Ngarbuh: Obéissance et Loyauté à Yaoundé
Il est bien connu que les régimes tyranniques privilégient l’obéissance et la loyauté. Notre organisation, le CL2P, a une longue liste de prisonniers politiques poursuivis pour déloyauté supposée. En effet, l’obéissance et la loyauté font partie intégrante des régimes autoritaires mais aussi des militaires, de la société et des communautés. Pour rassembler les individus afin qu’ils travaillent ensemble et avec succès vers un objectif commun, qu’il s’agisse d’atteindre une cible sur le champ de bataille, de créer un projet politique ou social durable ou simplement de diriger une communauté locale, l’obéissance doit être présente.
Avec le massacre de Ngarbuh dans le Nord-ouest anglophone, cependant, le CL2P en tant qu’organisation de défense des droits de l’Homme, sensibilise fréquemment sur l’instrumentalisation tyrannique de ces pratiques d’obéissance et de loyauté. Dans nos recherches en effet, il est clair que notre compréhension de l’obéissance et de la loyauté dans le contexte Camerounais est incomplète, en particulier, sa dimension morale et critique.
Une organisation telle que le CL2P plaide avec force pour cultiver «l’obéissance et la loyauté critique» dans l’armée, la société civile et nos communautés. De plus, nous essayons d’analyser comment le facteur politique, social et culturel a façonné notre passé, notre présent et notre avenir politique et militaire communs. Aussi, dans une culture politique despotique, il est difficile pour beaucoup d’entre nous de comprendre que l’obéissance n’est pas une catégorie illimitée. Nous devons conserver notre capacité de jugement critique et morale donc, en pratique, le pouvoir de nous singulariser et de désobéir quand bon nous semble, et surtout, quand les droits humains sont violés de façon systématique, flagrante et immorale.
Si nous faisons cela, nous allons comprendre que ce qui s’est passé à Ngarbuh où nos frères et sœurs camerounais et principalement des femmes et des enfants ont été massacrés, est inadmissible et doit susciter une indignation et une colère saine.
Notre organisation n’est pas une organisation politique mais une organisation des droits de l’Homme. Nous comprenons que ce qui s’est passé à Ngarbuh nous concerne tous. Nous devons, en tant que Camerounais, cesser d’abdiquer nos forces morales et politiques à un régime nécro-politique et ethno-fasciste sauvagement répressif.
Nous devons comprendre que, que nous le voulions ou pas, ce régime et ses milices agissent en notre nom. Nous avons donc tous le sang des victimes de Ngarbuh entre nos mains parce que c’est ce qui se passe lorsque de bonnes personnes se tiennent debout, détournent les regards et ne font rien. Notre lâcheté, cependant, ne nous absout pas de notre libre arbitre politique et moral.
Par conséquent, en tant que Camerounais, nous devons tous avoir honte de nous-mêmes et tant que nous continuerons d’externaliser nos droits politiques et moraux à une tyrannie sanguinaire, le pays lui-même va se transformer en un gigantesque Ngarbuh comme sa gestion improvisée de la pandémie du COVID-19 nous expose déjà à nos propres regards et consciences.
En pratique, la politique de l’autruche ne fonctionne plus au Cameroun. Ngarbuh est un signe de ce qui va nous arriver à tous si nous continuons à être lâches et peureux.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
Vidéo:
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English version
Ngarbuh: On Obedience and Loyalty in Yaoundé
It is well known that tyrannical regimes favor obedience and loyalty. Our organization, the CL2P, has a long list of political prisoners prosecuted for perceived disloyalty. Obedience and loyalty are an integral part of authoritarian regimes, but also of the military, society and communities. To bring people together so that they can work together successfully for a common goal, whether it is to capture a goal on the battlefield, create a lasting political or social project or simply lead a local community, obedience must be present.
With the Ngarbuh massacre, however, the CL2P as a human rights organization addresses a lot about obedience and loyalty practices. In our current research, it is clear that our understanding of obedience and loyalty in Cameroon is incomplete, in particular, its moral and critical dimension.
Thus, an organization such as the CL2P strongly advocates for cultivating “obedience and critical loyalty” in the military, civil society and our communities. In addition, how the political, social and cultural factor has shaped our common past, present and political and military future.
So, in a despotic political culture, it is difficult for many of us to understand that obedience is not an unlimited category. We must maintain our capacity for critical and moral judgment, therefore, in practice, the capacity to discriminate and disobey when we see fit and particularly when human rights are violated in an immoral fashion. If we do that, we will understand that what happened in Ngarbuh where our Cameroonian brothers and sisters and mainly women and children were massacred is unacceptable and must spark outrage.
Our organization is not a political organization but a human rights organization. We understand that what happened in Ngarbuh concerns us all. We, as Cameroonians, must stop surrendering our moral and political forces to a repressive ethno-fascist political necro regime.
We must understand that whether we like it or not, this regime and its militias are acting on our behalf. We all have the blood of the victims of Ngarbuh in our hands because that is what happens when good people stand up and do nothing. Our cowardice, however, does not absolve us of our political and moral free will.
Therefore, as Cameroonians, we must all be ashamed of ourselves and as long as we continue to externalize our political and moral rights, the country itself will turn into a gigantic Ngarbuh as the handling of COVID 19 exposes already to our naked eyes. In practice, the ostrich policy no longer works in Cameroon.
Ngarbuh is a sign of what will happen to all of us if we continue to be cowardly and fearful.
The Committee For The Release of Political Prisoners – CL2P