Le Cameroun est-il un pays adulte?
La France, dernier rempart international de la dictature finissante de Paul Biya? Poser cette question est en elle-même très importante parce que, bien que dirigée par un régime gérontocratique depuis 37 ans, on peut néanmoins se demander également si le Cameroun est un pays adulte? En effet, la France de Macron et le Cameroun de Biya sont censés s’être affranchis de ce type d’ingérence que la Françafrique a maintenu en Afrique, mais est-ce le cas?
Le député Sébastien Nadot confirme dans sa question au Ministre Jean-Yves Le Drian à l’Assemblée nationale française, transmise sous forme de correspondance à l’ambassadeur de France aux Nations Unies (ONU), le rôle pour le moins ambigu du gouvernement Français et singulièrement de sa diplomatie, dans la persistance en toute impunité des crimes contre l’humanité et d’un génocide au Cameroun anglophone.
Paris aurait ainsi protégé et continuerait activement de protéger le régime génocidaire de Yaoundé sur la scène internationale.
En effet, M. Nadot parle d’un sujet qu’il maîtrise assez bien, puisqu’il vient précisément d’écrire un livre sur la torture du prisonnier politique Amadou Vamoulke, maintenu arbitrairement en prison dans un état de santé alarmant.
Pour la première fois dans l’histoire du Cameroun, nous avons eu la faiblesse de penser que l’opération Épervier pouvait démontrer que les caciques du régime Biya et des hommes d’affaires ne sont plus protégés par un voile d’impunité dans le pays. Bien que cela, dans l’ensemble, représentait une évolution positive que notre organisation soutient et a soutenu réellement, ce malgré les mauvaises langues, nous ne pouvons malheureusement plus cacher et taire les dysfonctionnements importants, mêmes à des parlementaires français jusqu’ici peu portés sur ces « réalités de chez nous » . Car dès le début, l’opération aurait utilisé des procédures douteuses et des formes d’enquête cynique, telles que les fuites sélectives d’informations dans les médias et la détention des personnes sous la contrainte, avant d’être condamnées sans preuves après leur avoir littéralement placées sous la torture morale en les forçant aux aveux. Ainsi, les preuves et les garanties d’une procédure régulière sont jetées par la fenêtre et rien ne nous protège tous, ni ne sépare la démocratie de la dictature.
De plus, si vous atterrissez à Yaoundé ces jours-ci, vous ne trouverez pas de chars dans les rues, mais ne vous y trompez pas, des journalistes sont arrêtés et ce sont deux guerres qui se déroulent simultanément dans le pays, une au nord avec Boko haram et l’autre dans les régions anglophones du pays. Le gouvernement met en œuvre une stratégie bien planifiée pour réduire la sphère démocratique libérale criminalisant et qualifiant l’opposition de traîtres et de terroristes. Les ONG et les groupes de la société civile ont été exclus de l’élaboration des politiques. L’état de droit est mis à mort par différentes entourloupes.
C’est une tragédie absolue que fait le régime de Biya dans les régions anglophones du Cameroun. Les Camerounais anglophones ont dû tolérer une culture de corruption, de dépravation et de guerre pendant si longtemps seulement pour constater que c’est ce que la kleptocratie fasciste pensait être « normale » de tous temps pour eux et elle semble très « surprise » lorsque ses victimes essaient de leur résister. Les Camerounais méritent tellement mieux.
Ça doit cesser.
Au risque de se voir une fois de plus accusée de complicité de génocide comme au Rwanda en 1994, du moins être associée à la terreur d’une tyrannie finissante au Cameroun, la France doit ouvertement prendre ses distances avec le régime génocidaire de Paul Biya. Car visiblement la “Patrie” dite “des Droits de l’Homme” n’aurait toujours pas tiré toutes les leçons du plus retentissant épisode malheureux de sa présence en Afrique.
En effet, le Cameroun est censé être un pays adulte à ce stade. Cependant force est de constater qu’à travers la «Françafrique», la France continue de s’impliquer clandestinement dans les affaires les plus horribles en Afrique depuis des décennies et l’ingérence prend même souvent la forme d’éloges très publics pour des dictateurs comme Paul Biya régulièrement invité en France par le président Macron.
