Cette nouvelle est accueillie avec indifférence, étonnement ou amusement par certains, et avec une jubilation revancharde par les homophobes de tous bords.
Shakiro, un jeune travesti très suivi sur le réseau social Facebook est un personnage, somme toutes, attachant par son apparente naïveté et son ingénuité qui nous laissent penser qu’il ne ferait pas de mal à une mouche, tant et si bien qu’on lui donnerait le bon Dieu sans confession. Certains affirment qu’il a publié plusieurs photos et des vidéos à caractère ouvertement homosexuel sur la toile, lesquelles lui ont valu d’être arrêté et ensuite relaxé à plusieurs reprises par le passé. Dans une interview accordée à l’Agence France Presse, Maître Alice Nkom, qui défend les droits de la communauté LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transexuels) au Cameroun note que les arrestations des membres de cette communauté, naguère fréquentes, avaient sensiblement baissé ces dernières années, mais déplore le fait qu’elles soient réparties à la hausse depuis peu ; d’où les interrogations sur les raisons véritables de ce regain répressif à l’encontre de ladite communauté LGBT. Chacun y va de son interprétation des faits, ce qui laisse présager de l’ouverture d’un véritable débat autour du thème de l’homosexualité et autres pratiques sexuelles marginales au Cameroun.
LE DÉBAT SUR L’HOMOSEXUALITÉ.
Le débat oppose, d’une part les homophobes, ceux qui pensent que cette pratique est contre-nature, qu’elle est une tare honteuse, une déviance sexuelle, un crime passible d’une sanction pénale ; à ceux-là s’ajoutent les chrétiens et les musulmans, qui estiment que l’homosexualité est un péché mortel, une abomination ; d’autre part ceux qui pensent que l’homosexualité est un penchant naturel ou qui découle du libre choix de chacun, donc non pénalisable. Au Cameroun, l’homosexualité est un délit puni par un emprisonnement ferme de 6 mois à 5 ans, et d’une amende minimum de 200.000 francs CFA. Les raisons pour lesquelles l’on pratique l’homosexualité sont diverses.
LES CAUSES DE L’HOMOSEXUALITÉ.
1) – L’homosexualité considérée comme une orientation sexuelle naturelle.
Les tenants de cette thèse estiment que nul ne devrait être puni pour son orientation sexuelle, au nom de la liberté de chaque être humain à disposer de sa vie et de son corps comme bon lui semble, à condition de ne pas porter préjudice à autrui. Cette liberté est reconnue et établie par des Chartes, des Traités des organisations internationales de protection des droits humains, ainsi des dispositions légales nationales allant dans ce sens. Pour cette tendance, Shakiro n’a commis aucun délit et devrait être libéré sans délai.
2) – L’homosexualité circonstancielle ou de survie économique.
Elle est imposée aux nécessiteux, victimes des déséquilibres, d’abus et d’injustices sociaux. Il s’agit de personnes, pas forcément homosexuelles à la base, rendues vulnérables par une extrême paupérisation, qui se voient obligées, pour survivre, d”arrêter la table et de serrer les dents”, comme on dit vulgairement ici, ce qui signifie, se soumettre à l’homosexualité en échange d’une bouchée de pain ou d’une poignée de billets de banque. Si tel est le cas de Shakiro, il devrait être considéré, non pas comme un criminel, mais plutôt comme la victime d’un système cynique et inique. Dans ce cas, les véritables coupables sont ceux qui créent ( parfois à dessein, pour les besoins de la cause) les conditions délétères qui obligent les victimes à se soumettre à l’homosexualité. Dans ce cas, Shakiro, qui est une victime, devrait être remis en liberté instamment.
3) – L’homosexualité comme pratique mystico-sectaire.
Cette forme d’homosexualité se pratique comme un rite d’initiation dans les sociétés secrètes, y compris traditionnelles camerounaises, et dans les sectes ésotériques. Elle est acceptée par les adeptes et est couverte par le sceau du secret absolu, et de ce fait, elle échappe à la sanction.
Ceci nous laisse comprendre que pour être sanctionnée, l’homosexualité doit se pratiquer au grand jour, être constatée avec preuves matérielles à l’appui. La question se pose : existe-t-il des preuves patentes et avérées de l’homosexualité de Shakiro, où se base-t-on seulement sur son aspect vestimentaire et comportemental féminin pour déduire qu’il est homosexuel ? Si tel est le cas, nous sommes devant une situation de stigmatisation inacceptable, qui ouvre la voie à l’injustice et à l’arbitraire ; ce serait un dérapage dangereux, pareil à l’inquisition religieuse qui sévissait en Europe au Moyen-Âge. Auquel cas, Skakiro victime de l’injustice et de l’arbitraire, devrait recouvrer la liberté dans les meilleurs délais.
L’on relève par ailleurs que la loi réprime l’homosexualité de manière sélective, donc inefficace ; elle sanctionne les comportements ostentatoires et publics, tandis que les pratiques ésotériques, les plus nocives pour les individus et la société prospèrent dans l’impunité totale. La loi sanctionne surtout les sous-fifres et les victimes, tandis que les vrais prédateurs tapis dans l’ombre passent très souvent à travers les mailles de La Justice.
Ceci nous amène à penser que la lutte contre l’homosexualité n’est pas un problème d’Etat que l’on pourrait régler par la répression légale. A mon humble avis, il s’agit avant tout d’un problème d’éducation de base, au sein de la cellule familiale, par l’inculquation de valeurs et de comportements idoines dès le bas âge.
Il en est de l’homosexualité que de la prostitution ou de la pédophilie : plutôt que de mettre l’accent sur la répression, qui brille par son inefficacité, il serait judicieux de se pencher sur le volet “Éducation” aux valeurs sociales, morales éthiques et déontologiques.