Loin de moi toute tentation d’encourager ou d’innocenter des “pilleurs” de la fortune publique au Cameroun, parce qu’ils seraient “français” et voudraient « échapper (à ce titre) à la Justice de leur pays d’origine . Cela n’a jamais été mon propos et ne le sera pas, y compris dans la déferlante des procès kafkaïens de l’« Opération ÉPERVIER » où l’accusation se façonne généralement dans les petits cercles alimentaires autour du dieu Paul BIYA; laissant aux juges à leur solde uniquement le soin d’exécuter les ordres (bien) reçus.
Et heureusement d’ailleurs que dans le dossier querellé – celui de l’affaire dite Lydienne Eyoum au Cameroun – la justiciable Eyoum (à l’instar de Thierry Michel Atangana avant elle) peut se prévaloir de sa citoyenneté française, et espérer ainsi qu’un jour ses droits les plus élémentaires puissent être (enfin) respectés. Car le sort du simple justifiable camerounais est loin d’être enviable, même quand il a appartenu à ce sérail politique où il a dû faire allégeance à la tyrannie qui prévaut dans ce pays depuis 32 ans. C’est la principale raison d’être du Comité de Libération des Prisonniers Politiques au Cameroun (CL2P) que nous avons mis sur pied dès le 03 mai dernier : empêcher que ne puisse être oubliées ou abandonnées (toutes) les victimes (camerounaises ou non) de l’arbitraire judiciaire et carcéral dans ce pays.
J’invite ainsi chacun(e) à observer comment de hautes personnalités de la république du Cameroun, notamment au plus haut niveau de son appareil de l’État, se sont toutes successivement couchées devant les injonctions du représentant local de la filiale de la banque française “Société Générale” dans l’affaire Lydienne Eyoum . Elle ou il comprendra aisément pourquoi la citoyenneté française peut devenir l’unique ou la meilleure bouée de sauvetage à la portée d’un(e) justiciable confrontée – comme l’est Lydienne Eyoum – à l’inquisition d’une véritable association de malfaiteurs de haut vol.
Et pourquoi le lui reprocher, en s’en prenant systématiquement à la France, alors qu’elle veille à l’intégrité de sa ressortissante ?
Précisément dans ce dossier relatif à la liquidation de l’ancien Office Camerounais de Commercialisation des Produits de Base (ONCPB), dans lequel d’autres « pilleurs » (tout aussi français) n’ont curieusement jamais été inquiétés par le même Tribunal Criminel Spécial (TCS) ; ou pire encore, ont continué à « piller » la fortune publique par des montages financiers les plus scabreux et autres marchés fictifs. Contrairement à Lydienne Yen Eyoum, ces (autres) « français » (anonymes) jouissent eux d’une impunité réelle au Cameroun; liée soit à leurs mandats politiques (obtenus souvent par achat de voix et des consciences), soit à leur proximité établie avec certains barons influents de la dictature en place au Cameroun. Il s’agit ici d’une double immunité.
Dès lors considérer que toute personne – dès lors qu’elle serait un(e) ressortissante du Cameroun – devrait se résigner à la sauvagerie organisée et institutionnalisée poliment appelée « Justice » dans ce pays…participe en réalité d’une vaste imposture morale. Parce que précisément dans l’état de terreur qui règne au Cameroun depuis 32 ans, nombreux sont celles et ceux qui ont entériné qu’ils ne peuvent et ne pourront avoir leur salut que par la protection que pourrait leur assurer une nationalité étrangère, de préférence française.
Les inquisiteurs anti-français n’en font pas exception!
Leurs cris d’orfraie anti-impérialistes, qui dénoncent à intervalle régulier la main invisible ou le complot de la France derrière le moindre dysfonctionnement interne au Cameroun, cachent en réalité un vrai complexe du néo-colonisé, une profonde frustration de citoyens réduits à la servilité et à la mendicité par une tyrannie. Nos frustrés de l’intérieur et complexés vis—vis du (blanc) français s’érigent alors en gardiens d’un temple totalitaire et réactionnaire, celui-là même qui ne leur laisse comme seul défouloir la haine de la France, la haine des Français; notamment ceux qui ont eu le malheur comme Lydienne Yen Eyoum ou Thierry Michel Atangana de servir le Cameroun avant leurs déboires judiciaires et de pouvoir prétendre après à la protection consulaire de la France du fait de leur (double) nationalité. Pourtant tous en en rêvent au Cameroun, de pouvoir eux-aussi jouir des mêmes garanties juridictionnelles, du même respect de leur intégrité … que celles que la France revendique et assure à ses ressortissants .
Mais coincés qu’ils sont dans une dictature sans fin, ils se réfugient par facilité et souvent par aigreur dans de faux-procès.
Joël Didier Engo