s contribution in a speech on Friday. “If he hadn’t accomplished his mission, I wouldn’t be here either,” Bolsonaro said.
As president from 2003 to 2010, Lula presided over an extraordinary period of economic growth and reduction of inequality as innovative cash transfer schemes took tens of millions out of poverty. Even in prison he has cast a long shadow over Brazilian politics – and his release is only likely to widen bitter political divides.
“A free Lula increases polarisation, which could increase Bolsonaro’s support,” said Maurício Santoro, a professor of international relations at the State University of Rio de Janeiro. “On the other hand, his charisma and political ability will make the opposition more effective against Bolsonaro. As leader of the opposition, Lula has more international prestige than the president.”
Bolsonaro did not immediately react to Lula’s release, but Eduardo Bolsonaro, the president’s congressman son, tweeted that leftists celebrating the news were “shitting on society’s head”.
Controversy swirled around the supreme court decision – the third time it had changed its mind on the issue in 10 years. Richer Brazilians have traditionally dragged out legal processes to remain at liberty until their crimes became erased by the statute of limitations.
Others imprisoned in the same corruption investigation have also requested release – including Lula’s former chief of staff, José Dirceu, João Vaccari Neto, the party’s former treasurer, and Renato Duque, a Petrobras executive embroiled in the scandal.
Nor are Lula’s legal problems over – he faces eight other cases, according to the Folha de S.Paulo newspaper. His lawyers have called this legal blitzkrieg “lawfare”. In one case, he was handed a 12-year, 11-month sentence over his alleged ownership of a country house – a decision the appeal court will consider next week. Brazil’s Congress is also considering measures that could effectively revert the supreme court’s decision.
But Lula was keen to show he had lost none of his fighting spirit. Earlier on Friday, his official Twitter account posted a video of him working out to the soundtrack from Rocky.