Je me suis gardé depuis le lancement du processus de désignation des tout premiers conseillers régionaux dans notre pays, le Cameroun, d’épiloguer. Et pour cause: pour moi, et au regard du contexte politique et institutionnel de la mise en œuvre de cette réforme institutionnelle pourtant prévue par la constitution révisée depuis janvier 1996, elle n’allait pas changer grand chose dans les pratiques et mœurs politiques camerounaises.
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Ayant longtemps observé la gouvernance locale avec notamment les municipalités soumises à la tutelle de l’administration, où les élus locaux avec à leurs têtes des maires y compris dans les grandes villes telles Douala et Yaoundé anciennement dirigées par les délégués du gouvernement n’ont pas l’autonomie fonctionnelle ni la maîtrise des priorités de leurs cités, eh bien le fait de soumettre les délibérations du Conseil régional à la sanction du représentant de l’état-un fonctionnaire nommé à la légitimité populaire questionnable, m’est apparu du plus mauvais effet.
De fait je considère que le rôle économique, social et culturel dévolu par la loi aux conseils régionaux restera tout au plus théorique tant le centre nerveux de l’état qui reste Yaoundé est si peu préparé à céder véritablement des pouvoirs et ressources conséquents aux collectivités territoriales décentralisées. De fait, les personnes désignées à l’issue de la formalité électorale du 6 décembre 2020 sont pour moi davantage de rentiers, anciens et nouveaux, destinés destinés à élargir la base du système jacobin qui refuse obstinément de disparaître pour laisser la place, comme espéré, à une classe politique locale ayant le développement des territoires comme priorité.
Même le statut spécial des régions du Nord-ouest et du Sud-ouest marqué par l’institution d’une chambre des chefs me paraît être un placebo de la seconde chambre existant dans l’ancien “West Cameroon” du temps du système fédéral de glorieuse mémoire au Cameroun jusqu’en 1972. Sur ce point, avec 20 chefs traditionnels dans chacune des deux régions sans que l’on ne sache quelle sera l’étendue de leurs compétences/pouvoirs en matières législatives, on a perdu l’occasion de couper l’herbe sous les pieds des partisans de l’autonomisme anglophone.
La véritable réforme de l’état du Cameroun pour protéger l’unité de notre Nation dans la diversité qui la caractérise est encore à venir. Ce sera à n’en point douter le principal chantier du premier régime politique post-Biya. Ce dernier a, en tous points, montré sa détermination à ne pas partager le pouvoir donc les ressources pourtant collectives.
Par Alex Gustave Azebaze