Le CL2P sur les droits économiques et l’optimisme cruel
Par Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
L’article de Matteo Maillard paru dans Le Monde du 6/8/2018 et intitulé «Un rapport de pointe sur les études internationales et libérales sur l’Afrique» est un autre exemple des recherches coûteuses et convaincantes qui finiront probablement à la poubelle, comme beaucoup auparavant.
Cet article a cependant le mérite de démontrer l’arrogance épistémologique, le triomphalisme, et de l’orgueil de l’élite cosmopolite mondiale et de la nécessité d’une rupture épistémologique radicale pour capturer de nouvelles formes de réseaux et d’institutions indépendantes d’apprentissage social et d’innovation qui sont entrain d’émerger au continent africain. Ce genre de connaissance est urgent surtout à un moment où les institutions de Bretton Woods et les politiques mondiales néolibérales ne sont plus crédibles, après avoir mené à la privatisation des États et à la montée des machines de guerre transformant la politique en nécropolitique. Pour aggraver cette réalité, la montée de l’isolationnisme et du populiste néo-fasciste d’extrême droite, avec leurs politiques illibérales, ont transformé de nombreux pays en forteresse et légaliser la fermeture des frontières. En conséquence, compliquer l’hégémonie des politiques néolibérales au détriment des politiques alternatives de base.
Ainsi, la tâche la plus importante est la condition de viabilité du changement social sur un continent encore dominé par des kleptocraties capitalistes d’État.
Les organisations de droits de l’homme, telles que le CL2P, comprennent que l’économie est également un processus subjectif, d’où l’importance de comprendre comment le sujet Africain est formaté. Ceci est important pour saisir le système de (création du) désir qui soutient l’architecture de l’économie mondiale, et qui est très racialisée. Comment ces hiérarchies raciales posent la question des Africains comme sujets désirables à une époque où l’économie mondiale est dominée par l’expression des formes de « blanchite ». Ce qui explique le travail d’érudits, tels qu’Abdul Maliq Simone, sur des pays africains, tels que le Cameroun, où l’élite idiote est redevable à de grandes institutions financières et à des intérêts particuliers, comme la Françafrique, et la vanité de cette élite imbécile qui a orienté toute l’économie nationale vers l’Europe où elle s’est en partie éduquée et continue à éduquer ses enfants, en y ayant accès aux infrastructures de santé, aux biens de consommation à profusion, et en imitant le mode de vie des riches et des célébrités européennes. Le résultat de cette vision délirante de la réalité est le manque de soin pour le bien-être des Camerounais ordinaires, qui vient s’ajouter ici au traumatisme colonial récurent de l’Élite locale aliénée qui ne voit pas ses propres terres comme des espaces de (possible) décolonisation et de libération.
Cette connaissance met l’accent sur la création de valeurs. Car après toutes les privatisations et les déréglementations, on nous dit de nous prendre en main. Ainsi, la seule barrière entre nous et le succès est notre propre mentalité et vous êtes traité avec mépris lorsque vous refusez d’agir comme un sociopathe ou un psychopathe pour réussir.
De là découle l’idée que le discours dominant sur la pauvreté est erronée.
En effet le problème n’est pas que les pauvres aient de mauvaises mœurs – qu’ils sont paresseux, impulsifs et irresponsables et qu’ils n’ont aucune valeur familiale comme le laisse entendre la pensée néo-libérale à la mode- ou qu’ils n’ont pas les compétences et les références académiques nécessaires pour s’adapter à notre économie brillante du XXIe siècle. Le vraie raison est que la pauvreté est rentable. Ceci est démontré dans les travaux de Thomas Piketty et de ses collègues qui viennent de révéler que les 0,1% les plus riches du monde ont capturé autant de la richesse créée mondialement depuis les années 1980 que la moitié de la population adulte mondiale.
Par conséquent, alors que l’égalité des chances est puissante parce qu’elle fait appel à notre sentiment d’espoir, d’opportunité, et de possibilités – tout en créant les conditions nécessaires pour qu’elle se détériore: ce que le théoricien de la culture Lauren Berlant appelle « optimisme cruel ». Ces dernières années, toute une industrie de la mobilité sociale a été créée pour favoriser ces espoirs tout en travaillant contre eux sur le plan matériel.
