Pour ceux qui ont tendance à l’oublier, le pouvoir de Yaoundé doit en grande partie sa survie du fait de l’appui politique, diplomatique et militaire qu’il a reçu de la France depuis 1960. En 1992, c’est le soutien de François Mittterand à Paul Biya qui en grande partie bloque le départ de Biya fortement souhaité et activé par les Etats-Unis et la Grande Bretagne.
Emmanuel Macron avait 4 ans quand Paul Biya est devenu président de la République. Il n’est donc pas très au parfum du marigot de la françafrique. Le candidat du régime Biya aux élections présidentielle était Alain Juppé qui est un grand ami de Paul Biya et acteur de la francafrique. Battu aux primaires des Républicains, ils se sont rabattus sur Fillon qui d’ailleurs était récemment au Cameroun quand il était premier ministre de Sarkhozy. Vu l’élimination de Fillon, les paris se sont tournés vers le Pen car, il a existé une amitié entre les Le Pen et les Biya. D’ailleurs, Robert Bourgi a révélé cette semaine que des chefs d’Etat de l’Afrique Centrale ont envoyé des mallettes d’argent pour la candidate Marine Le Pen au second tour.
A Yaoundé, les progressistes du RDPC et du pouvoir, dans leur grande majorité étaient favorables à Emmanuel Macron. Or les faucons étaient pour Marine Le Pen. Depuis cette semaine, ils travaillent à prendre attache avec des gens ayant plus ou moins des contacts dans l’entourage de Emmanuel Macron.
Biya ne fera rien de majeur dans les prochaines semaines avant d’avoir une idée claire de l’équipe de Emmanuel Macron et les orientations qu’il compte donner à sa politique africaine.
Ceux qui vous ont dit que l’élection française n’intéressait pas les camerounais vous ont simplement menti. Le Cameroun et la France entretiennent plus de 100 ans d’histoire commune. L’arrivée du Général De Gaulle en France a accéléré les indépendances africaines. L’arrivée de Mitterrand, premier socialiste à prendre le pouvoir en France a joué un rôle dans le départ de Ahidjo. Nul ne peut savoir l’effet qu’aura l’arrivée de Emmanuel Macron qui est le plus jeune président de la 5ème République, 39 ans et celui qui a pris le pouvoir sans appartenir à la gauche ou la droite qui pilotent le jeu politique depuis 50 ans.
Boris Bertolt, Journaliste et lanceur d’alerte camerounais
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Coup de gueule….. ARRÊTEZ L’HYPOCRISIE ET CESSEZ DE NOUS PRENDRE POUR DES IMBECILES
Tous les jours nous travaillons pour le changement dans ce pays. Nous prenons des risques. Nous mettons le temps que nous aurions pu consacrer à nos familles, nos amis, à notre épanouissement personnel pour que des choses bougent au Cameroun. Pour que les vies de nos compatriotes s’améliorent. Nous mettons nos propres vies en danger. Y compris celles de nos proches. Et jamais on ne vous a dit que nous attendions quelqu’un pour nous libérer. Au contraire tous les jours nous martelons aux jeunes de s’engager, de prendre leur destin en main, de parler, de crier leur colère, de dénoncer. Et nous le faisons depuis. Et depuis des années parce que nous croyons que C’EST POSSIBLE.
Ne venez pas aujourd’hui avec vos analyses prétentieuses nous faire croire que nous attendons quelque chose de Macron. Rien du tout. Dans la mesure où nous travaillons depuis sans lui pour que les choses bougent. Vous n’êtes certainement pas plus intelligents que tous ces millions de personnes dans le monde qui soutenaient Macron et ont laissé exploser leur joie. Y compris des brillants compatriotes comme Tony Smith qui est un proche de Macron.
Si aujourd’hui un jeune comme Macron peut démissionner d’un gouvernement et en un an devenir président de la République, pour nous, cela génère de l’espoir. Cela nous permet de continuer à nous battre. A rêver qu’un changement est possible. Seul l’espoir et le rêve permettent de maintenir une lutte. Que Macron soit quelqu’un du système ou pas. Peu nous importe. L’important c’est qu’il a réussi à faire ce que peu de personnes auraient pu faire même s’ils bénéficiaient des avantages qu’il a reçu.
Donc laissez vos compatriotes tranquilles, laissez les rêver, entretenir un espoir car seul cet espoir leur permet de continuer cette lutte difficile dans laquelle ils sont embarqués. Si vous croyez un temps soit peu que vous pouvez changer le Cameroun sans bénéficier de soutiens au sein de l’appareil vous êtes dans l’illusion. Cela ne s’est produit nulle part et ne se produira pas. Même quand une révolution citoyenne s’opère c’est parce que des acteurs au sein du système décident d’apporter leur caution. C’est pourquoi je pense fondamentalement que même après Biya, pour construire la réconciliation nationale, nous travaillerons avec tous ceux qui auront décidé de se mettre au service de la République et de ses institutions qu’ils aient servi le régime Biya ou pas. ET NOUS ALLONS DEVOIR PARDONNER. PAS DE CHASSE AUX SORCIÈRES OU DE REGLEMENTS DE COMPTE.
Par Boris Bertolt, Journaliste et lanceur d’alerte camerounais