Le Journaliste Jean Baptiste Placca ouvre le feu sur le régime Biya. Le Colonel Didier Badjeck riposte: «Moi Badjeck et vous, nous aurons notre combat désormais»
“S’il est vrai que personne ne croit ni à une indépendance ni à un retour au fédéralisme, le fait même que l’on en soit à parler de risque de remise en cause de l’unité nationale est un aveu d’échec pour ceux qui, au pouvoir à Yaoundé, n’ont cessé de banaliser les souffrances et les frustrations d’une partie de leur peuple.”
«S’il est vrai que personne ne croit ni à une indépendance ni à un retour au fédéralisme, le fait même que l’on en soit à parler de risque de remise en cause de l’unité nationale est un aveu d’échec pour ceux qui, au pouvoir à Yaoundé, n’ont cessé de banaliser les souffrances et les frustrations d’une partie de leur peuple. Et, voilà comment un ministre, à mille lieues de la marginalisation que vit une partie de ses concitoyens, en arrive à se laisser aller à des comparaisons malheureuses, du genre de celles qui assimilent les revendications de gens qui souffrent réellement aux pratiques des pires gangsters de notre siècle, les terroristes » dixit le célèbre chroniqueur de RFI.
Le samedi 30 septembre 2017, Jean Baptiste Placca a consacré sa chronique hebdomadaire sur Radio France Internationale (RFI) sur la crise socio-politique qui paralyse les activités dans les régions anglophones du Cameroun depuis un an. Dans cette chronique intitulée «La Fronde des Anglos», le journaliste se livre à une critique acerbe contre le régime Biya qui dirige le Cameroun depuis 35 ans.
«Les dirigeants camerounais ne peuvent pas décemment continuer à réagir comme si les frustrations qu’énoncent les anglophones, faits et chiffres à l’appui, n’étaient que les caprices de gens jamais contents, toujours insatisfaits, en dépit de toutes les faveurs que le pouvoir peut leur accorder. Il y a des interrogations légitimes sur la place qui est la leur… Et l’histoire du monde, même l’histoire récente du continent africain montre que les populations qui se sentent mal dans une nation peuvent la quitter, pour aller vivre leur destin ailleurs. Pour le meilleur, ou pour le pire, comme on pourrait le dire pour le Soudan du Sud, par exemple. Mais, voyez-vous, en dépit de l’enfer qu’ils vivent aujourd’hui, les Soudanais du Sud, s’ils étaient consultés, vous diraient probablement que pour rien au monde, ils ne retourneraient dans le Soudan d’hier» affirme le chroniqueur de RFI.
Le Colonel Didier Badjeck, en service au ministère de la défense, estime que cette dernière sortie de Jean Baptiste Placca est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Piqué au vif, l’officier supérieur est sorti de ses gonds. «Jean Baptiste Placca, vous n’amusez que des affidés sans profondeur stratégique, les Camerounais ne sont pas inscrits au suivisme. Votre haine dépasse tous les principes déontologiques du journalisme, vous interpellez les ministres de la république sans politesse. Quel est ce langage de quartier ? On ne vous demande pas de leur lécher les pieds mais de soigner votre langage».
Ci-dessous, le texte intégral de la riposte de Didier Badjck, suivi de la Chronique querellée de notre confrère Jean Baptiste Placca.
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La Riposte de Colonel Didier Badjeck
« Je parle comme Badjeck Didier, le citoyen tout court qui en a marre de la focalisation haineuse de RFIi sur le Cameroun, des rhétoriques désobligeantes sur une cible expiatoire précise. Je m’adresse à tous comme Jean-Baptiste Placa, vos émissions sont enregistrées, vos convocations au génocide sont dans les disques durs de nos mémoires qui nous rappellent le Rwanda. Vous serez jugé par l’histoire, par vos prises en otage de pauvres niais que vous avez l’art d’instrumentaliser.
