Barthélémy Dias retourne dormir ce mardi soir dans sa cellule de la prison de Rebeuss. Le tribunal des flagrants délits de Dakar lui a infligé une peine de six mois de prison ferme – le parquet réclamait deux ans – pour avoir entre autres comparé les magistrats à « des prostituées ». Des propos tenus en réaction à la condamnation, le 30 mars dernier, du maire de Dakar Khalifa Sall à cinq ans de prison pour « escroquerie aux deniers publics ».
« On va évidemment faire appel de cette décision qui n’est pas fondée, déclare à Jeune Afrique son avocat Me El Hadji Diouf. La condamnation de Barthélémy Dias est le reflet d’une démocratie malmenée, où il est interdit de penser autrement que le pouvoir. »
« Les périls qui guettent le Sénégal »
Même son de cloche du côté du député Cheikh Bamba Dieye, proche de Barthélémy Dias, qui met en garde ses pairs : « Sa condamnation, ainsi que celle de Khalifa Sall, sont autant de signes des périls qui guettent la démocratie au Sénégal. Le président Macky Sall entend être le seul candidat à l’élection de 2019. Et pour cela, il élimine systématiquement tous ses opposants. Tous les acteurs politiques sont désormais en danger. »
Le père de « Barth’ », l’ancien ministre Jean-Paul Dias, s’est également confié à Jeune Afrique sur la condamnation de son fils : « Elle est injuste et infondée en droit. Car aucun magistrat n’a porté plainte pour outrage. À l’évidence, cette condamnation démontre l’instrumentalisation de la justice par le pouvoir politique. Deux jours avant le verdict dans l’affaire Khalifa Sall, la police suivait mon fils partout où il allait. Ils cherchaient un prétexte pour l’arrêter. Voilà la vérité. »
Porte-flingue
Connu pour ses coups de sang et ses sorties au vitriol vis-à-vis de ses adversaires, Barthélémy Dias a donné le sentiment de n’avoir cure d’un nouveau séjour derrière les barreaux. Lors de son procès, le 8 avril dernier, il avait lui-même fait part de son désir de rester en prison, pour se retrouver auprès du maire de la capitale. « Si Khalifa Sall couche en prison, alors moi aussi, je suis prêt à faire don de ma liberté », avait-t-il ainsi déclaré.
Le porte-flingue de l’opposition n’en est pas à son premier séjour derrière les barreaux. Fin 2011, il n’avait pas hésité à dégainer son pistolet 9 mm, pour faire feu en direction de quelques nervis du Parti démocratique sénégalais (PDS) qui encerclaient la mairie de Mermoz-Sacré-Coeur. L’un des assaillants avait été retrouvé mort, sans qu’il soit possible d’affirmer que « Barth » ait été l’auteur du coup de feu mortel.
L’épisode lui avait valu une condamnation en 2017 à deux ans de prison, dont six mois ferme, pour coups et blessures volontaires et détention illégale d’arme – une peine alors couverte par sa détention provisoire en 2012.