Macron-BIYA: Les brillants acteurs de la Francafrique et de la politique claustropolitaine
La prochaine visite déjà annoncée de Paul Biya en France en novembre 2018 fait partie d’un rituel cynique consistant à recevoir l’approbation du président français Emmanuel Macron avant l’intronisation présidentielle programmée du despote camerounais le 7 octobre 2018. Il est difficile d’envisager un président Buhari du Nigéria, Kenyatta du Kenya, ou Ramaphosa d’Afriique du Sud s’envoler de la sorte à Londres pour recevoir une onction électorale et une légitimisation politique du Premier ministre britannique ou de la reine d’Angleterre. Mais Macron, Biya et la Françafrique n’ont absolument pas peur de prendre continuellement les Camerounais pour des imbéciles.
La vraie réponse est que cette visite a davantage à voir et à afficher Macron et Biya comme des acteurs brillants de la Francafrique. Ils sont si brillants qu’ils brûlent tout sur leur passage. Aussi, de tels arrangements anachroniques fonctionnent à merveille avec les deux dirigeants. En effet Macron conserve tous les privilèges de la France et des pratiques de corruption dans ses bastions traditionnelles en Afrique francophone, tandis que pour Biya,ce type de stratégie obsolète d’acteur brillant voulu incontournable de la Françafrique sert avant tout à satisfaire sa quête narcissique, sociopathe, et désespérée d’une immortalité obscène au pouvoir.
Ce qui dans la pratique signifie que rien ne changera en substance pour les Camerounais ordinaires, qui ont déjà subi près de soixante (60) ans de pouvoir absolu UNC /RDPC (parti-État au pouvoir depuis l’indépendance). Alors que dans une démocratie saine, il faut précisément un changement de gouvernement de temps en temps. Car les partis au pouvoir doivent de temps en temps accepter rejoindre l’opposition pour se renouveler les idées et repenser leurs projets. Et si un parti politique devait et aurait depuis dû le faire, c’est bien le Rassemblement dit Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC) de Paul Biya. Mais, bien évidemment pour lui il n’en est pas question, parce qu’ils n’oseront pas renoncer au pouvoir de peur que leur corruption et abus multiples ne soient pas seulement stoppés, mais également exposés à la face du monde, puis poursuivis en justice.
En conséquence, derrière ces brillants acteurs de la Francafrique se cache une vieille institution paternaliste, raciste, et foncièrement prédatrice qui maintient l’Afrique francophone dans un état de dépendance néocoloniale, où l’indépendance a toujours signifié uniquement des changements dans les modes de domination. En effet ce n’était pas seulement la France contre l’Afrique, la France contre le Cameroun, la colonisation était également possible et continue de l’être en raison des complicités locales, des institutions de coercition et de violence étatiques ancrées dans la Francafrique. Il y a sur ce plan une grande symbiose entre les élites politiques africaines francophones et Françaises. C’est un mélange de beaucoup de choses: vieux souvenirs, intérêts matériels partagés, délires de grandeur, commérages et intrigues, peccadilles sexuelles, cupidité etc… À tel point que nous avons même vu une ancienne candidate socialiste à la présidentielle, Ségolène Royal pour ne pas la nommer, revêtue au Cameroun sourire aux lèves de la tenue du RDPC de Paul Biya, puis affirmer avoir été «piégée» une fois de retour à Paris.
En réalité ce type de pratique définit le pouvoir malheureusement qu’en termes négatifs, en tant que forme de domination, mais il existe pourtant d’autres formes de pouvoir que nous définissons comme étant la capacité d’agir et de changer les anciennes pratiques politiques par la mise en place de nouvelles connaissances, relations, et partenariats productifs. Dans une approche plus approfondie il s’agit notamment de comprendre la manière dont le pouvoir peut aussi être lié aux modes de rationalité et à la création de sens; comment nous pouvons échapper à notre réalité claustrophobe de la Francafrique, en privilégiant ou mettant en avant de nouvelles façons de penser et de vivre ensemble. Et c’est pour cela que le CL2P milite pour une convention constitutionnelle qui serait plus appropriée, que ces parodies d’élections successives depuis 36 ans qui en plus coûtent excessivement chères car complètement corrompues.
