Après l’annonce de la réélection du président Ali Bongo, son opposant, Jean Ping – qui revendique lui aussi la victoire – a contesté sur franceinfo des résultats « tellement grossiers » qu’ils en sont « inimaginables ».
Alors que la France a exprimé jeudi sa « vive préoccupation » face aux violences qui ont éclaté dans le nuit de mercredi à jeudi au Gabon après l’annonce de la réélection du président Ali Bongo, son opposant, Jean Ping, explique sur franceinfo pourquoi il revendique la victoire, en précisant qu’il se trouve bien dans la capitale gabonaise.
franceinfo: Vous avez dit à certains de nos confrères que vous ne saviez pas si les partisans d’Ali Bongo savaient où vous étiez. Êtes-vous caché, êtes-vous en sécurité?
Jean Ping: Je suis à Libreville, je ne me cache pas. Les partisans d’Ali Bongo cherchent à arrêter tout le monde et à tuer tout le monde, mais bon je suis là. Je conteste les résultats [de l’élection présidentielle]. Ils sont tellement grossiers, c’est inimaginable. Vous avez vu le ministre de l’Intérieur qui vient annoncer que le taux de participation dans la région natale d’Ali Bongo est de 99,93%, c’est à dire pratiquement 100%, contre une moyenne nationale de 53% pour le reste du Gabon. C’est absolument ridicule.
Que demandez-vous pour sortir de cette crise?
Nous demandons de compter les voix, procès-verbal par procès-verbal, bureau par bureau, sous la supervision des observateurs internationaux, parce que la défaite de l’État est si grande, que tout le monde sait que j’ai gagné. [Ali Bongo] se comporte comme Bachar Al-Assad qui bombarde sa population par hélicoptère. Que croyez-vous qu’il mérite ? Il mérite un aller à La Haye, à la Cour pénale internationale.
Quelle est la situation dans les rues de Libreville?
Je ne sais pas, car comme vous le savez je suis dans une zone bombardée et quadrillée, et je ne peux pas sortir de chez moi. Mais mon QG a été attaqué pendant la nuit, par hélicoptère. Ils ont tout cassé, nous avons deux morts et plusieurs blessés. Il y aurait plusieurs autres morts dans la ville.
Est-ce que vous appelez à l’aide la communauté internationale?
Oui, nous l’appelons à l’aide, car nous avons à faire à un véritable tyran qui tire sur sa population et qui casse tout. Vous voyez, si c’était Bachar al-Assad qui était en cause, tout le monde aurait crié au scandale, mais Ali Bongo se comporte exactement pareil. Il tire sur son peuple par hélicoptère! La communauté internationale intervient, normalement, à chaque fois que ce genre de situation se produit. C’est grave.
Appelez vous vos partisans au calme?
On ne peut pas appeler quelqu’un qui est mort au calme. Mes partisans sont ceux-là qui viennent d’être gazés et bombardés. Si le reste de la population manifeste, je ne sais pas. Je ne sais pas ce que le peuple gabonais va faire. Il ne peut pas ne pas réagir, nous sommes dans une situation dramatique, où un tyran sanguinaire utilise son hélicoptère pour tirer la nuit sur son peuple. Celui qu’il faut appeler à la raison, c’est Ali [Bongo].
Avez-vous pu parler avec Ali Bongo ou des membres de son équipe?
Vous n’avez pas conscience de la situation qui prévaut dans notre pays. Est-ce que vous pensez que Bachar al-Assad accepte de discuter avec ses opposants? Non. C’est Ali Bongo qui a les clés de cette situation, c’est lui qui tire sur les gens. C’est à lui qu’il faut s’adresser. Il faut l’amener à la raison, comme on le fait partout dans le monde.