Monnaie, Servitude et Massacre au Cameroun
Par Olivier Tchouaffe, Phd, Contributeur au CL2P
Dans sa tentative de “clarifier” la crise Anglophone, la dernière intervention de Mademoiselle Brenda Biya dans Cameroon-info.net http://www.cameroon-info.net/
En effet, Mademoiselle Biya rejette la crise anglophone et le massacre des Camerounais anglophones ordinaires par l’armée de son père sur les “Occidentaux”, qui auraient selon elle versé le sang des Camerounais pour faire diversion de la “politique économique nationaliste” de son Père, qui comprend notamment l’instauration d’une monnaie camerounaise pour remplacer le néo-colonial franc CFA.
Cet argument n’est pas étranger à la rhétorique complotiste déjà émise par M. Issa Tchiroma Bakary, ministre de la communication de son père et porte-parole de son gouvernement, qui a notamment déclaré que la crise anglophone est «conçue hors du Cameroun».
Mme Brenda Biya a « clarifié » et réduit la crise au franc CFA; non à l’activisme Anglophone en faveur des droits humains et en désobéissance civile au régime autocratique de son père. Selon mademoiselle Brenda Biya, être pour le franc CFA est donc une forme réinventée d’antinationalisme au Cameroun, punissable par la mort. Même dans le scénario improbable où nous serions d’accord avec mademoiselle Biya pour dire que cette crise porte sur le franc CFA, ce n’est pas et ce ne serait jamais une justification pour tuer des Camerounais ordinaires et pacifiques en toute impunité.
À ce sujet, Joël Didier Engo, le président du CL2P écrit en réponse à Mlle Biya:
Mademoiselle, «Le diable qui boit le sang des camerounais» n’est autre que Paul Biya. Pas les occidentaux!
Malheureusement Mlle Biya, le sang des camerounais qui coule et qui n’a en réalité cessé de couler depuis 1982 n’est certes pas celui des occidentaux – qui n’ont pour ainsi dire rien à voir avec (cette fois-ci) – mais bel et bien le fait des décisions non assumées de votre père et des crimes exécutés par la soldatesque sous ses ordres.
«Le diable qui boit le sang des camerounais» n’est hélas autre que votre père, aussi difficile que cela soit concevable et compréhensible pour une jeune femme de votre microcosme.
Car c’est d’abord lui, Paul Biya, Président du Cameroun depuis 35 années, le responsable principal du massacre des populations civiles anglophones (et de bien d’autres avant), en sa qualité de Commandant suprême de l’armée du Cameroun.
La décence voudrait qu’il en répondre devant les juridictions internationales compétentes, même à 85 ans!.
Monsieur Engo, qui, au-delà de ses activités pour la défense des droits humains, est également un juriste et économiste politique hautement qualifié, comprend en outre que, dans la pratique, la notion de «monnaie» implique la capacité de construire un consensus culturel comme moteur de la transformation sociale. Cette transformation sociale porte sur l’institutionnalisation d’une monnaie commune; un stock commun de confiance en tant qu’outils et pratiques de justification qui établissent des critères pour les normes et les valeurs épistémiques.
En tant que tel, le rôle que l’artisanat, les techniques, et l’industrie jouent dans la construction de ce stock commun de confiance en relation avec des objets matériels est non négligeable. Ainsi, c’est toute la redéfinition du langage, de la politique, et de la façon dont les flux d’objets matériels se confondent en une forme de monnaie qui structure la société et informe sur le progrès et la modernité. Aussi, pour qu’une forme de monnaie puisse être instituée, il est nécessaire d’établir des procédures pour renforcer la confiance dans les relations sociales. Par conséquent, la relation entre les objets matériels et l’utilisation est primordiale.
