Sans blague….
Visiblement l’aspiration profonde à l’émancipation sociale, économique et politique du Peuple du Mali n’a jamais été une priorité pour la diplomatie française.
Pourrait-on en déduire aisément sans trop se tromper hélas.
La Souveraineté et la démocratie ne se bâtissent pas en marge et en excluant les populations littéralement prises en otage en Afrique noire francophone par des satrapies soutenues à bout de bras par Paris.
Cela doit changer après 60 ans d’indépendances fictives!
La menace et l’escalade djihadiste prospère sur la misère générée par la mal gouvernance chronique, combinée avec une illégitimité évidente de dirigeants crapuleux soutenus puis maintenus à bout de bras par une communauté internationale influencée par la France…
Ses dirigeants successifs le savent pertinemment et s’avèrent incapables de changer ce vieux logiciel françafricain, aboutissant au cocktail explosif à l’œuvre dans toute la sous-région d’Afrique noire francophone.
Dommage
JDE
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Après le coup d’Etat au Mali, la France redoute une nouvelle dégradation de la sécurité dans la région
Pour Paris, la priorité absolue est la lutte contre les groupuscules djihadistes dans la zone stratégique des « trois frontières » qui englobe le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Par Piotr Smolar
Après des mois de troubles, la catastrophe redoutée est survenue. Pour la France, le coup d’État militaire au Mali suscite la peur du vide politique et d’une tourmente sécuritaire accrue, dans un pays sans intégrité territoriale, au pouvoir central trop frêle. Dans un communiqué publié mardi 18 août, le ministère des affaires étrangères a exprimé son « inquiétude » devant la « mutinerie » engagée, condamnant « avec la plus grande fermeté cet événement grave ».
Emmanuel Macron s’est entretenu de la crise en cours avec plusieurs dirigeants de la région, notamment ses homologues nigérien Mahamadou Issoufou, ivoirien Alassane Ouattara et sénégalais Macky Sall. Une fois le coup d’Etat déclenché, le président français avait même réussi à joindre le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta (« IBK »), peu avant son arrestation. « Il s’agissait de lui indiquer que nous étions sur la même ligne que la Cedeao [Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest], à savoir le refus d’un coup d’Etat », explique une source diplomatique.
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A la demande de la France et du Niger, qui préside actuellement la Cedeao, le Conseil de sécurité de l’ONU devait se réunir en urgence, mercredi 19 août, pour examiner la situation au Mali. Le Quai d’Orsay précisait mardi que la France partageait la position de la Communauté, « qui appelle au maintien de l’ordre constitutionnel et exhorte les militaires à regagner sans délai leurs casernes ». Mais il faudra vite, pourtant, prendre contact avec les militaires, qui disent assurer une simple transition avant de nouvelles élections.
Pour la France, le Mali est à la fois un allié – inconstant et faible – dans la lutte contre les groupes djihadistes et un point d’ancrage important dans l’Afrique francophone. Sécurité et influence. Mais Paris vit dans une forme d’impuissance et d’énervement contenu depuis des années, constatant le marasme politique dans ce pays et l’incapacité du président malien à œuvrer à la réconciliation et à l’unité territoriale.
« Un président faible, sans vision »
« Depuis les élections législatives d’avril, tout le monde demandait à “IBK” de prendre des initiatives politiques, détaille une source diplomatique française. Il existe aujourd’hui une frustration partagée, notamment par nous. On sait ce qu’il faudrait faire, et ce n’est certainement pas un coup d’Etat militaire. »
A Paris, on estime qu’outre la démission indispensable de trente et un députés élus dans des conditions frauduleuses, « IBK » aurait dû accepter la mise à l’écart de son entourage familial. « Il cristallise la colère populaire, poursuit la source française. On l’a bien vu mardi soir à Bamako. il n’y a pas eu d’émeutes ou de manifestations, mais des pillages ciblés contre sa famille. » Cible privilégiée : Karim Keïta, l’un des fils du président, au train de vie grandiose.
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Les élections législatives ont été l’accélérateur puissant de la crise politique. Mais « IBK » n’a pas eu le courage ou la lucidité pour le percevoir à temps. « Il y avait depuis des années, dans la diplomatie française, un certain consensus pour reconnaître qu’“IBK” était un président faible, sans la vision et l’énergie pour gouverner un pays vivant toujours dans les séquelles de la crise de 2012, souligne Nicolas Normand, ancien ambassadeur français au Mali. Les problèmes de fond n’ont pas été réglés, auxquels s’est ajoutée la dégradation des services publics, de l’éducation et de l’électricité. Mais, en même temps, il y a eu une absence de critique publique par la France contre “IBK”, justifiée par la situation, car elle aurait été perçue comme de l’ingérence. »
Discours anti-Français
Pour la France, la priorité régionale absolue est la lutte contre l’islam radical et les groupuscules djihadistes. Emmanuel Macron a assumé sur ce plan l’héritage de son prédécesseur, François Hollande, qui avait décidé l’intervention française au Mali. Huit ans plus tard, celle-ci représente un investissement militaire, financier et politique considérable. Fin 2019, le bilan semblait bien sombre.
L’heure était grave après la mort de treize soldats français de l’opération « Barkhane », le 25 novembre 2019. Emmanuel Macron décidait alors de placer publiquement les chefs d’Etat de la région devant leurs responsabilités. Ils étaient suspectés de double langage et de manque d’engagement. Les autorités françaises voyaient notamment monter les discours anti-Français, comme à Bamako.
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Au Mali, il existe un ressentiment prenant racine dans l’intervention militaire de 2013. L’armée française avait permis au pays de reprendre possession de Tombouctou et de Gao, mais pas de Kidal, laissée aux forces du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), qui avait pris le relais du groupe salafiste Ansar Dine.
Le sommet du G5 Sahel à Pau, en janvier, a été un moment de remobilisation important dans la lutte contre les groupes islamistes. L’émergence d’une « coalition internationale pour le Sahel » devait notamment permettre, à terme, d’assurer le retour de l’Etat dans toutes les régions, aussi bien à Kidal que dans le nord du Burkina Faso. Tel était l’objectif ambitieux affiché. A la suite de cette rencontre, la France a augmenté les effectifs de « Barkhane » de 500 militaires, pour les porter à 5 100.
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Le 30 juin, lors d’un nouveau sommet du G5 Sahel, cette fois en Mauritanie, l’ambiance était plus empreinte de satisfaction. Quelques semaines plus tôt était intervenue l’élimination par les forces françaises d’Abdelmalek Droukdel, émir d’Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Le président Emmanuel Macron a assuré que les forces françaises et sahéliennes avaient réussi à « inverser » le rapport de forces dans la zone stratégique dite des « trois frontières » (Mali, Burkina Faso et Niger). C’est là qu’ont été concentrées les opérations contre les groupes affiliés à l’organisation Etat islamique. « La victoire est possible » au Sahel, a dit le chef de l’Etat.
Mais ce travail de longue haleine ne semble pas du tout conclu. Le 23 juillet, l’Elysée rendait hommage à la mort d’un soldat du 1er régiment de hussards parachutistes de Tarbes, tué lors de combats. Un engin explosif improvisé s’était déclenché au passage de son véhicule blindé. L’Elysée sait que le traitement exclusivement militaire de la crise dans le Sahel serait une entreprise sans fin. Or, le coup d’Etat à Bamako représente un nouveau contretemps, empêchant de conclure les fameuses avancées politiques nécessaires, en accompagnement. Du point de vue opérationnel, la lutte contre le djihadisme n’est pas impactée par les événements au Mali. Mais ce pays poursuit sa dérive.