Publiée par Mohamadou Houmfa sur Lundi 26 avril 2021
Qui est Thierry Michel Atangana?
Michel Thierry ATANGANA ABEGA est né le 14 juin 1964 à Yaoundé. Il est administrateur financier formé en France.
1964: naissance à Yaoundé au Cameroun d’un père Préfet et d’une mère greffière en chef au Tribunal de Grande Instance du Mfoundi à Yaoundé.
1988: acquisition de la nationalité française par mariage, depuis son unique nationalité (le Cameroun ne reconnaissant pas la double nationalité et lui ayant délivré pour ce faire une carte de résident qui court jusqu’en 2014), y compris dans le cadre de ses activités dans ce pays. Installé avant son départ au Cameroun au numéro 37 de la rue des Thermopyles à Paris, Thierry Michel ATANGANA est père de deux garçons qu’il n’a pas vu grandir,
1992: Retour au Cameroun en 1992 dans le cadre de la mise sur pied d’un comité de pilotage franco-camerounais chargé (entre-autres) de trouver des financements privés nécessaires à la construction d’axes autoroutiers.
1994: Michel Thierry ATANGANA est nommé à la tête du Comité de Pilotage et de Suivi des axes routiers Yaoundé-Kribi et Ayos-Bertoua (COPISUR) par arrêté n° 142/CAB/PR du 08 juillet 1994 du Président de la République du Cameroun Paul BIYA. Il en prend la présidence, cumulativement avec une fonction de chargé de mission à la Présidence de la République, plus exactement de chargé de mission auprès du Secrétaire Général à la Présidence de la République (sorte de Vice-Président de la République), et à ce titre le représentant désigné par le gouvernement du Cameroun au sein du comité de pilotage.
12 mai1997: Michel Thierry ATANGANA est interpellé, arrêté par des éléments des forces spéciales camerounaises, et détenu à la Police Judiciaire de Yaoundé (garde à vue administrative). Il n’aura été ni convoqué, ni informé sur les motifs de son arrestation, encore moins notifié sur les raisons de son maintien en détention.
16 mai 1997: Saisine du juge des libertés d’une demande en libération immédiate. C’est à cette occasion que Michel Thierry ATANGANA est informé de l’existence d’un arrêté préfectoral qui l’accuse de «grand banditisme»
Du 17 au 30 juin 1997: Poursuite des enquêtes préliminaires prescrites «urgemment» à Luc LOE, ancien Délégué Général à la Sûreté Nationale (chef de la Police camerounaise) par AMADOU ALI, Secrétaire Général de la Présidence de la République, sur la gestion du COPISUPR par Michel Thierry ATANGANA. Au terme de ces enquêtes, le Commissaire Divisionnaire Pius ETUGE, Directeur de la Police Judiciaire, rend un rapport selon lequel aucune charge ne peut être retenue contre Thierry Michel ATANGANA.
01 juillet 1997: Le Commissaire Principal Dahirou HAYATOU, Sous Directeur des Enquêtes Economiques et Financières à la Police Judiciaire de Yaoundé est chargé de produire un rapport contradictoire. La décision est prise de faire comparaître Michel Thierry ATANGANA devant le Magistrat Instructeur, Procureur de la République près la Cour d’Appel de Yaoundé.
03 juillet 1997: Ouverture d’une information judiciaire par Jean-Pierre MVONDO EVEZO’O, Magistrat instructeur, Procureur de la République. Requalification des motifs de l’arrestation pour «grand banditisme» en «détournement, tentative de détournement de deniers publics, et trafic d’influence en coaction ». Ainsi 52 jours après son interpellation et sur la base du rapport accablant du Commissaire Principal Dahirou HAYATOU, Michel Thierry ATANGANA est placé sous mandat de dépôt et déféré le même jour à la prison centrale de Yaoundé Kondengui.
