Par Olivier Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
Dans mes brèves interventions au nom de la lutte pour les droits de l’Homme au Cameroun, je suis devenu sociologue amateur. J’ai décidé de m’investir dans ce projet, d’abord parce que, pendant plus d’une décennie, j’ai assisté en silence au spectacle d’un CL2P faisant face à toutes sortes d’abus, qui souvent n’avaient rien à voir avec les faits qu’ils défendaient. Le CL2P ne m’a jamais demandé de faire quoi que ce soit parce qu’ils peuvent très bien se défendre tout seul. Le devoir moral et intellectuel m’a finalement convaincu de monter sur le ring.
Dans la lutte pour les droits de l’Homme au Cameroun, il y a toutes sortes d’adversaires. Parmi ceux-ci:
– les complices du régime qui protègent jalousement leurs statuts et privilèges,
– ceux qui pensent qu’ils sont au-dessus de la mêlée, parce membres du sérail et apparentés,
– les lâches résignés à garder leurs «secrets publics»,
– et les «idiots utiles» du régime qui sont souvent de véritables laveurs de cerveaux, se présentant paradoxalement dans les débats publics comme des «révoltés et des révolutionnaires», mais qui en réalité sont les premiers partisans du statu quo dictatorial et répressif, car vivant essentiellement dans la matrice du régime de Yaoundé, et prospérant uniquement en tant que facilitateurs, penseurs, idéologues, et intellectuels modèles du «Renouveau» autocratique. Ils trahissent fréquemment leur manque d’indépendance envers le régime à travers les moyens solipsistes et narcissiques qu’ils utilisent pour cracher littéralement au visage de tout contradicteur sans la moindre élégance ni considération.
Pour cet article, je vais me concentrer sur les imbéciles et les idiots utiles du régime Biya qui apprécient particulièrement ce que le penseur français René Girard a appelé le «désir mimétique» et le «bouc émissaire».
Ces idiots utiles pensent toujours qu’ils peuvent identifier ou déceler vos motivations les plus basses, quand ils ne les fabriquent pas purement et simplement pour honorer leur «bonne ou juste cause», c’est-à-dire la pérennisation du statu quo dictatorial. Ceci est essentiel pour comprendre la lutte contre les libertés civiles au Cameroun. Ces marionnettes sont des idiots très combatifs qui doivent toujours se considérer comme les éternels «gagnants». Ce désir de «gagner» trahit toutefois un réflexe presque pathologique consistant à nier en permanence la réalité des faits. C’est pour cela qu’ils ne racontent pas des mensonges comme des Hommes politiques ordinaires (pourrait-on dire), notamment dans ces scènes quotidiennes où le politicien sait qu’il ment, et où nous savons aussi qu’ils le savent, mais c’est un jeu que nous devons supporter, y compris en démocratie. Mais nos idiots utiles du régime dictatorial de Yaoundé quant à eux, croient réellement en leurs mensonges et c’est cela qui est le plus dérangeant. Leur objectif est surtout de prouver qu’ils sont motivés voire habités par la loi du plus fort (dont ils disent en être l’incarnation). Mais dans la réalité ils sont d’étranges «justiciers». En effet leur dépendance au régime Biya est tellement flagrante et évidente, notamment dans la manière qu’ils ont de s’attaquer violemment à quiconque ose analyser en profondeur le despotisme légal instauré au Cameroun par le Vieux Nègre.
C’est la manifestation de la notion de victime «sacrificielle» si bien décrite par le penseur René Girard. Girard fait en effet valoir que pratiquement toute communauté humaine est fondée sur ce qu’il appelle «le mécanisme du bouc-émissaire». C’est le processus par lequel nous déchargeons nos tensions sociétales sur une victime que nous avons collectivement décidée de punir. Ainsi au moins pendant un certain temps nous parvenons effectivement à trouver un semblant de paix et de stabilité à notre communauté volatile.Cela permet d’expliquer largement pourquoi la dynamique du bouc émissaire est si populaire auprès du régime de Yaoundé et qu’elle a acquis une onction quasi religieuse transformant «l’homme-lion» en dieu sur terre.
