Coups d’État sans fin et société civile : le cas du Gabon
Albert Ondo Ossa élu Président de la République aurait logiquement mérité d’être investi dans ses fonctions
Le Professeur Albert Ondo Ossa était en effet donné largement vainqueur dans toutes les estimations sur l’élection présidentielle au Gabon, avant la survenance du coup d’Etat militaire qui a renversé le dictateur perdant Ali Bongo Ondimba mercredi 30 août 2023…
C’est certainement la raison principale pour laquelle ce dernier a suspendu tous les réseaux de communication de ce pays et instauré un couvre-feu, afin de pouvoir falsifier sous la menace les résultats sortis des urnes, puis s’autoproclamer une fois de trop Président illégitime du Gabon.
Il faut désormais militer en faveur d’un rétablissement de l’ordre constitutionnel puis d’un pouvoir civil légitime au Gabon, conforme à la volonté clairement exprimée par l’écrasante majorité des Gabonais le samedi 26 août 2023.
L’investiture officielle de Albert Ondo Ossa aurait donc dû être la première étape de la transition annoncée vers le rétablissement des institutions démocratiques au Gabon.
L’urgence de sortir du culte de la personnalité
Car si vous avez réellement soutenu Jean Ping parce vous souhaitiez comme lui l’alternance démocratique au Gabon, vous ne devriez avoir aucune difficulté à soutenir le Professeur Ondo Ossa, exactement pour les mêmes raisons : libérer enfin le Gabon de l’emprise d’une dictature françafricaine et familiale des Bongo vieille de 56 ans.
Le reste relève du manque criard de culture démocratique, symptomatique de personnes qui malgré elles ont été formatées dans un culte des Hommes forts (de préférence en treillis militaire ces derniers temps) sous d’interminables dictatures, et n’envisagent l’alternance ou la transition uniquement pour permettre l’accès au pouvoir de celle ou celui qui a leur préférence.
Dans cette Afrique en reconfiguration géopolitique nous devons absolument transcender les considérations personnelles quand nous menons ce combat noble pour l’alternance ou la transition démocratique sur le continent.
En résumé, dans cette lutte de Sisyphe entre démocratie et autocratie sur le continent, le Gabon est le huitième pays africain à connaître un coup d’État. Certains pourraient se demander combien de preuves sont nécessaires avant d’admettre à tort que les Africains ne sont tout simplement pas capables de quoi que ce soit qui se rapproche d’un régime démocratique?
Par conséquent, sans l’intervention européenne, le continent tout entier se serait déjà divisé en milliers de tribus. Ainsi, de manière atavique, la démocratie ne conviendrait tout simplement pas à l’Afrique.
C’est tout à fait faux.
Car, au CL2P/ICL2P, nous sommes d’accord avec le président élu Ondo Ossa sur le fait que la famille du président récemment déchu Ali Bongo a organisé son retrait du pouvoir afin de conserver son contrôle sur ce pays riche en pétrole d’Afrique centrale. Sa sœur Pascaline Bongo est notamment régulièrement pointée d’un doigts accusateur par les observateurs avisés.
La junte qui a renversé le président gabonais mercredi, juste après qu’il ait été déclaré vainqueur des élections, ne serait pas ainsi livrée à un coup d’État mais plutôt à une « révolution de palais » afin de poursuivre le règne de sa famille, car au Gabon « un Bongo peut en cacher un autre ».
Tout le monde sait en effet que les autocrates africains comme Ali Bongo ne peuvent pas remporter des élections justes et équitables.
Aussi dès le début, la légitimité et la position politique de M. Bongo ont été minées par le déroulement opaque des élections successives qui l’ont porté au pouvoir depuis 2009. Beaucoup d’observateurs pensaient qu’André Mba Obame, son principal rival électoral, était probablement le véritable vainqueur en 2009.
Et lorsque M. Bongo s’est présenté aux élections en 2016, au terme d’une course serrée contre l’ancien ministre des Affaires étrangères Jean Ping, il n’a remporté qu’une victoire serrée lorsque les résultats officiels de la région du Haut Ogooué, fief politique de la famille Bongo, sont arrivés nuitamment, enregistrant un nombre incroyablement élevé de voix pour lui (frôlant les 100%). Pourtant, les registres des bureaux de vote concernant ces prétendus résultats ont été détruits avant même de pouvoir être vérifiés.
Lors des dernières élections, M. Bongo a été déclaré vainqueur à 03heurs du matin par un score de 64% des voix. Il n’a autorisé aucun observateur international à surveiller le scrutin, puis a coupé Internet et déclaré la loi martiale. L’opposition n’a eu d’autre choix que de rejeter le résultat comme étant frauduleux.
Les observateurs politiques en Afrique ne doivent jamais oublier qu’il existe sur le continent une société civile forte qui lutte courageusement – souvent contre vents et marées – contre les dictatures et obtient des résultats positifs! Cette histoire selon laquelle la démocratie n’est tout simplement pas adaptée à l’Afrique est une autre propagande développée par une élite civile et militaire prédatrice qui tente de s’accrocher au pouvoir par tous les moyens possibles !