Votre cohorte d’illuminés qui vous boivent comme du petit lait: les nouveaux colonisés à qui vous apprenez l’alphabet et le mimétisme. Jean Baptiste Placa, vous n’amusez que des affidés sans profondeur stratégique, les Camerounais ne sont pas inscrits au suivisme. Votre haine dépasse tous les principes déontologiques du journalisme, vous interpellez les ministres de la république sans politesse. Quel est ce langage de quartier? On ne vous demande pas de leur lécher les pieds mais de soigner votre langage.
La démocratie que vous semblez promouvoir ne vous impose-t-elle pas de respecter les convictions des autres. Vous êtes qui pour faire une lecture des futuribles ou le kaléidoscope de notre pays, surtout en marabout de politiste dont l’étoffe ne vous sied pas. Je vous considère comme un terroriste vous même et vous en êtes un en utilisant subrepticement le micro pour disqualifier et blanchir des actes terroristes.
Vous cautionnez les actions de personnes qui balancent des cocktails Molotovs dans des dortoirs d’enfants innocents? Ça s’appelle quoi pour vous? du militantisme engagé ? M. Placa, moi Badjeck et vous, nous aurons notre combat désormais. Je vous porte plainte devant le tribunal de l’histoire et je le formulerai strictement pour complicité avec une entreprise terroriste partant de vos aveux dans vos chroniques insipides du samedi, je vous porte plainte pour incitation au génocide que seul vous voyez…. ou alors souhaitez. Mais vos prophéties ne se dessineront pas.
Rfi, M.Placa a mis en cause le Chef de l’État du Cameroun dans une saugrenue affaire prenant à témoin J.Rawlings. Suite au démenti de ce dernier, M. Placa s’est excusé au moins devant l’ancien Président Ghanéen. Aujourd’hui vous lui donnez à nouveau vos antennes pour qu’il prenne des positions très marginales, et diamétralement opposées à l’objectivité et l’équilibre que vous devez observer. Au risque de vous faire assumer ces positions, il est grand temps d’apprécier les curieuses bavardes de Jean-Baptiste Placa sur votre chaîne.
Le journalisme n’est ni un pugilat ni un espace professionnel pour règlement de compte. Ne soyez donc pas amnésiques le moment venu. Les extraits d’émission sont des preuves recevables que vous allez assumer. Je retiens que JB Placa aseptise les actes de destructions des écoles, des édifices publiques, des obstructions aux droits des enfants d’aller à l’école comme étant des actes légitimes, autant que la fabrication et la pose d’engins Explosifs Improvisés, ou des jets de cocktails Molotovs comme étant des actes cliniques ou tout au moins, comme des actes de personnes marginalisées.
On pourrait, d’après-lui, pour une cause défendable tuer des enfants! Que la Cour Pénale internationale le mentionne, que les ONG le note. Je lui demande de s’excuser devant les auditeurs de Rfi pour cette autre prise de position grave et susceptible de générer des appréciations tendancieuses et incitatives à la violence. En lui souhaitant un excellent weekend, aussi je lui souhaite tout le courage de ne plus céder à aucune influence et de rester objectif, ce qui est le crédo du journaliste».
Par Adeline ATANGANA | Cameroon-Info.Net
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La chronique querellée de Jean-Baptiste Placca sous forme d’interview dirigée par le journaliste Edouard du Penhoat
«Sur l’échiquier politique national, ils jouent rarement les premiers rôles, s’estiment trop souvent relégués à l’arrière-plan du jeu politique, régulièrement ignorés, quelquefois méprisés et, pour tout dire, marginalisés. Au Cameroun, les « Anglos », comme aiment encore les appeler nombre de leurs compatriotes, ont décidé de se rappeler aux bons souvenirs du pouvoir de Paul Biya, et ils placent la barre très haut : l’indépendance ! Et voici le Cameroun ramené un demi-siècle en arrière.
Edouard du Penhoat : A la veille du 1er octobre, annoncé par ceux que l’on désigne déjà comme les séparatistes camerounais pour proclamer l’indépendance de leur région, un couvre-feu préventif a été instauré dans le Sud-ouest et le Nord-ouest du Cameroun. Comment expliquer que cette date, qui symbolisa, en 1961, la réunification de ce pays, en vienne, aujourd’hui, à marquer la discorde, sinon la désintégration de l’unité nationale ?
