Je suis un brin amusé par la polémique encours au Cameroun sur les prestations d’avocats assurées pour la défense de “l’État de Guinée Équatoriale” devant la Cour Internationale de Justice, par l’un des leaders de la (vraie) opposition politique et prétendant sérieux à la Présidence de la République, le Professeur Maurice Kamto.
Ce dernier n’est certainement pas le premier, notamment du fait de sa profession d’avocat international, à être exposé à de telles critiques, dans cette situation singulière où il doit défendre sur un plan civil des clients (ici la Guinée Équatoriale confondue avec la famille Obiang dans l’affaire des biens mal acquis). Il est ainsi mis en porte-à-faux avec les valeurs progressistes et éthiques prônées par sa famille politique.
Cela ne devrait en aucune manière lui valoir ces procès en “malhonnêté”, voire en “cupidité” que je vois fleurir sur les réseaux sociaux Camerounais.
En effet il me revient d’avoir vu, y compris dans de vieilles démocraties, d’autres respectables hommes politiques être placés devant le même dilemme professionnel que le Pr. Kamto. Notamment sur ce même contentieux, l’actuel adjoint au maire de Paris chargé des relations internationales Me Patrick Klugman (élu socialiste de Paris) a aussi eu à défendre les intérêts du président équato-guinéen Obiang Nguema dans cette affaire dite des Biens Mal Acquis (BMA).
Par contre l’argument avancé par les partisans du Maurice Kamto consistant à distinguer l’État de Guinée Équatoriale et les membres de la famille présidentielle de ce pays semble malheureusement inopérant, parce qu’il ne résiste pas une seconde à la confrontation des faits.
D’une part l’affaire Théodorin Obiang aux États-Unis d’Amérique a révélé la confusion des deux sphères familiales et étatiques en Guinée équatoriale, où les achats compulsifs à l’origine de leurs déboires judiciaires ont souvent été effectués à partir des comptes bancaires officiels de l’État de Guinée équatoriale à l’étranger, dont ils sont par ailleurs les dépositaires. D’autre part sur le contentieux soumis à l’interprétation des juges de la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye, la France a saisi un immeuble privé à usage personnel appartenant à Théodorin Obiang, transformé en représentation diplomatique de la Guinée Équatoriale au début de ses ennuis judiciaires .
Pour autant, si réflexion et enseignement nous pouvons tirer de ce volet de l’activité de juriste international du Pr. Kamto, c’est l’intérêt ou le besoin parfois vital qu’ont les acteurs politiques en Afrique centrale et singulièrement au Cameroun, à exercer des activités professionnelles à bonne distance et bien à l’abri des restrictions, privations, et autres interdictions des pouvoirs en place. C’est souvent le seul moyen décent et digne de défendre légalement ses idées politiques, d’être un leader d’opinion à l’abri du besoin puis de l’achat systémique des consciences…dans un pays (le Cameroun) où le financement (public) des activités politiques (notamment des partis représentés) relève du seul bon vouloir du prince.
Je vous remercie
Joël Didier Engo, Président du CL2P