Au Cameroun “protéger nos forêts est notre première urgence climatique”…
Une urgence dans ce pays où la déforestation s’apparente à un véritable crime contre l’Humanité, car commis par des personnalités du sérail politique ou des individus qui leur sont proches.
Il a été plus aisé pour le Président Paul BIYA de publier une tribune dans le quotidien Le monde le 31 novembre, appelant notamment à «un vrai plan de financement des pays industrialisés».
Mais ses concitoyens attendent d’abord de lui l’arrêt de l’exploitation anarchique de la forêt primaire camerounaise avec son lot d’expropriations des terres par des entreprises apparentées notamment à son fils Frank BIYA, et qui contraignent nombre de villageois et de paysans Camerounais à l’errance, l’exode rural, la mendicité, et parfois la mort dans le dénuement complet.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques au Cameroun (CL2P)
Gestion des forêts :Quand la corruption dévaste les forêts
En plus de ce fléau, la mauvaise application des textes en matière de gestion forestière contribuent à faire reculer cet espace vert.
Le cas de la Côte-d’Ivoire est le plus frappant. « Il n’y a plus de forêt en Côte-d’Ivoire. 400 000m3 de bois sont exploités chaque année. Pendant la crise et durant cinq ans, 186 milliards Fcfa de perte ont été enregistrés suite aux fraudes dans la filière bois », note Youssous Doumbia. Pire encore, révèle ce responsable de l’Observatoire ivoirienne des ressources naturelles (Oi-Ren), « la superficie des forêts en Cote d’Ivoire est passée de 16 millions d’hectares au moment où nous accédions à l’indépendance à 2 millions d’hectares de nos jours ».
Propriété privée dévastée après le passage de la tempête de 1999.
La situation de la corruption en milieu forestier n’est guère plus réjouissante au Cameroun où la forêt couvre 30% de la superficie du pays soit, environ 21 millions d’hectares dont 5 millions sont des forêts encore vierges. Cependant, « le Cameroun perd entre 12 et 15 milliards Fcfa de recette forestière chaque année du fait de la corruption et de l’exploitation illégale des forêts », informe Victor Amougou.
Dans les autres pays africains, la corruption se porte tout aussi bien dans le secteur forestier. Tenez par exemple : « En République démocratique du Congo, il n’existe pas de chiffres exacts sur la quantité de bois exploitée, parce que ces chiffres varient d’une institution à une autre », note Jean Marie Nkanda de la plate forme Réseau des ressources naturelles. En République centrafricaine (RCA) la guerre a contribué à la délivrance abusive des permis d’exploitation des forêts. Au Congo, bien que le secteur forestier soit le 2ème pourvoyeur du Pib, c’est le 4ème secteur le plus corrompu. Au cours de la conférence donnée par l’ong Forêts et développement rural (Foder), vendredi 11 décembre 2015, l’on apprendra par ailleurs que la corruption a légèrement régressé dans le secteur forestier au Cameroun. D’après une étude menée en 2014 par le Foder, « l’indice de perception de l’intensité de la corruption au Cameroun en 2014 est de 5,13/10 contre 6,44/10. Soit une amélioration de 1,31% ».
Pourtant, malgré ce léger recul, beaucoup reste à faire. Les responsables des ONG et organisations qui œuvrent pour la protection des forêts dénoncent en plus de la corruption qui gangrène le secteur de l’exploitation du bois et sur toute la chaine jusqu’à l’exportation ; la délivrance abusive des permis d’exploitation forestière ; la fraude, le favoritisme ; la faiblesse du cadre juridique ; l’inapplicabilité des textes ; le sous-effectif des agents des forêts. « Et tout cela ne permet pas de maîtriser la quantité de bois coupé et ne permet pas de maîtriser l’impact de la déforestation sur l’écosystème », déplore Vincent Agnimbat du Congo. Du côté des ong, les actions menées tardent à avoir les résultats escomptés, mais, « il ne faut pas baisser les bras », s’accordent-ils à dire.
« Nous menons des actions d’information et de sensibilisation des communautés villageoises et même des agents des ministères des Forêts. Il faut que des textes plus contraignants soient adoptés à l’encontre des exploitants des forêts », note Jean Marie Nkanda. Et du côté des communautés villageoises, les riverains attendent toujours les retombés de l’exploitation de ces forêts. « Depuis 2009, nous n’avons vu aucune réalisation ici. La société Fipcam a exploité après la société Pallisco et nous ne savons même pas combien Fipcam reversait comme taxe et qu’est ce que les communautés devraient percevoir. Depuis deux ans, c’est la société Sofhony, qui exploite, mais pas une trace de réalisation », s’indignait Aloys Mempouho, membre du comité riverain de Lehe-Pouho, une localité située dans l’arrondissement de Messamena, département du Haut-Nyong, région de l’Est.
Par Blaise Djouokep, Mutations