Le CL2P a maintes fois fait la démonstration de la manière dont la figure de «l’opposant» intervient dans le mécanisme sacrificiel du gouvernement camerounais à partir de la figure du «Maquisard» (pendant la guerre d’indépendance et après), du «putschiste» (lors du coup d’état manqué du 06 avril 1984 et après), de «l’éperviable» (avec l’épuration politique menée sous couvert de la lutte contre la corruption), puis de «la cinquième colonne anglophone » (depuis la répression aveugle du mouvement de désobéissance civile dans les deux régions anglophones). Et ainsi de suite…
Ce désir du bouc émissaire met en évidence un instinct très ancré pour le sacrifice humain qui ne tarde jamais à remonter à la surface au Cameroun, et qui pourrait même préexister à la modernité culturelle et technologique. Car le sacrifice qui se déroule dans les « mouroir concentrationnaires » du régime Biya est une conséquence directe des formes de comportements et des modes d’organisation sociale pervers de ce régime, et dont il s’en sert pour parvenir rapidement à ce qu’il considère comme des «succès politiques» retentissants. Il s’agit d’une forme caractérisée de comportement méchant, cruel, et sanguinaire qui commence toujours bonnement par le fait d’empêcher les gens ordinaires d’exercer leur liberté d’expression, sans qu’ils se voient cracher toutes les immondices à la figure. C’est une mentalité autoritaire qui fait le lit du régime Biya, puis le malheur des idées de démocratie et de tolérance au Cameroun. Mais plus pour très longtemps, parce que l’arc de l’univers moral penche irréversiblement vers la Justice.
Olivier Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
English version
Prison and Scapegoating in Cameroon
By Olivier Tchouaffe, PhD, Spokesman to the CL2P
In my brief interventions on behalf of the fight for human rights in Cameroon, I became an amateur sociologist. I got into this, first, because, for more a decade, I had to witness my buddies at the CL2P taking all kinds of abuses that have nothing to do with the facts. They never asked me to do anything because they can defend themselves alright. Intellectual and moral compelled me to throw my hat in the ring.
In the fight for human rights in Cameroon, they are all kinds of adversaries. Among them, those who fancy their current status, those who think that they are above it all, cowards resigned to keep their “secrets” and the regime’s “useful idiots” who are often brainwashed poseurs posing as “rebels and revolutionaries” but who are in reality partisans of the status quo, living in the matrix of the Yaoundé’s regime its enablers and champions. This is in plainview for the solipsistic and narcissistic ways they spit at people’s face without any forms of considerations.
For this article, I am going to focus on the morons and the useful idiots of the Biya’s regime who enjoy what French thinker, Rene Girard called “mimetic desire” and “scapegoating”.
These useful idiots always think they can identify your lowest possible motives. This is central to understanding the struggle over civil liberties in Cameroon. These stooges are very combative idiots who always has to see themselves as “winners”, to a pathological degree that denies facts. They do not tell ordinary political lies, where the politician knows he/she is lying, and we know they know, and it’s the game we have to put up with. They actually believes their lies and that is a bit disturbing. Their goals, as with the Biya Regime, is to prove that they are driven by the law where in fact they vigilantes. Their co-dependence with the Biya’s regime is so obvious for the ways they lash out at anybody who dare to scrutinize the Old Negro’s legal despotism.
This has to do with the thinker Rene Girard’s role of the sacrificial victim. Girard argues that practically every human community is grounded in what he calls “the scapegoating mechanism.” This is the process by which we discharge our societal tensions onto a victim whom we have decided, collectively, to punish. In this, we effectively (at least for a time) manage to bring some peace and stability to our always volatile communities — which goes a long way toward explaining why the scapegoat dynamic is so popular with governments and why it is usually given a quasi-religious sanction transforming the “man-lion” of Yaounde into a godlike figure.
The CL2p has noted plenty of time how the figure of the “opponent” plays in the sacrificial mechanism of Cameroonian’s government practice starting with the figure of the “Maquisard,” “the pushiste’” “the Anglo-fifth column,” the “eperviable” and so so on.
This desire for the scapegoat highlights an instinct for human sacrifice that is never far from the surface and that it could easily exist even alongside of tremendous cultural and technological sophistication. The sacrifice taking place in Biya’s “mouroir concentrationaire” is a consequence of Biya’s crony’s wicked forms of behavior and social organization that foreground sacrifice for quick political hit. A wicked form of behavior that begins with preventing ordinary people from exercising their first amendment right. An authoritarian mindset that makes the bed of the Biya regime and gives lip service to ideas of democracy and tolerance but not for too long as the arc of the moral universe is long but bend toward justice.