photo : Le président élu Adama Barrow a prêté serment à l’ambassade de Gambie à Dakar, le 19 janvier 2017.© SENEGALESE PRESIDENCY / AFP
Positionnées depuis hier le long de la frontière, les troupes ouest-africaines ont pénétré ce jeudi après-midi en territoire gambien. « Il y a un contingent du Nigeria avec des moyens terrestres, navals et aériens, un contingent sénégalais, un contingent ghanéen, un contingent togolais, malien, et des personnels de l’état-major de la force en attente de la Cédéao », a détaillé à RFI le porte-parole de l’armée sénégalaise, le colonel Abdoul Ndiaye.
« On a eu un mandat de la Cédéao, ensuite il y a eu la résolution des Nations unies et puis il y a eu l’investiture du président Adama Barrow, ce qui légitime l’action », a-t-il poursuivi. Le Conseil de sécurité des Nations unies a en effet ce jeudi exprimé à l’unanimité son soutien aux initiatives menées par la Cédéao pour pousser le président sortant Yahya Jammeh, dont le mandat s’est terminé officiellement hier à minuit, à quitter le pouvoir.
L’objectif de l’opération militaire est de restaurer la démocratie et la légalité constitutionnelle en Gambie, a indiqué le colonel Abdoul Ndiaye. « On doit créer les conditions qui peuvent permettre au président élu démocratiquement par la Gambie de pouvoir exercer son pouvoir librement. »
Adama Barrow investi président
Tandis que les forces militaires passaient à l’action, le président élu Adama Barrow a prêté serment vers 17h, heure locale, à l’ambassade de Gambie au Sénégal devant le président de l’Ordre des avocats gambien, en présence de nombreux responsables d’organisations internationales et régionales.
« Moi, Adama Barrow, jure solennellement que je vais exécuter de manière fidèle la fonction de président de la République de Gambie, je m’engage à la préserver et défendre la Constitution de manière égale envers le peuple, selon la loi, sans peur, sans favoritisme, avec justesse et sans mauvaise volonté. Que Dieu me vienne en aide. »
A son arrivée à l’ambassade, Adama Barrow a été accueilli par une scène de liesse. Il n’a fait qu’un seul geste, celui du V de la victoire, le symbole de sa campagne électorale. Tout juste investi, il a prononcé sa première allocution. « C’est un jour qu’aucun Gambien n’oubliera jamais », a-t-il déclaré. Le nouveau président a appelé à l’union, au rassemblement et au travail, en promettant de gouverner en pensant à tous les Gambiens et pas seulement ceux qui ont voté pour lui.
« C’est la victoire de la nation gambienne. Notre drapeau national flottera haut parmi ceux des nations les plus démocratiques du monde »
Adama Barrow a également remercié les pays et les institutions qui se sont investis dans la résolution de la crise en Gambie et ordonné au chef de l’état-major et aux officiers supérieurs gambiens de lui montrer leur loyauté en tant que commandant en chef. Mais jamais le nom de Yahya Jammeh n’a été mentionné.
A Karang, une ville à la frontière avec la Gambie où ils se sont installés provisoirement, les réfugiés gambiens avaient tous trouvé un moyen d’assister à la prestation de serment d’Adama Barrow. Pour ces Gambiens qui ont fui leur pays, l’événément était historique. Beaucoup ont confié à RFI qu’ils n’avaient pas l’impression que leur pays faisait partie du monde lorsqu’il était dirigé par Yahya Jammeh, mais qu’aujourd’hui, ils avaient le sentiment d’exister pour le reste de la planète.
Scènes de liesse à Banjul
A Banjul aussi, des groupes de Gambiens ont laissé éclater leur joie dans les rues jusque-là désertées par crainte de troubles, ont constaté des journalistes de l’AFP. Criant, klaxonnant, arborant des tee-shirts affichant « Gambia has decided » (« la Gambie a décidé »), ils exultaient, sans intervention de militaires déployés dans la ville.
Ce jeudi soir, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a appelé le nouveau président gambien pour lui exprimer son « soutien total ». Il a également dit soutenir « la décision historique de la Cédéao, avec le soutien unanime du Conseil de sécurité, de rétablir l’Etat de droit en Gambie afin d’honorer et de respecter la volonté du peuple gambien. »