31 juillet 1997: La garde à vue administrative « prolongée » à la Prison Centrale de Yaoundé Kodengui est transformée en garde à vue judiciaire avec mandat de dépôt par le magistrat instructeur Jean-Pierre MVONDO EVEZO’O. Michel Thierry ATANGANA est transféré au Secrétariat d’État à la Défense (SED), siège de la Gendarmerie Nationale et des Services de Renseignements du Cameroun. Il est enfermé dans une cellule spéciale connue sous l’appellation dans le jargon militaire de «fourgon» ou «coffre».
Juillet 1997: Arrestation du Professeur Titus EDZOA ancien Médecin personnel du Président Paul BIYA, devenu Secrétaire Général à la Présidence de la République (l’interlocuteur désigné de Thierry Michel ATANGANA au sein du Comité de Pilotage et de Suivi des axes routiers Yaoundé-Kribi et Ayos-Bertoua (COPISUR). Monsieur EDZOA avait démissionné avec fracas du Gouvernement du Cameroun le 20 avril 1997 (fait rarissime dans ce pays), et s’était déclaré immédiatement candidat aux élections présidentielles d’octobre de la même année. C’est la principale source des ennuis judiciaires qui accablent Thierry Michel ATANGANA depuis 1997.
03 octobre 1997: Michel Thierry ATANGANA et Titus EDZOA sont condamnés à quinze (15) années de prison par le jugement n° 04/Crim du 03.10.1997 du Tribunal de Grande Instance du Mfoundi, à l’issue d’un procès lapidaire à 4 heures du matin; procès au cours duquel, ils n’avaient eu droit à la moindre défense. Ils sont accusés de « détournement de deniers publics, tentative de détournement et trafic d’influence en coaction».
27 avril 1999: Arrêt confirmatif n° 79/Crim du 27.04.1999 de la Cour Suprême et pourvoi en cassation.
23 octobre 2003: Audience de la Cour Suprême. Rejet par la Cour Suprême du pourvoi en cassation.
Décembre 2004: Rapport d’expertise financière réalisée 7 (sept) ans après la mise en détention préventive par NJOCK Luc Paul, Inspecteur d’État. Expertise; en l’absence d’éléments comptables.
23 octobre2008: Fin de l’information judiciaire menée pendant 12 ans par Pascal MAGNAGUEMABE, Juge au Tribunal de Grande Instance du Mfoundi. Une ordonnance de non-lieu total sur toutes les charges qui pesaient sur Michel Thierry ATANGANA est rendue à cette occasion.
14 novembre 2008: Le Ministère Public interjette appel. Le Procès Verbal de réception et une copie de la requête ne sont pas notifiés à Michel Thierry ATANGANA. Son avocat est dans l’obligation d’aller décharger la copie de cette requête au greffe de la Cour, en violation de l’article 274 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale.
01 décembre 2008: Par l’entremise de son avocat, Michel Thierry ATANGANA est informé à 15 heures qu’il doit comparaître le lendemain 02 décembre 2008 à 7h30 min. Soit moins de 17 heures plus tard, en violation de l’article 52 alinéa 1 du Code de Procédure Pénale. Il faut rappeler que Michel Thierry ATANGANA est détenu sans titre de détention depuis 2006 dans les sous-sols du Secrétariat d’État à la Défense du Cameroun qui, jusqu’à une date récente, n’était pas officiellement répertorié comme une prison par les autorités et la législation camerounaise.
03 février 2009: Infirmation de l’ordonnance de non-lieu par Arrêt n°002/CI/2009 de la Chambre de Contrôle de l’Instruction de la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé, en violation de l’article 275 alinéa 1 du Code de Procédure Pénaleet renvoi de l’affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé. En rendant son verdict ce 03 février 2009, la Chambre de Contrôle s’est impartie d’un délai de 81 jours (au lieu de 30 jours), sans avoir jamais entendu l’exposant. 27 octobre 2009: Ouverture du procès. Renvoi au 11 novembre 2009 sur le motif de la nécessité d’un retour de la citation de l’État du Cameroun.
