C’est une peine particulièrement lourde qui a été prononcée contre la chercheuse franco-iranienne, rapporte Siavosh Ghazi, notre correspondant à Téhéran. Emprisonnée en Iran depuis juin 2019. Fariba Adelkhah a été condamnée à six ans de prison pour plusieurs chefs d’accusation liés à la sécurité nationale, a déclaré son avocat.
Selon Me Saïd Dehghan, la chercheuse a notamment été condamnée à un an pour « propagande contre le régime » politique de la République islamique d’Iran et également à cinq ans pour « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale ». Selon l’avocat, l’accusation de « propagande contre le système politique » se réfère à l’avis de la chercheuse sur le port du voile en Iran. Mais, affirme Saïd Dehghan, il s’agit de remarques d’une universitaire avant tout, plus que d’un jugement de valeur.
Ces deux condamnations peuvent néanmoins toutes deux faire l’objet d’un appel. « Le tribunal l’a condamnée à six ans. Nous allons faire appel. »Saïd Dehghan a tout de même rappelé que selon les lois de la République islamique c’est la condamnation la plus lourde qui est appliquée. Ainsi la peine à l’encontre de Fariba Adelkhah est ramenée à 5 ans.
Indépendance d’esprit
Pour le diplomate François Nicoullaud, interrogé par RFI, la première raison de cette condamnation est directement liée au travail de la chercheuse. Par son « indépendance d’esprit », elle « devait énormément énerver les gens du régime. Elle était d’autant plus insaisissable qu’elle n’était pas une opposante systématique au régime. Elle disait ce qu’elle pensait. Elle acceptait un certain nombre de choses du régime. »
« Et puis [il y a] une deuxième dimension du point de vue politique générale, poursuit l’analyste : c’est toujours pratique d’avoir sous la main un otage. On ne sait pas de quoi l’avenir sera fait, peut-être qu’un jour on aura besoin d’obtenir quelque chose de la France. »
Échange de prisonniers
Anthropologue réputée, directrice de recherche au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po à Paris, Fariba Adelkhah avait été arrêtée en juin 2019 avec un autre chercheur français, son compagnon Roland Marchal. Ce dernier venait alors lui rendre visite. Condamné à cinq ans de prison, il a été libéré en mars dernier alors qu’était élargi simultanément en France un ingénieur iranien menacé d’extradition vers les États-Unis, Jalal Rohollahnejad.
La pratique d’échange de prisonniers est devenue commune. Le même scénario s’est produit il y a quelques mois avec l’Australie. Et Téhéran a proposé un échange de prisonniers avec Washington il y a quelques jours. En effet, une douzaine d’Iraniens sont détenus aux États-Unis et l’Iran détient des Américains et des Irano-américains.
Charges d’espionnage abandonnées
L’arrestation de la chercheuse, hospitalisée le 25 février à Téhéran, a été dénoncée par la France qui réclame sa libération, tout comme son comité de soutien à Paris.
L’Iran, qui ne reconnaît pas la double nationalité de Fariba Adelkhah, a abandonné les charges initiales d’espionnage contre la chercheuse. Son procès s’était ouvert le 3 mars devant la 15e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran. La deuxième audience a eu lieu le 19 mars selon son avocat.
« Vu qu’au moins deux personnes doivent être impliquées » dans l’accusation de « collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale », il se peut que la deuxième personne en question soit Roland Marchal, dont l’affaire n’a pas été classée en dépit de sa libération, a estimé Saïd Dehghan.
► À écouter : Roland Marchal libéré: «On espère aussi celle de Fariba pour des raisons humanitaires»
http://www.rfi.fr/fr/moyen-
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Iran: la France dénonce la «condamnation politique» de Fariba Adelkhah et demande sa libération (ministre des Affaires étrangères)
Publié le : 16/05/2020
La France réagit à la condamnation à cinq ans de prison prononcée samedi 16 mai contre Fariba Adelkhah en Iran. L’anthropologue franco-iranienne, arrêtée en juin 2019 et détenue à Téhéran, a été jugée coupable de «collusion en vue d’attenter à la sûreté nationale». Dans un communiqué, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, «condamne avec la plus grande fermeté» une peine qu’il estime «fondée sur aucun élément sérieux ou fait établi» et qui «revêt donc un caractère politique». «Les autorités françaises restent entièrement mobilisées pour obtenir des autorités iraniennes un accès consulaire à notre compatriote. Nous exhortons les autorités iraniennes à libérer immédiate Mme Adelkhah», précise le communiqué.