Une nation ne peut survivre si elle se préoccupe davantage d’exclure plutôt que de séduire, a déclaré le philosophe. Un projet de loi est actuellement en discussion à l’Assemblée nationale du Cameroun, qui créé des droits pour les « autochtones » des communes du pays au détriment des « allogènes » et autres résidents. Cette loi devrait choquer les députés. Mais bon. Nous avons les “élus” que nous méritons. Ils voteront le texte en se réjouissant de la disparition des Délégués du gouvernement et en considérant que chaque petit pas est une grande avancée face à ce pouvoir autoritaire à la fois réactionnaire et conservateur.
Ce texte devrait être réécrit. Non pas seulement parce qu’il n’a pas grand-chose à voir avec les recommandations du Grand dialogue national mais surtout parce que les termes « Autochtone » et « Allogène » sont de gros mots qui ne devraient pas figurer dans la loi. Nous devrions même en interdire l’usage à nos enfants car trop connotés, à la fois vagues et tranchés, porteur d’arbitraire et de discrimination, imprégnés de ce venin qui fera le suicide camerounais.
Il faut avoir une pauvre idée de la nation pour prétendre la construire en excitant les bas-instincts de la population.
La grandeur d’un dirigeant consiste à s’élever pour montrer le chemin. A scruter l’horizon pour éviter les écueils. A rêver d’éternité non pas pour jouir d’un éternel présent mais pour un futur lointain et pour l’Histoire. Bref, un dirigeant sage et visionnaire gouverne assis au sommet du Mont Fako, le point le plus élevé du Cameroun.
On en est loin, pauvres de nous. Lorsqu’on permet à une poignée de fonctionnaires de rédiger un projet de loi, sur un coin de table, en maniant ce concept explosif, c’est croire qu’on va sauter avant l’impact du train lancé contre le mur. Manipuler les origines est la preuve qu’on n’a rien à proposer. C’ est une faute. Une supercherie. Pire, une « Nègrerie ».
Nicolas Sarkozy et sa « plume » Henri Gaino doivent en sourire. Les voilà réhabilités après leur très controversé Discours de Dakar dont voici quelques extraits à relire avec hauteur :
« Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire ( …)
Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine, ni pour l’idée de progrès.
Dans cet univers où la nature commande tout, l’homme échappe à l’angoisse de l’histoire qui tenaille l’homme moderne mais l’homme reste immobile au milieu d’un ordre immuable où tout semble être écrit d’avance.
Jamais l’homme ne s’élance vers l’avenir. Jamais il ne lui vient à l’idée de sortir de la répétition pour s’inventer un destin.
La réalité de l’Afrique, c’est celle d’un grand continent qui a tout pour réussir et qui ne réussit pas parce qu’il n’arrive pas à se libérer de ses mythes.
Ouvrez les yeux, jeunes d’Afrique, et ne regardez plus, comme l’ont fait trop souvent vos aînés, la civilisation mondiale comme une menace pour votre identité mais la civilisation mondiale comme quelque chose qui vous appartient aussi. »
A l’époque, les Africains avaient pris ce discours pour un crachat. Mais à regarder la réalité en face, Sarko était-il si loin de la vérité ? Voire.