S’il est vrai que personne ne croit ni à une indépendance ni à un retour au fédéralisme, le fait même que l’on en soit à parler de risque de remise en cause de l’unité nationale est un aveu d’échec pour ceux qui, au pouvoir à Yaoundé, n’ont cessé de banaliser les souffrances et les frustrations d’une partie de leur peuple. Et, voilà comment un ministre, à mille lieues de la marginalisation que vit une partie de ses concitoyens, en arrive à se laisser aller à des comparaisons malheureuses, du genre de celles qui assimilent les revendications de gens qui souffrent réellement aux pratiques des pires gangsters de notre siècle, les terroristes.
Les dirigeants camerounais ne peuvent pas décemment continuer à réagir comme si les frustrations qu’énoncent les anglophones, faits et chiffres à l’appui, n’étaient que les caprices de gens jamais contents, toujours insatisfaits, en dépit de toutes les faveurs que le pouvoir peut leur accorder. Il y a des interrogations légitimes sur la place qui est la leur dans cette République naguère fédérale, puis unie, et désormais une.
La République a beau être une et indivisible, l’on ne peut pas oublier qu’à ces anglophones, dans les années soixante et soixante-dix, les dirigeants, francophones, du Cameroun, avaient dû faire une cour assidue, pour les convaincre d’adhérer à une réunification, alors pleine de nombreuses promesses. L’on ne peut pas faire, aujourd’hui, comme si ces populations n’avaient jamais aucun autre choix.
D’autres entités, dans d’autres nations, ont des aspirations et des revendications similaires, en Afrique, et même au Cameroun…
Sauf que l’on ne peut pas traiter les anglophones camerounais comme les populations d’autres nations, dans lesquelles il y aurait des revendications régionales, indépendantistes, et autres, au sein de républiques, à l’origine, unies. La fusion totale des anglophones dans le Cameroun, tel que nous le connaissons aujourd’hui, a nécessité des étapes diverses, avec les subtilités de langage appropriées à chaque phase. République Fédérale, République unie, jusqu’à l’actuelle République du Cameroun.
Les frustrations des anglophones, aujourd’hui, plongent donc leurs racines dans les promesses non tenues des phases successives par lesquelles ils ont été attirés dans… ce mariage !
Cela justifie-t-il, pour autant, que l’on veuille revenir en arrière ? L’unité est consommée…
L’unité, même consolidée, ne peut être viable, si elle fonctionne comme un piège. Comme si, dès lors que vous y êtes entré, vous n’aviez plus le choix. Comme si toute l’attention dont on vous a entouré avant de vous y entraîner, disparaissait, comme dans un mariage contraint. Et l’histoire du monde, même l’histoire récente du continent africain montre que les populations qui se sentent mal dans une nation peuvent la quitter, pour aller vivre leur destin ailleurs. Pour le meilleur, ou pour le pire, comme on pourrait le dire pour le Soudan du Sud, par exemple. Mais, voyez-vous, en dépit de l’enfer qu’ils vivent aujourd’hui, les Soudanais du Sud, s’ils étaient consultés, vous diraient probablement que pour rien au monde, ils ne retourneraient dans le Soudan d’hier.
N’y aurait-il donc aucune solution, en dehors du fédéralisme ou de l’indépendance, pour les anglophones du Cameroun ?
Toutes les solutions restent possibles. Y compris le statu quo institutionnel, mais avec quelques garanties solides d’y être mieux traités. Ce peut aussi être avec des réaménagements institutionnels, qui leur concèderaient un peu mieux, un peu plus que le cinquième rang, dans le protocole d’Etat. Et, aussi, quelques autres petites garanties, par rapport au bilinguisme, qui devrait être une richesse pour tous, et non une corvée pour certains.
Le monde comptait quelque 159 Etats avant la chute du Mur de Berlin. Les Nations unies affichent, aujourd’hui, pas moins de 193 Etats membres, et les chiffres précis s’élèvent à 197. Les explorateurs n’ont pourtant découvert aucune île nouvelle, aucun continent supplémentaire. Outre l’accession de territoires et peuples sous domination à la souveraineté internationale, la plupart des nouveaux Etats sont issus du désossement d’Etats au sein desquels certains peuples se sentant à l’étroit ont pris le large.
