Je n’ai jamais compris si c’est moi qui raisonne mal ou qui vois mal. Je ne peux pas croire que l’Etat du Cameroun puisse, par la force, imposer aux Anglophones un modèle d’Etat qu’il refuse.
J’ai beau retourner le problème dans tous les sens, je ne vois pas comment, de manière opératoire, on peut obliger par des moyens de force, une Communauté de 20% d’une population à vivre dans un modèle dont elle ne veut pas.
Un Etat n’existe qu’à travers ses services publics qu’il dispense à la population : école, santé, justice, administration, etc. A son tour, cette population contribue au PIB par sa production, au budget par ses impôts et aux devises par ses exportations.
Mais, lorsqu’une communauté refuse l’État, elle le détruit systématiquement à travers ses symboles et elle refuse d’obéir ! Et on voit d’ailleurs cette dynamique qui se dessine : après avoir combattu les militaires, les sécessionnistes ont commencé à attaquer le personnel civil, après d’ailleurs plusieurs mises en garde, comme ce fonctionnaire d’ELECAM tué hier.
De tels geste ne peuvent que déclencher un mouvement de panique généralisée, qui va créer un clivage de fait entre les Anglophones et les Francophones, aucun civil francophone n’osant plus y mettre pied. Car il est techniquement impossible de protéger ces agents publics si la population ne veut plus d’eux.
L’État finit alors par se ratatiner dans quelques poches hyper sécurisées, extrêmement coûteuses et sans la contrepartie nécessaire pour les impôts et le PIB. D’où une terrible dilapidation de ressources qui finit par épuiser l’État.
Comment peut-on alors imaginer que le Cameroun fonctionne, avec une population qui interdit au reste de mettre pied chez elle ? Cela va se passer comment ? Les colons blancs pouvaient le faire dès qu’ils sécurisaient les matières premières qui les intéressaient, même si le reste mourait de faim. Cela n’a d’ailleurs pas empêché qu’ils renoncent à l’aventure coloniale qui devenait de plus en plus coûteuse. Comment alors imaginer qu’un État indépendant puisse mener ce genre de démarche sur le territoire ?
Je l’ai dit et redit, l’État unitaire est radicalement incapable de réduire la Sécession anglophone. L’espérance que la brutalité, les rafles, la destruction de l’habitat, les emprisonnements finiront pas casser le moral des populations qui vont se soumettre à la loi de la violence étatique ne marche pas.
Bien au contraire, celle-ci ne fait qu’alimenter plus de haine encore, plus de détermination encore ! Pire, elle modifie les termes mêmes du combat : progressivement, les sécessionnistes armés finissent pas s’imposer dans la tête des populations comme une armée de libération qui combat une armée d’occupation brutale et sanguinaire. Exactement comme cela a toujours été dans les guerres de libération !
Et ces populations chanteront le meurtre d’une jeune gendarme comme celle qui a été tuée hier et qui aurait été enceinte comme une victoire, digne d’être fêtée !
Personne n’imagine le coût de cette guerre ! Le déploiement des forces de sécurité, l’interruption des activités, la perturbation des réseaux commerciaux, tout cela représente des pertes effrayantes dont les contrecoups seront insupportables. On en est même au point où ce qui aurait dû légitimement nous occuper, à savoir l’Emergence a été mise eux oubliettes ! Les Grands Projets, la croissance, l’emploi, personne n’en parle pratiquement plus !
D’ailleurs, des esprits malveillants affirment sous cape que le régime a créé cette guerre pour faire diversion et dissimuler ses échecs ! D’où des tentatives récurrentes d’obliger les gens à le soutenir comme un champion de l’unité nationale, menaçant ceux qui critiquent cette logique d’antipatriote.
Un peu comme une misérable feuille de chou a mis sur la UNE notre image à trois : moi, Maître AKERE MUNA et NITCHEU. Les cloportes ! Ils n’ont même conscience qu’ils nous font une publicité à très peu de frais !
En définitive, l’Etat unitaire, avec ses « unités nationales », est devenu très dangereux pour la survie du Cameroun. Il faut en prendre acte et passer à autre chose !
On ne demande pas aux autorités de négocier nécessairement avec les Sécessionnistes, mais de susciter le seul ennemi qui combat efficacement la Sécession, à savoir un Etat fédéré.
C’est la présence d’une structure étatique, avec une police locale, une administration locale, une justice locale et des sociétés publiques locales qui va contenir et réduire la sécession à son niveau larvaire. Car les autorités locales, gérant leurs 250 Milliards de dotation fédérale à quoi s’ajoutent des impôts locaux vont demander aux sécessionnistes de les laisser jouir de leur pouvoir et de leur argent en paix. Et elles vont les combattre avec plus d’efficacité et moins de saleté que l’Etat central. Car elles bénéficieront de la coopération de la population.
En, dehors de cette solution, vous ne pouvez rien et c’est un sang versé de manière parfaitement inutile : l’Etat unitaire ne peut pas vaincre la Sécession Anglophone.
Dieudonné ESSOMBA