Tibor Naggy: l’urgence d’imposer et obtenir la sécurisation de toute la zone anglophone du Cameroun
Pendant leur Présidence du Conseil de Sécurité, il est souhaitable que les Américains obtiennent la sécurisation de toute la zone anglophone du Cameroun; avec imposition d’un retrait de tous les soldats de l’armée camerounaise remplacés par des forces de maintien de la paix des nations unies.
À défaut, il faudra alors envisager une intervention sur la base du devoir d’ingérence humanitaire.
On ne peut simplement plus laisser se poursuivre le génocide en vase clos qui se poursuit en toute impunité, sous le regard passif voire complaisant des principaux partenaires extérieurs du Cameroun, dont la France.
Ça suffit!
JDE
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Un 3e mandat pour Alpha Condé ? Washington indécis
Que pensent les États-Unis du statut spécial accordé par le président Paul Biya aux deux provinces anglophones du Cameroun ? Les Américains sont-ils pour ou contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé en Guinée Conakry ? Tibor Nagy est le secrétaire d’État adjoint aux Affaires africaines, autrement dit le « Monsieur Afrique » de Donald Trump. De passage à Paris avant une tournée en Afrique, qui commence demain, samedi 18 janvier, par Bangui, le diplomate américain répond aux questions de RFI.
RFI : Votre collège de la Défense annonce une réduction des effectifs militaires américains en Afrique. Est-ce à dire que vous allez rapatrier les quelque 7 000 soldats américains déployés sur le continent ? Est-ce que vous allez fermer notamment la base de drones qui vient d’ouvrir à Agadez, au Niger ?
Tibor Nagy : Je pense que cette question est prématurée. Pour moi, il n’y a pas encore eu d’annonce ferme ou chiffrée. Évidemment, le ministère de la Défense est en train d’évaluer les meilleurs endroits où déployer ses effectifs. Donc, je vous encourage à interroger le ministère de la Défense. Ce que je peux dire, c’est que le gouvernement américain demeure extrêmement engagé au Sahel, car, nous le savons, la menace sur place n’est pas que militaire. Elle est liée aux problèmes de stabilité et de développement. J’ajoute que nos programmes sécuritaires ne sont pas tous gérés par le ministère de la Défense. Le Département d’État finance plusieurs programmes de formation à la stabilité et aux droits de l’homme.
Oui, mais la France s’inquiète. Lundi, Emmanuel Macron a dit : « Ce serait un éventuel retrait américain. Ce serait une mauvaise nouvelle pour la France ». Est-ce que vous entendez son message ?
Pour cela, vous devez poser la question à mes collègues français.
Au Cameroun, suite à une grande conférence nationale en octobre dernier, le président Biya propose un statut spécial pour les deux provinces anglophones du Sud-Ouest et du Nord-Ouest. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Le Cameroun, c’est un pays qui m’empêche de dormir pour lequel mon cœur saigne. Oui, le Dialogue national a été un pas positif. Oui, la libération des prisonniers politiques par le président Biya a été un pas positif. La semaine dernière, j’ai rencontré l’un de ces opposants, monsieur Maurice Kamto. Mais ce qui compte maintenant, c’est la mise en œuvre des décisions. Ce que veulent plus que tout les populations du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, c’est une décentralisation authentique. Elles ne veulent pas d’une décentralisation symbolique, avec juste des mots sur le papier et des beaux discours. Malheureusement, chaque jour qui passe, de plus en plus de personnes de ces deux régions sont tentées par la solution d’avoir leur propre pays. Pour les États-Unis, c’est une mauvaise solution, car le Cameroun est un seul pays avec deux systèmes. Mais il faut une réelle décentralisation. La clé, c’est la mise en œuvre, c’est ce qui se passe sur le terrain.
Donc ce que vous dites, c’est que, c’est un premier pas, mais cela ne suffit pas ?
Oui, parce que vous pouvez avoir une conférence et des conclusions. Mais après, que se passe-t-il sur le terrain ? Quelle proportion du budget de l’État est consacrée à la décentralisation ? À quels postes sont placés les gens élus et les gens nommés ? S’il y a des postes électifs, y aura-t-il des postes hiérarchiquement supérieurs qui relèveront d’une nomination du président ? Les populations doivent prendre le contrôle de leur propre vie et de leur héritage.
En Centrafrique sont déployés plusieurs centaines de militaires russes. Les uns, comme conseillers, les autres, comme membres de milices privées. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
C’est l’une des raisons pour lesquelles je vais à Bangui. Je vais visiter un certain nombre de pays. Et en dépit de ma longue histoire avec l’Afrique, ce sont des pays que je ne connais pas encore. J’ai vu le président Touadera à Washington. Et figurez-vous que, le président étant professeur et moi-même ayant fait un parcours académique, nous allons donner ensemble un cours dans l’université de Bangui où le président continue d’enseigner. J’en suis ravi. À Bangui, je vais évaluer la situation et voir les perspectives pour les élections de la fin de cette année.
Mais êtes-vous préoccupé par la présence militaire russe ?
En tout cas, je veux en savoir plus sur la situation des Russes. Leurs capacités formelles. Leurs capacités informelles. Car nous le savons, la Centrafrique est un pays extrêmement riche, mais cette richesse n’est pas entre les mains du gouvernement central. Dans son ensemble, la communauté internationale travaille à réunifier le pays. Il y a des anciens présidents qui rentrent. La situation est très dynamique. Mais dans la communauté internationale, nous voulons nous assurer que chacun ne tire pas la couverture à soi.
En Guinée Conakry, le président veut soumettre le projet d’une nouvelle constitution à référendum. Cela pourrait lui permettre de se représenter à un troisième mandat. Qu’est-ce que vous en pensez ?
Cela me touche aussi personnellement, car je connais le président Alpha Condé depuis des décennies. Depuis l’époque où il était prisonnier politique.
Vous étiez des amis…
Nous considérons que chaque pays a le droit de décider quel est son système politique et quelle est sa Constitution. Dans notre propre histoire, nous avons un président qui a fait quatre mandats, puis nous avons limité à deux mandats. C’est une chose de modifier sa Constitution en donnant la parole au peuple et en suivant un processus clair. Mais là où nous avons un problème, c’est quand les dirigeants changent une Constitution uniquement pour se maintenir en place.
Est-ce le cas aujourd’hui en Guinée ?
Je ne sais pas. Nous surveillons cela de très près. Il y a eu des évènements très inquiétants, avec des violences, des manifestations violentes et une répression violente. Notre ambassadeur est très impliqué et, à Washington, on regarde également cela de très près.
Il y a quelques jours, le ministre français des Affaires étrangères a déclaré : « Une réforme de la Constitution guinéenne ne nous paraît pas être obligatoirement partagée, ni par sa population ni par les voisins de l’État guinéen ».
On dit exactement la même chose. Le peuple de Guinée est le fondement de la souveraineté nationale et du pouvoir d’État. Si le processus est soutenu par le peuple, alors il est acceptable. S’il ne l’est pas ou s’il est manipulé, alors il n’est pas approprié. Dans ma position, il est très inconfortable de dire : ceci peut avoir lieu ou pas, ceci est bien ou mal. Car au bout du bout, ce n’est pas aux autres pays ou à quiconque d’autre de décider, c’est au peuple. Le pouvoir doit rester au peuple.