Autrement et si nous n’y prenons garde, des questions telles que l’inégalité, l’éducation, la santé, etc., seront encore et toujours résolues par des sociétés secrètes, non élues, et leurs amis qui continueront de nous imposer des politiques mortelles telles que l’ajustement structurel, l’imposture d’aide au développement, et une économie de dettes permanentes. Nous assisterons ainsi davantage au passage d’un ‘État civilisé avec des projets valorisants pour l’être humain tels que ceux inspirés par l’État providence, à un État carcéral permanent, transformant l’État uniquement en un appareil militaire et de sécurité efficace qui criminalise des segments particuliers de la population comme les Anglophones et les soit disant «opposants» contre le régime en place.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
English version
Macron-BIya: The Shiny Object of the Francafrique and Escaping Claustropolitan Politics
Paul Biya’s upcoming visit to France is not lost on anyone as an endorsement by the president Emmanuel Macron before his political coronation on October 7, 2018. It is hard to see a president Buhari, Kenyatta or Ramaphosa doing the same by flying to London to receive electoral sacrament and validation from the British prime minister or the Queen but Macron, Biya and the Francafrique are not afraid to take Cameroonians for fools.
The real answer is that this visit has to do with Macron and Biya as the shiny object of the Francafrique. They are so shiny that they burn everything on their way. Thus, such arrangements work well for both leaders. Macron gets to keep all of France’s privileges and exploitative rent seeking practices in his traditional preserve in French Africa while for Biya, this kind of shiny-object strategy, serves to indulge his desperate narcissistic and sociopathic quest for immortality which in practice means nothing will change for ordinary Cameroonians who have already endured close to sixty years of CNU/CPDM absolute power.
In a healthy democracy there comes a time when you need a change of Government and governing parties need to go into Opposition to renew themselves and rethink. If any party ever needed to do that it is the CPDM but of course they dare not give up power for fear that their corruption and criminal abuse of power would not only be stopped but would then also be exposed and prosecuted.
Behind the shiny object of The Francafrique, consequently, lies a paternalistic racist and predatory institution keeping French Africa in a state of neocolonial dependency where the independence simply meant changes in modes of domination. Therefore, how the political act of the independence is not enough to eradicate because colonization was not only France vs Africa, France vs Cameroon but also colonization was enabled also because of local complicity and institutions of coercion and violence embedded in the Francafrique. Indeed, there is a high degree of symbiosis between French and Francophone African political elites. It is a mixture of many things: old memories, shared material interests, delusions of grandeur, gossip, sexual peccadilloes…etc to the point we even witness the former presidential candidate, Segolene Royal, dressed in the attire of Paul Biya’s CPDM.
This kind of practice only defines power in negative terms, and as a form of domination, but there are also other forms of power that we define as agency – the ability to act and change old political practices and knowledge formatting though new practices and consciousness. At a deeper level, how power is tied to modes of rationalities and sense making, thus, how to escape from our claustrophobic reality of the Francafrique requires new modes of thinking what Achille Mbembe calls finding our own center and this is why the CL2P believes that a constitutional convention would be more appropriate than elections in Cameroon.
Otherwise, issues such as inequality, education, health and so on will always be decided by unelected corporate power and their stooges, which will continue to force us into deadly policies such as the Structural Adjustment and an economy of permanent debt and the legalization of corporate theft. More a shift from the state into disciplinary projects such as the move from the welfare state into a carceral state turning the state into an effective military and security apparatus that criminalize particular segments of the population such as the Anglophones and people perceived to be disloyal to the state.
The Committee For The Release of Political Prisoners -CL2P