C’est là que même une monnaie camerounaise nationalisée ne fera rien pour aider les Camerounais ordinaires. Parce que la nouvelle monnaie sera aussitôt privatisée par le régime de Paul Biya pour contrôler la sphère politique, car ayant a pris la mauvaise habitude d’utiliser la « corruption» pour dégager du champ politique des personnes que le régime croit poser ou représenter une menace politique grave (pour sa survie).
Par conséquent, une monnaie à elle seule ne fait rien, c’est comment elle est utilisée. Le CL2P a déjà eu à souligner que certains régimes autocratiques tels que la Chine et Singapour ont réussi à développer un secteur privé prospère et des économies performantes ce que le régime de Biya ne fera jamais.
Olivier Tchouaffe, Phd, Contributeur au CL2P
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English version
Currency, Servitude and Bloodshed in Cameroon
By Olivier Tchouaffe, PhD, Contributor to the CL2P
In her attempt to “clarify” the Anglophone crisis, Ms. Brenda Biya’s latest intervention in Cameroon-info.net http://www.cameroon-info.net/
Indeed, MS Biya blames the Anglophone crisis and the massacre of ordinary Anglophone Cameroonians by her father’s army on “westerners” shedding Cameroonians blood as a diversion from her Father’s “nationalist economic policy” that includes a Cameroonian currency to replace the neo-colonial CFA Franc.
That argument is no stranger to what Issa Tchiroma Bakary, her father’s minister of communication and spokesperson of his government, that the Anglophone crisis was “designed” by external power.
Ms. Brenda Biya “clarified” and narrowed the crisis to the CFA Franc diversion. not human right activism and boycotts against her father autocratic regime. According to Ms. Brenda Biya, being for the CFA franc, therefore, is a reinvented form of anti-nationalism in Cameroon punishable by death. Even if we agree with Ms. Biya that this crisis is about the CFA Franc, it is not a justification for her father to kill ordinary Cameroonians with impunity.
As Joel Didier Engo, President of the CL2P writes in response to Ms Biya: “Mademoiselle, “The devil who drinks the blood of the Cameroonians” is none other than Paul Biya. Not the Westerners! Unfortunately Mademoiselle Biya, the blood of the Cameroonians, which has flowed and has in fact never ceased to flow since 1982, is certainly not that of the Westerners – which have nothing to do with (this time) – but indeed, the fact of the unfulfilled decisions of your father and of the crimes executed by the soldiery under his orders.
“The Devil who drinks the blood of the Cameroonians” is none other than your father, however difficult it is conceivable and understandable for a young woman of your microcosm.
Paul Biya, the President of Cameroon for 35 years, is the first person responsible for the massacre of the Anglophone civilian populations (and many others before), in his capacity as Supreme Commander of the Army of Cameroon.
Decency would like it to answer before the competent international jurisdictions, even at 85 years!
Mr. Engo, who, beyond his human right activities, is also a highly trained economist, moreover, understand that in practice, the notion of “currency” stands for the capacity to build cultural consensus as an engine for social transformation. This social transformation operates on the institutionalization of a common currency; a common stock of trust as tools and practices of justification that set up criteria for epistemic norms and values. As such, the role that artisanship, techniques and industry play in building that common stock in relationship with material objects. Thus, the redefinition of language, politics and how the flows of material objects coalesce into a form of currency that structure society and inform on progress and modernity. Thus, for a form of currency to take hold, there is a need to establish procedures to build trust into social relationships. Hence, the relationship between material objects and usage.
This is where even a nationalized Cameroonian currency won’t do nothing to help ordinary Cameroonians because the new currency will be privatized by the Biya’s regime for political control since the Biya’s regime has taken the bad habit to use “corruption” to clear the political field of people the regime believes to pose a dire political threat. Hence, a currency all by herself does nothing, it is how it is used. The CL2P has already pointed out that some autocratic regimes such as China and Singapore have managed to develop a thriving private sector and successful economies which the Biya’s regime will never do.
Olivier Tchouaffe, PhD, Contributor to the CL2P