C’est le résultat naturel du culte de l’argent du sang et de la déification des entreprises prédatrices que les partisans de la Françafrique appellent « développement et libre entreprise » et même « démocratie ».
Mais comme l’ont démontré des penseurs Français tels que François-Xavier Vershave, Dominique Benquet et Pierre Pean, la Françafrique aime les dictateurs, déteste tout ce qui ressemble à la vraie démocratie et se recueille à l’autel du profit macabre. Elle ne peut absolument pas dépasser les intérêts personnels étroits et égoïstes, maintenant des réseaux de clientélisme, de patronage paternaliste et patrimonial qui réduisent les pays Francophone d’Afrique en état d’infantilité permanente et de développement régressif.
Quelle triste fin pour “l’expérience africaine”.
Dommage!
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
English version
Is Cameroon a grown-up country?
Is France, the last international bulwark of the ending dictatorship of Paul Biya? Asking this question is in itself very important, despite being led by a gerontocratic regime for the past 37 years, it is also asking whether or not Cameroon is a grown-up country.
Indeed, Macron’s France and Cameroon are supposed to be beyond that kind of interference that the Francafrique played in Africa. French lawmaker, Sébastien Nadot, however, confirms in this correspondence addressed to the ambassador of France to the United Nations (UN), the role for the least ambiguous of the French government and particularly of its diplomacy, continues to play in Africa and the persistence with all impunity of crimes against humanity and of a genocide in English-speaking Cameroon.
Paris would thus have protected and would actively continue to protect the genocidal regime of Yaoundé on the international scene.
Indeed, Mr. Nadot just wrote a book about the torture of political prisoner, Amadou Vamoulke kept in solitary confinement and in an alarming state of health.
For the first time in Cameroonian’s history, Operation Epervier demonstrated that politicians and businessmen were no longer protected by a veil of impunity in the country. While this, on the whole, represented a positive development that our organization actually supports, despite of the naysayers, there were, notwithstanding, significant downsides: from the beginning the operation allegedly used questionable procedures and nakedly self-serving forms of investigations, such as selectively leaking information to the media and detaining people, under duress, before they were convicted in order to force confessions. Thus, evidence and due process are thrown out of the window and there is nothing that protects all of us and separates democracy from dictatorship.
What is more, if you land in Yaoundé these days, you won’t find tanks on the streets, but don’t be fooled, journalists are being arrested and they are two wars going on simultaneously in the country, one in the north with Boko haram and the other in the Anglophone areas of the country. The government is executing a well-planned strategy to shrink the liberal democratic sphere criminalizing and branding the opposition as traitors and terrorists. NGOs and civil society groups have been marginalized from policymaking. The rule of law faces death by a thousand cuts.
it is an absolute tragedy what the Biya’s regime is doing in the Anglophone areas of Cameroon. The English-speaking Cameroonians have had to tolerate a culture of corruption, depravity and warfare for so long only to find that this is what the fascist kleptocracy thought to be “normal” all along and they seem very “surprised” when people are trying to resist them. Cameroonians deserve so much better.
This must stop.
At the risk of being once again accused of complicity in genocide as in Rwanda in 1994. Because obviously the “Fatherland” called “Human Rights” still would not have learned all the lessons from this unfortunate episode of its presence in Africa.
Indeed, Cameroon is supposed to be a grown-up country at this point, however, through the “Francafrique,” France continues to meddle clandestinely in African affairs for decades and the meddling takes the shape of very public praise for dictators like Paul Biya regularly invited in France by president Macron. It is the natural outcome of money worship and corporate deification that the partisans of the Francafrique call “development and free enterprise” and even “democracy”.
As the like of Francois-Xavier Vershave, Dominique Benquet and Pierre Pean have researched, Francafrique loves dictators, hates anything resembling real democracy and worships at the altar of profit and entirely unable to rise above narrow self-interest and maintaining patronage and paternalistic and patrimonial patronage networks which reduces French-speaking countries in Africa to a state of infantility and arrested development.
What a sad end for the “African Experiment”.
Pity!
The Committee For The Release of Political Prisoners – CL2P