Une présentatrice australienne de la chaîne chinoise anglophone CGTN a été officiellement arrêtée et accusée de « divulgation de secrets d’État à l’étranger », a annoncé Canberra, ce lundi 8 février, six mois après son placement en détention. Une accusation alors que les relations entre Pékin et Canberra sont au plus bas.
« Les autorités chinoises ont fait savoir que Mme Cheng a été arrêtée parce qu’elle était soupçonnée de fournir illégalement des secrets d’État à l’étranger », a indiqué, dans un communiqué, la ministre des Affaires étrangères australienne Marise Payne. Celle-ci explique avoir été informée le 5 février par les autorités chinoises de l’arrestation de Cheng Lei, qui est détenue sans aucune explication depuis août 2020.
Cheng Lei, c’est une voix et un visage familier des téléspectateurs du service anglophone de CGTN. Si le porte-parole de la diplomatie chinoise n’y fait pas allusion dans sa déclaration ce lundi, la journaliste australienne animait l’un des programmes phare de cette chaîne publique à destination de l’étranger, explique notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde.
Six mois que l’on n’ose plus murmurer son nom dans les couloirs de la télévision d’État, 6 mois que son profil a été effacé. Cette mise en demeure officielle ne faisant que confirmer ce que tout le monde devinait déjà : la journaliste a été interpellée par la sécurité d’État.
C’est la deuxième personnalité australienne après l’écrivain Yang Hengjun arrêté en janvier 2019, à être ainsi accusée d’espionnage. Le South China Morning Post rappelle que cette mère de deux jeunes enfants avait écrit un certain nombre de messages sur Facebook critiquant la gestion par le président chinois et Pékin de l’épidémie à Wuhan.
Tensions grandissantes
Cette arrestation intervient également dans un contexte très dégradé des relations Chine-Australie : commerce,
Peu de temps après l’arrestation de Cheng Lei, deux correspondants australiens à Pékin et à Shanghai ont fui le pays, après que les autorités chinoises ont tenté de les interroger sur des questions de sécurité nationale et notamment à propos de leur consœur et compatriote de la Télévision centrale de Chine.
Enfin, dernier élément de contexte, cette mise en demeure survient alors que les gouvernements étrangers sont préoccupés par ce que certains observateurs qualifient de « diplomatie des otages » et le fait que Pékin puisse retenir des ressortissants étrangers comme monnaie d’échange.
Deux Canadiens en Chine, Michael Kovrig et Michael Spavor ont été également arrêtés et détenus au secret après l’assignation à résidence de l’héritière du groupe Huawei à Vancouver suite à une demande d’extradition américaine en 2018. À ces inquiétudes, Wang Wembin, le porte parole de la diplomatie chinoise, a répondu que la Chine était un pays de droit et que « l’Australie devrait respecter la souveraineté judiciaire de la Chine et cesser d’interférer de quelque manière que ce soit dans des affaires légales. »
« Règles internationales »
Selon la ministre des Affaires étrangères australienne Marise Payne, des diplomates australiens ont rendu visite à la présentatrice six fois depuis son arrestation, la dernière fois remonte au 27 janvier. « Le gouvernement australien a régulièrement fait part, au plus haut niveau, de ses graves inquiétudes concernant la détention de Mme Cheng, notamment en ce qui concerne son bien-être et ses conditions de détention », a souligné la ministre. « Nous comptons sur le fait que les principes fondamentaux de justice, d’équité procédurale et de traitement humain soient respectées, conformément aux règles internationales », a-t-elle encore dit.
Texte par : RFI