L’universitaire Lauren Berlant a dans ce sens écrit un livre intitulé «Cruel Optimisme». Sa théorie est que l’optimisme cruel réside dans le fait qu’un fantasme sur la bonne vie empêche votre épanouissement dans la réalité. Cette sagesse doit résonner avec les gens ordinaires et la nécessité de s’attaquer à la possibilité réelle, plutôt qu’à la vie imaginaire. Ainsi, l’idée que le rêve capitaliste libéral vous empêche parfois de trouver un vrai bonheur ou un ajustement dans votre vie ou de reconnaître votre réalité.
D’où la prise de conscience que les droits de l’Homme et les droits économiques vont de paire et la nécessité de modifier les politiques pour garantir des droits fondamentaux tels que l’alphabétisation, les soins de santé, et les salaires décents.
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Porte-parole du CL2P
English version
The CL2P on Economic Rights and Cruel Optimism
By Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P
Matteo Maillard’s article in Le Monde of 8/6/2018 and titled “Un rapport pointe les failles des études internationales (et libérales) sur l’Afrique,” [Report highlights flaws in international (and liberal) studies on Africa] is another highly expensive compelling research that will probably end up in the trash like many beforehand.
That article, however, has the merit the global cosmopolitan elite’s epistemological arrogance, triumphalism and hubris and the need for a drastic epistemological rupture to capture new forms of networks and independent institutions of social learning and the significance of small but important innovations emerging from the grassroots. This is mostly urgent at a time where the institutions of Bretton Woods and neoliberal global policies are no longer credible after leading to the privatization of the state in fewer hands and the rise of war machines turning politics into necropolitics. To compound this reality, the rise of isolationism and extreme right wing neo-fascist populist with their illiberal politics turning many countries inwards and closing borders. Consequently, complicating the hegemony of neoliberal policies at the cost of grassroots political alternatives.
Thus, the most important task is the viability of social change on the continent dominated by state capitalist kleptocracies.
Human right organizations, such as the CL2P, understands that the economy is also a subjective process where the necessity to dig deep into the African’s mentality and how it is formatted. This is important to understand system of desire that sustain the architecture of the global economy which is much racialized. How these racial hierarchies pose the question of the African as desirable subjects at a time where the global economy is dominated by expressing forms of whiteness. Which explains the work of scholars, such as Abdul Maliq Simone, and African countries, such as Cameroon, where idiotic elite beholden to large financial institutions and dark special interests, such as the Francafrique, and who care only about their own sense of entitlement and vanity have tuned the entire economy towards Europe where the Cameroonian elite educate themselves and their children, access health institutions, consumer goods and imitate the lifestyle of the rich and famous.
The result of this delusional view of reality is a lack of care for the welfare of common people, in the process, an alienated local elite enacting with repetition colonial trauma and failing to see their own lands as spaces of decolonization and liberation.
This knowledge puts an emphasis on the creation of values. Because, after all the privatization and the deregulations, we are told to pull ourselves up by the bootstrap. Thus, that the only barrier between us and success is our own mentality and you get treated with contempt when you refused to act like a sociopath or a psychopath in order to succeed.
Thus, the idea that the dominant discourse on poverty is wrong. The problem isn’t that poor people have bad morals – that they’re lazy and impulsive and irresponsible and have no family values – or that they lack the skills and smarts to fit in with our shiny 21st-century economy. The real problem is that poverty is profitable. This is compounded by the work of Thomas Piketty and colleagues who has just revealed that the world’s richest 0.1% has captured as much of the wealth created globally since the 1980s as half the world’s adult population. Hence, while Equality of opportunity is potent because it appeals to our sense of hope, opportunity and possibility – while creating the conditions for it to worsen: what the cultural theorist Lauren Berlant calls “cruel optimism”. In recent years, an entire social mobility industry has been built up to foster these hopes while working against them at a material level.
The academic Lauren Berlant, consequently, wrote a book called Cruel Optimism. Her theory is that cruel optimism is when a fantasy you have about the good life is impeding your flourishing in reality. This wisdom must resonate with ordinary people and the necessity to tackle actual possibility, instead of a fantasy life. Thus, the idea that holding to liberal capitalist dream is sometimes preventing you from finding real happiness or adjustment in your life, or acknowledging your reality.
Hence, the realization that human rights and economic rights go hand in hand and the necessity of policy changes to ensure basic rights such as literacy, healthcare and living wages.
Olivier J. Tchouaffe, PhD, Spokesman of the CL2P