Depuis 2010: Bruno GAIN précédent ambassadeur de France au Cameroun s’investit personnellement dans cette affaire et permet le rétablissement de l’assistance et des visites consulaires à Michel Thierry ATANGANA après dix ans de silence de la France.
07 octobre 2010: Première visite consulaire d’un responsable de l’ambassade de France au Cameroun à Michel Thierry ATANGANA au Secrétariat d’État à la Défense (SED), notamment afin de s’enquérir de ses conditions de détention et de son état de santé.
21 mars 2012: Fin des débats sur tous les trois (03) chefs d’accusation: détournement, tentative de détournement et trafic d’influence ; pour lesquels Thierry Michel ATANGANA et son compagnon d’infortune Titus EDZOA avaient déjà été condamnés à 15 ans d’emprisonnement le 03 octobre 1997. Les principaux accusateurs dont les auditions ont conduit à l’arrestation et la condamnation de Michel Thierry ATANGANA en 1997 se sont ou dédits devant le Tribunal, ou ont refusé de se présenter au Tribunal, ou sont en cavale en Europe. 19 juillet 2012: Dans un communiqué de presse, le Procureur Général près la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé informe le public que «La nouvelle formation collégiale poursuivra sans désemparer l’instruction de cette affaire, en application de l’article 10 alinéa 2 de la loi n° 2012/011 du 16 juillet 2012 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n° 2011/028 du 14 décembre 2011 portant création d’un Tribunal Criminel Spécial».
Réaction du Quai d’Orsay par son porte-parole «La France a pris note du report du procès et exprime le souhait que la procédure judiciaire puisse aboutir dans les meilleurs délais».
04 octobre 2012: Au terme d’une audience qui a duré 5 heures de temps, Michel Thierry ATANGANA est condamné à 20 ans d’emprisonnement, 05 ans de contrainte par corps, ses comptes toujours bloqués…sur les mêmes faits que le 03 octobre 1997. Les dénaturations flagrantes des faits et les violations graves de la loi Camerounaise sont infinies.
19 novembre 2012: pourvoi formé par les Conseils de Thierry Michel ATANGANA devant la Cour Suprême du Cameroun
31 mai 2013: entretien exclusif accordé à Rfi, France 24 et TV5 par le Président FrançaisFrançois Hollande: «Au Cameroun, j’ai dit au président Biya que bien sûr dans le respect de l’indépendance de la justice camerounaise, tout devait être fait pour qu’il puisse y avoir une solution qui soit apportée. Ça fait trop longtemps, 20 ans, que ça dure et c’est inadmissible».
30 janvier 2013: promesse faîte sur le perron de l’Élysée par le Président de la République du Cameroun Paul BIYA à l’occasion de sa visite de travail en France: «Notre souci c’est qu’il y ait le maximum de gens libres, mais je ne veux pas contrarier les décisions de justice.»
13-22 novembre 2013: Le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies réunit en session dans le cadre du Groupe de travail sur la détention arbitraire, lors de la soixante huitième session, adopte un avis dans lequel il recommande explicitement au Gouvernement Camerounais:
- De procéder à la libération immédiate de M. Atangana
- D’enquêter sur les faits et de sanctionner les personnes responsables de la privation de liberté de M. Atangana
- Puis le Conseil demande au Gouvernement Camerounais de verser une indemnisation réparatoire des préjudices causés pour sa privation de liberté depuis le 12 mai 1997
- Monsieur Thierry Michel Atangana ayant été «incarcéré au Cameroun dans des conditions inhumaines, et jugé deux fois pour les mêmes faits.
17 décembre 2013: rejet du pourvoi de Thierry Michel Atangana par la Cour Suprême du Cameroun, l’infortuné se retrouve ainsi potentiellement condamné à croupir dans sa cellule de 7m2 du Secrétariat d’État à la Défense (SED)jusqu’à 2037.
Joël Didier ENGO
Comité de soutien à Michel ATANGANA