Même l’Afrique, après avoir chanté, trois décennies durant, l’intangibilité des frontières issues de la colonisation, a fini par concéder la naissance de trois ou quatre nouveaux Etats, dont l’Erythrée, soustraite de l’Ethiopie, et le Soudan du Sud, déduit du Soudan.
Car le mépris et la condescendance sont ce qu’il y a de plus friable, comme ciment, pour l’unité nationale. Au Soudan, comme au Cameroun”.
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Et ils n’ont même pas peur d’être ridicules, en s’en prenant de manière aussi sauvage et maladroite à un média qui aurait donc le tort d’ouvrir ses ondes au pluralisme de l’information sur une crise qu’ils se sont révélés incapables d’endiguer depuis des mois, privilégiant la répression aveugle et le massacre des populations civiles.
De grâce épargnez-nous ces incongruités au moment où un dialogue direct et franc doit être convoqué au plus vite, pour éviter que la partition du Cameroun devienne inévitable. Précisément parce que le droit international ne vous laissera pas massacrer impunément et à huis clos une minorité sans en arriver – comme au Sud soudan – à la conclusion que son “indépendance” serait un moindre mal.
Réfléchissez au moins avant de sombrer dans des procès en sorcellerie.
Joël Didier Engo, Président du CL2P
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Cameroun: un journaliste accusé d’incitation à la haine contre les anglophones
Au Cameroun, la crise anglophone se transporte dans les médias. Des dizaines de journalistes anglophones ont saisi le 3 octobre le Conseil national de la communication (CNC) avec une plainte visant un journaliste d’une chaîne de télévision privée, coupable à leurs yeux d’« incitation à la haine ». Une plainte que le Conseil a aussitôt décidé d’examiner en promettant des sanctions sévères en cas de faute professionnelle avérée. Plusieurs autres médias sont dans le collimateur de cet organe de régulation pour leur traitement jugé indélicat de la crise dite anglophone.
La pétition signée par une cinquantaine de journalistes camerounais d’expression anglaise met notamment à l’index le directeur de la télévision privée Vision 4. Il est reproché à Ernest Obama d’avoir, dans l’une de ses émissions, incité à la haine contre les anglophones et d’avoir qualifié de « terroristes » les auteurs des troubles dans les régions anglophones du Sud-Ouest et du Nord-Ouest.
Au Conseil national de la communication (CNC) où la plainte a été déposée, l’affaire est prise très au sérieux. Son président, Peter Essoka, met en garde contre ce qui pourrait s’apparenter, selon lui, à la Radio Télévision Libre des Mille Collines (RTLM), de sinistre renommée au Rwanda.
« Langage de haine »
« Les médias, dans une période de crise comme celle-ci, doivent faire preuve de beaucoup de responsabilités, estime-t-il. Nous sommes dans une période sensible. Demander à des gens de s’attaquer à d’autres est inadmissible. Et nous allons traiter cela avec beaucoup de sérieux. Ce genre de choses est arrivé au Rwanda en 1994 avec la Radio Mille Collines, avec les conséquences que l’on sait. Est-cela que souhaitent ces télévisions en utilisant leur langage de haine ? »
Jean-Pierre Amougou Belinga, le propriétaire de Vision 4, se défend de toute stigmatisation visant les anglophones. « Je voudrais qu’on nous présente là où on a parlé de génocide, là où on a appelé les uns ou les autres à combattre les anglophones, déclare-t-il. Je dis non, je ne peux même pas le faire puisque des anglophones vivent chez moi. Ils travaillent ici, ce sont des responsables. Il y a des émissions en anglais ».
Mieux encore, il reprend à son compte les propos reprochés à son collaborateur : « Quand on pose des bombes, quand on a les armes, quand on brûle les écoles, on appelle cela comment ? Moi, j’appelle cela terrorisme ».
Ernest Obama a quant à lui déjà présenté ses regrets à tous ceux qui, dans la communauté anglophone, ont été offensés par ses propos.