Dans un entretien accordé à France 24 et diffusé le lundi, 9 mai dans «le journal de l’Afrique», Paul Éric Kingue, ancien Maire de Njombe-Penja, libéré le 16 juillet 2015 après sept années passées en prison, s’est dit déterminé à obtenir réparation des années passées en prison, «pour rien».
L’ancien magistrat de cette municipalité située dans le Département du Moungo, Région du Littoral, réclame au total 23 milliards à l’État du Cameroun qu’il accuse de lui avoir causé «des dommages très graves». «Au cours de ma détention, mon épouse est partie, j’ai perdu tout ce que j’avais, mon fils est décédé», a-t-il indiqué, arguant par la suite qu’il n’y avait «rien» dans le dossier le concernant.
«J’avais osé demander que les sociétés de bananeraies du Cameroun – ce sont des sociétés françaises de la Compagnie fruitière – paient les impôts; et cessent de pulvériser des produits chimiques sur nos populations et qu’en plus, elles améliorent les conditions des ouvriers des plantations de Njombe-Penja. Il y a des intérêts au plus haut niveau de la République du Cameroun, des gens qui ont des actions dans ces bananeraies. Et du coup, lorsque j’ai posé ces problèmes, tous se sont levés contre moi et ont décidé de déclencher une machine ravageuse contre ma modeste personne et c’est ainsi que les accusations se succédaient les unes après les autres. Il n’y avait rien, le dossier était vide, j’ai été acquitté pour faits non établis», a-t-il martelé au cours de cet entretien.
Paul Éric Kingue dit avoir suffisamment d’énergie pour se «battre partout où besoin sera» pour que ses droits soient recouvrés. «Je veux que l’État du Cameroun prenne ses responsabilités. Autant il est prompt à arrêter des gens n’importe comment; autant il devrait être prompt à réparer lorsqu’il est dans le tort… J’ai été injustement accusé, je dois être payé, ça doit être réparé; sinon je suis dans la rue (…) mon cas est un cas probant de violation ostentatoire et barbare des droits humains en Afrique», clame-t-il.
L’ancien Maire de Njombe-Penja dit avoir envoyé des requêtes au Président de la République et au Premier Ministre, dont il attend les réactions. «Le Président de la République, s’il est conscient que le Cameroun n’a pas déjà très bonne presse dans le monde, s’il est conscient que le Cameroun est un État auquel on ne croit plus beaucoup à l’extérieur, s’il est conscient de tous ces éléments, il ne doit pas m’ajouter dans cette lutte. Parce que, moi, j’ai de l’énergie pour ça, je n’ai pas peur d’être assassiné par le régime», assure l’ancien prisonnier.
Dans un rapport commis en septembre 2014, la section camerounaise de Transparency International avait déjà soutenu que Paul Eric Kingue faisait face à «un véritable rouleau compresseur politico-judiciaire». Dans la même veine, l’institution avait dénoncé la connexion entre les puissances de l’argent et les autorités administratives, ainsi que «la situation d’impunité dans laquelle se complait l’industrie bananière au Cameroun». Un rapport que la société des Plantations du Haut-Penja (PHP), détenue majoritairement par la société française «Compagnie fruitière» avait aussitôt qualifié de «brulot» ou de «pseudo rapport».
Dans cette sortie, la société française défendait «verser régulièrement, à hauteur de plusieurs centaines de millions de FCFA par mois les impôts et taxes dus à l’État auprès de la Direction des Grandes Entreprises (DGE)». Pour donner plus de crédibilité à ses déclarations, elle avait réussi à mettre à contribution 5 103 de ses employés.
Par Wiliam Tchango | Cameroon-Info.Net