Le candidat de l’opposition à la présidentielle Agbéyomè Kodjo est soupçonné « d’atteinte à la sûreté de l’État » par le procureur du tribunal de Lomé, qui réclame la levée de son immunité parlementaire.
« C’est une chimère de plus du régime. De l’intimidation. C’est une manœuvre de plus pour nous museler. Agbéyomè Kodjo reste imperturbable. Nous irons jusqu’au bout ». Contacté par Jeune Afrique, Essénam Bêssan, membre du Mouvement patriotique pour la démocratie et le développement (MPDD) n’a pas de mots assez durs pour dénoncer la procédure engagée à l’encontre du candidat de l’opposition à la présidentielle du 22 février dernier.
Levée de l’immunité
Dans un courrier daté du 9 mars, dont Jeune Afrique a obtenu copie, le procureur de la République près le Tribunal de première instance de Lomé, Essolissam Poyodi, a sollicité auprès de la présidente de l’Assemblée nationale, Yawa Djigbodi Tségan, la levée de l’immunité parlementaire d’Agbéyomè Kodjo.
Le magistrat souhaite entendre l’opposant pour des faits « d’atteinte à la sureté de l’État » et affirme qu’il pèse à son encontre « de graves présomptions d’avoir commis des infractions à la loi pénale ».
Outre plusieurs déclarations dans les médias, le procureur pointe, en tant qu’éléments à charge, l’« usage abusif des symboles et emblèmes de l’État ». Dans le viseur du magistrat, la messe « d’investiture », organisée samedi 1er février sous l’égide de Mgr Philippe Fanoko Kossi Kpodzro, l’archevêque émérite de Lomé, qui avait été à l’origine de la « candidature unique de l’opposition » de Kodjo. Sont visés également son auto-proclamation comme président de la République et son appel en tant que « chef suprême des armées » aux forces de l’ordre et la nomination d’un Premier ministre.
Le procureur reproche par ailleurs à Agbéyomè Kodjo d’avoir accusé le président Faure Gnassingbé et des membres du gouvernement d’avoir orchestré les incendies des grands marchés de Lomé et de Kara.
Commission spéciale
Autant d’arguments que le procureur déploiera lors de son audition, ce mercredi, devant la commission parlementaire spéciale mise en place pour statuer sur cette demande de levée d’immunité parlementaire.
Présidée par la députée Memounatou Ibrahima (UNIR, parti présidentiel), cette commission doit livrer ses conclusions lors d’une plénière au cours de laquelle Agbéyomè Kodjo pourra répondre. Les députés seront ensuite appelés à voter pour statuer sur la levée de l’immunité parlementaire.
Ces poursuites s’inscrivent dans un bras de fer engagé dès le lendemain de la proclamation des résultats de la présidentielle du 22 février, à l’issue de laquelle, à la surprise générale, Agbéyomè Kodjo a été crédité de 18,37% des voix – pour 5% à l’opposant historique, Jean-Pierre Fabre.
Si Kodjo, n’a eu de cesse, depuis, de dénoncer ce qu’il qualifie de « mascarade électorale », la Cour constitutionnelle a confirmé ces résultats provisoires, le 4 mars, déclarant Faure Essozimna Gnassingbé définitivement élu avec 70,78% des suffrages exprimés, contre 19,46 pour Agbéyomè Kodjo.