En effet, cette société civile forte qui lutte contre une série de problèmes tels que : la rareté des emplois et même des opportunités économiques informelles pour les diplômés et les moins instruits, les niveaux élevés de corruption et les privilèges concentrés par les nouvelles élites, ainsi que le ressentiment face à l’influence persistante de la France dans les nombreux pays où elle est l’ancienne puissance coloniale.
À cela s’ajoute un profond ressentiment face à la manière dont de nombreux dirigeants civils manipulent les processus électoraux ou le régime constitutionnel pour prolonger indéfiniment leur emprise sur le pouvoir. La suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels – après des amendements controversés des constitution, etc…
Cette idée selon laquelle les Africains ordinaires sont de simples agents de l’État doit cesser!
La démocratie est la fierté et la dignité de ces Africains. Il est temps que les questions de respect, de dignité, d’égalité et d’équité soient reconnues par tous sur le continent afin que ces Africains disposent des outils adaptés dont ils ont cruellement besoin pour construire un avenir prospère.
L’Institut du Comité de Libération des Prisonniers Politiques – ICL2P / CL2P
http://www.cl2p.org/
English version
Endless Coups and Civil Society: The case of Gabon
Albert Ondo Ossa elected President of the Republic deserved to be invested in his functions
Professor Albert Ondo Ossa was indeed given a clear winner in all estimates of the presidential election in Gabon, before the occurrence of the military coup which overthrew the losing dictator Ali Bongo Ondimba on Wednesday August 30, 2023…
This is certainly the main reason why the latter suspended all communication networks in this country and instituted a curfew, in order to be able to falsify the results of the ballot boxes under threat, then proclaim himself once for too many times an illegitimate President of Gabon.
It is now necessary to campaign for the restoration of constitutional order and then of a legitimate civil power in Gabon, in accordance with the will clearly expressed by the overwhelming majority of Gabonese on Saturday August 26, 2023.
The official investiture of Albert Ondo Ossa must be the first step in the announced transition towards the restoration of democratic institutions in Gabon.
The urgency to get out of the cult of personality
Because if you really supported Jean Ping because, like him, you wanted democratic change in Gabon, you should have no difficulty in supporting Professor Ondo Ossa, for exactly the same reasons: finally freeing Gabon from the grip of a 56-year-old French and family Bongo dictatorship.
The rest is due to the glaring lack of democratic culture, symptomatic of people who despite themselves have been formatted in a cult of strong men under interminable dictatorships, and only consider alternation or transition to allow access to the power of whoever they prefer.
In this Africa in geopolitical reconfiguration, we must absolutely transcend personal considerations when we lead this noble fight for alternative or democratic transition on the continent.
In short, in this Sisyphean struggle between democracy and autocracy on the continent, this is the eighth African country to devolve into a coup. Some might wonder how much evidence is necessary before we admit that Africans simply aren’t capable of anything approaching democratic rule? Therefore, without European intervention, the whole continent would already have dissolved back into thousands of tribes. Thus, atavistically, democracy just does not fit Africa.
This is so wrong because, at the CL2P/ICL2P, we agree with president elect Ondo Ossa that the family of the recently ousted president engineered his removal from power in order to retain their control in the oil-rich Central African nation.
the junta who ousted Gabon’s president on Wednesday, just after he had been declared the winner in the election, did not engage in a coup but rather a “palace revolution” in order to continue his family’s reign.
Everybody knows that, African autocrats such as, Ali Bongo cannot win a fair and square election.
Thus, from the outset Mr. Bongo’s legitimacy and political standing was undermined by the opaque conduct of the election that brought him to power in 2009. Many people thought that André Mba Obame, his main electoral rival, had probably been the real winner.
And when he stood for re-election in 2016, in a tight race against former foreign minister Jean Ping, he only clinched a narrow victory when official results from Haut Ogooué region, the Bongo family’s political fiefdom, came in, recording an unbelievably huge number of votes for him. Yet the polling station records of these supposed votes were destroyed before they could be checked.
In the latest election, Mr. Bongo was declared the winner with 64% of the vote. He did not allow any international observers to monitor the poll, then shut down the internet and declared martial law. The opposition had no choice but to reject the result as fraudulent.
Political observers in Africa must never forget that there is a strong civil society on the continent that is fighting against all odds and achieving positive results! This story that democracy is simply not suitable for Africa is another propaganda developed by a predatory civilian and military elite that tries to cling to power by any means possible!
Indeed, this strong civil society which struggles against a series of problems such as: the scarcity of jobs and even informal economic opportunities for the graduates and the less educated, the high levels of corruption and perceived privileges among the young. the elite, as well as resentment at France’s lingering influence in the many countries where it is the former colonial power.
This is coupled with a deep resentment at the way many civilian rulers manipulate electoral processes or constitutional rule to prolong their hold on power. The scrapping of presidential term limits – after controversial amendments to constitutions
This idea that ordinary Africans are simply agents of the state must stop! Democracy is the pride and dignity of these Africans, it is about time that issues of respect, dignity, equality and equity gets recognized by all on the continent so that these Africans get the tools they need to build a prosperous future.
The Committee For The Release of Political Prisoners Institute – ICL2P / CL2P
http://www.cl2p.org/