Gaspillage: Bien Commun et Pratiques Institutionelles au Cameroun
Par Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
Cameroun: à propos des milliards de Fcfa dilapidés par le dictateur Paul Biya dans d’interminables séjours en Suisse
Le Cameroun est certainement un des rares pays au monde où les plus graves anomalies finissent par revêtir un sceau de normalité, au point d’installer le doute dans les têtes de celles et ceux encore dotés d’un minimum de raison.
J’essaye en effet de comprendre comment des personnes normalement constituées en arrivent – comme les dignitaires du régime de Yaoundé – à justifier les séjours prolongés en Suisse d’un président qu’ils prétendent avoir été élu sans discontinuer pendant 35 années par un peuple, qui est ainsi privé de plus de 90 milliards de FCFA alloués à ses frais d’hôtel à Genève, ses locations d’avions, et autres dépenses somptuaires…
Je veux bien ne pas critiquer pour critiquer, mais où est passé le sens de l’État chez ces commis d’administration? Comment peuvent-ils justifier un comportement qui sort de l’ordinaire républicain, au point de nous remplir littéralement de honte, car inconcevable pour n’importe quel chef de l’État, y compris des monarchies du Golfe?
Qu’avons-nous fait à M. Biya pour mériter ça?
En effet, cet état de choses ne peut s’expliquer que dans un pays où le bien commun a été privatisé et où le chef de l’État se considère au-dessus des lois. Au début de ses 35 ans de règne présidentiel, M. Paul Biya s’est présenté au Camerounais ordinaire comme l’homme de la Rigueur et de la moralisation comme axe du New Deal du « libéralisme communautaire», avec une vision de la société dominée par la rigueur dans la gestion des propriétés publiques et la moralisation de la société, mettant l’éthique du travail, la règle de loi, la liberté, les droits de l’Homme et les réformes économiques au centre de son projet politique. Pris ensemble, les valeurs qu’on nous a dit qu’il a appris et pratiqué en tant qu’ancien séminariste.
Ce genre de gaspillage trahit l’idéologie professée par le président. De plus, il trahit surtout tous les Camerounais ordinaires qui sont en prison au nom de la prévarication supposée des caisses de l’Etat.
En outre, ces déchets produits par le président Biya vont au-delà des utilisations matérielles. Il montre un régime dont les propres idéaux de « libéralisme communautaire » ont perdu leur sens et leurs valeurs. De plus, ce gaspillage repose sur l’idée qu’une grande partie de la population camerounaise serait effectivement constituée de citoyens de seconde zone, avec une capacité et un apport limités dans la production du droit et du pouvoir au Cameroun. Ainsi, il s’agit de la continuation de l’économie de plantation biopolitique coloniale, où le maître d’esclave obtient l’unique privilège et la jouissance exclusive du travail, puis de la création de richesses produites sur le dos des esclaves. Cela montre la nécessité de repenser les hiérarchies sociales contemporaines au Cameroun, à l’intérieur de la généalogie de cet État colonial qui se fait désormais passer pour un État moderne.
Dans ce contexte, M. Joseph Le directeur adjoint du cabinet civil à la Présidence pense rendre un service aux Camerounais en défendant le président. Mais en réalité ce qu’il est en train de faire réellement, comme vient de le souligner Joël Didier Engo, président du CL2P, c’est de justifier un régime d’exception. Tout ce qu’il fait en effet, c’est justifier la continuation de pratiques institutionnelles dérivées de la puissance coloniale et, dans le même temps, naturaliser les privilèges spéciaux du chef de l’État au détriment des Camerounais ordinaires.
Après 35 ans de cette gabegie, Ça suffit!
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
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English version
Wastage, the Common Good and Institutional Practices in Cameroon
By Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P
Cameroon: about the billions of Fcfa squandered by the dictator in endless stays in Switzerland
Cameroon is certainly one of the few countries in the world where the most serious anomalies end up taking a seal of normality, to the point of placing doubt in the heads of those still with a minimum of reason.
I am trying to understand how people normally constituted – like the dignitaries of the Yaoundé regime – to justify the prolonged stays in Switzerland of a president whom they claim to have been elected continuously for 35 years by a people, which is thus deprived of more than 90 billion FCFA allocated to its expenses of hotel in Geneva, its leasing of planes, and other sumptuary expenses …
I do not want to criticize for criticism sake, but where did the sense of the state go in these administrative clerks?
How can they justify a behavior that is out of the ordinary republican, to the point of filling us literally with shame, because inconceivable for any head of state, including monarchies of the Gulf?
What did we do to Mr. Biya to deserve that?
Indeed, this state of affairs can only be explained in a country where the common good has been privatized and the head of state considers himself to be above the law. At the beginning of his 35 years of presidential reign, Mr. Paul Biya presented himself to ordinary Cameroonian as the man of Rigor and moralization as the axis of New Deal of “communal liberalism” and a vision of society dominated by stringency in the management of public property and moralization of the society putting work ethics, rule of laws, freedom, Human rights and economic reforms front and center. Taken together, values we were told he learned and practiced as a seminarian.
This kind of waste betrays the president’s own professed ideology. More, it betrays all of the ordinary Cameroonians who are in prison in the name of the prevarication of the state coffers.
This waste produced by president Biya, furthermore, goes beyond material uses. It shows a regime which own “communal Liberal” ideals have lost its ways and values. This waste, moreover, is predicated on the idea of a large part of the Cameroonian’s population being second class citizen with limited capacity and input in the production of law and power in Cameroon. Thus, the continuation of colonial biopolitical plantation economy where the slave master gets the sole privilege and enjoyment of the labor and the wealth creation produced on the backs of the slaves. Indeed, the necessity to rethink contemporary social hierarchies in Cameroon within the genealogy of the colonial state now masquerading as a modern state.
In this context, Mr. Joseph Le thinks he is doing a service to Cameroonians by defending the president by what he is really doing, as Joel Didier Engo, President of the CL2P, just pointed out earlier is to justify a regime of exception. All he is doing is to justify the continuation of institutional practices derived from the colonial power and, in the process, naturalizing the special privileges of the head of state at the expense of ordinary Cameroonians.
After 35 years, enough is enough!
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P