Congo-Brazzaville: un opposant exilé en France cible d’une tentative d’assassinat
Selon le journal Le Monde, l’ancien général congolais Ferdinand Mbaou, exilé en France et détracteur de longue date du régime de Denis Sassou-Nguesso, aurait échappé à un complot visant à l’assassiner.
Deux ressortissants français, présentés comme d’anciens agents de la DGSE, les services de renseignement extérieur français, ont été inculpés par la justice française mercredi 12 septembre. Accusés « d’association de malfaiteurs » et de « détention d’explosif », ils ont été placés sous contrôle judiciaire. Un troisième homme a quant à lui été placé sous le statut de témoin assisté.
Début septembre, les trois hommes ont été arrêtés en Corse, en Haute-Savoie (sud-est) et à Orléans (centre), a précisé une source proche du dossier à l’AFP. La justice leur reproche d’avoir projeté d’assassiner « dans les prochaines semaines » Ferdinand Mbaou, un opposant au régime du président congolais Denis Sassou-Nguesso. En garde à vue, tous avaient nié les faits. Entendus par le parquet, ils ont donné le détail de leurs entretiens, ajoutant que l’élimination était prévue avant la fin de l’année.
A l’origine de l’information judiciaire, un entretien entre deux agents du renseignement intérieur et Daniel Forestier, ancien membre de la DGSE. Les hommes se rencontrent à deux reprises à Annemasse, en Haute-Savoie. Lors de ces entrevues, Daniel Forestier affirme être à la tête d’un petit groupe constitué pour éliminer Ferdinand Mbaou. Des repérages ont déjà été effectués vers son domicile en région parisienne.
Pas surpris
Ferdinand Mbaou, cible présumée de ce projet d’exécution, avait déjà été victime d’une tentative d’assassinat en 2015. Joint par RFI, il affirme ne pas avoir été directement informé, mais il n’est pas surpris. « Il y a trois ans à peu près, en 2015, j’ai été victime et j’ai échappé à une tentative d’assassinat. L’enquête suit son cours. Je suis un résistant au pouvoir putschiste de Brazzaville et je pense qu’il me prend pour l’adversaire numéro un », avance-t-il.
Ferdinand Mbaou ne se dit pas davantage surpris par le fait que les hommes soupçonnés d’avoir voulu l’assassiner puissent être des anciens de la DGSE. « Ce que je sais, c’est que l’homme fort, comme on l’appelle à Brazzaville, utilise des nationaux, des étrangers pour nous pourchasser et donc ce n’est pas la première fois qu’il l’aura fait. Nous sommes plutôt heureux que les services de sécurité français aient mis la main sur ces gens-là. C’est une très bonne chose pour nous. Nous rendons hommage aux services de sécurité français », a salué l’opposant congolais.
Les autorités françaises n’ont toujours pas commenté cette information. De son côté, interrogé par RFI, Thierry Mungalla, porte-parole du gouvernement congolais, n’a pas souhaité commenter. « Cette affaire se situe en France et implique apparemment des individus français », a-t-il seulement déclaré par SMS.
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Le despote gabonais aurait mis à contribution d’anciens agents de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), le service de renseignement français, et un réseau mafieux corse, pour tenter d’éliminer certains de ses plus farouches adversaires vivant en exil.
Anna VERDOT
LE dictateur congolais, Denis Sassou Nguesso, n’est pas finalement le seul dirigeant africain à recourir aux services d’anciens agents de la DGSE, reconvertis en mercenaires. Son homologue gabonais, Ali Bongo, qui se maintient au pouvoir par la force, aurait, lui aussi, recruté des barbouzes et mis à contribution un réseau mafieux corse pour tenter d’éliminer physiquement ses plus farouches opposants en exil.
Selon nos informations, le dictateur gabonais aurait invité à Libreville, en mars 2018, trois anciens agents du service de renseignement français pour mettre au point une stratégie visant à éliminer, par divers moyens, certaines figures de proue de la contestation de son régime. « Il a mûri cette idée au sortir de son séjour à Paris au sommet sur le climat au cours duquel il avait été humilié par la diaspora. Il veut à tout prix se venger de cet affront », à expliqué une source proche d’un des barbouzes recrutés par le régime de Libreville.
Après une entrevue de dix-sept minutes avec Ali Bongo, a confié la source, une réunion aux allures d’un brainstorming, présidée par Frédéric Bongo, frère cadet du despote gabonais et patron du service de renseignement, s’est tenue à la présidence de la République. « La rencontre était élargie au commandant Stéphane Chiron, militaire français, ainsi qu’à Emvahou, Anvane et Oyini », a relevé une source proche du service de renseignement du Gabon.
Un plan aurait été mis en place pour éliminer certains opposants en exil. Il s’agit, a précisé la source, de Jonas Moulenda, Désiré Ename, Marceau Malekou, Alfred Nguia Banda, Suzanne Barat, Stéphane Nzeng, Jean-Pierre Lemboumba Lepandou, Fabien Meré, Jean-Jacques Burdette, Jean-Aimé Mouketou et Alain Ogouliguendé, etc. Tout comme les activistes Malcom du Mapane, Pula Odjia, L’ingouvernabilité totale, etc. « La mission consisterait prioritairement à assassiner l’un d’eux pour répandre la peur et démobiliser la diaspora. Le reste de la mission, a souligné la source, se fera par empoisonnement pour éviter d’attirer l’attention de la communauté internationale », a ajouté la source.
Seydou Kane aurait sorti 500 millions de F CFA pour le déploiement des barbouzes sur le terrain
Assassiner les hommes libres au service de leur pays, empoisonner des insoumis en passant par des proches insoupçonnables et frapper d’ostracisme les moins malléables, telle est donc la mission que le pouvoir de Libreville a confiée aux barbouzes français et à un réseau corse, après l’humiliation du d’Ali Bongo à Paris. Un accent particulier est mis sur les leaders de la résistance, qui entretiennent la flamme de la révolution.
D’après une autre source, Ali Bongo a mis à contribution son ami Seydou Kane, d’origine malienne, pour régler les aspects financiers du plan machiavélique. Le ressortissant malien est d’ailleurs surnommé « L’international », pour son rôle de financement de certaines opérations mafieuses à l’étranger par le truchement de ses nombreuses sociétés écran. Pour le premier déploiement des barbouzes en France, il aurait sorti 500 millions de F CFA. « Il a toujours des liquidités. C’est lui que le patron (Ali Bongo, Ndlr)sollicite pour des opérations financières sans traçabilité », a expliqué un conseiller du tyran gabonais.
A en croire la même source, les mercenaires français – qui ne connaissent pas leurs cibles – sont assistés d’un certain Adan Babagana, beau-frère d’Ali Bongo, et d’autres sicaires du régime parmi lesquels deux sous-officiers, un homme et une femme. L’un d’eux aurait même demandé l’asile politique, après avoir infiltré la diaspora. Se passant pour un pauvre hère , il solliciterait souvent le logis auprès de certains membres de la résistance pour mieux connaître leurs domiciles respectifs. « C’est l’une des stratégies qui lui a été conseillée pour infiltrer les opposants en France », dénonce la source.
S’il arrivait qu’un opposant soit assassiné, la justice française saura vers qui se tourner
Selon un agent du service de renseignement du Gabon, les barbouzes ont mis les bouchées doubles ces derniers mois pour éliminer physiquement Jonas Moulenda. Ils l’auraient raté de justesse en juin dernier devant un magasin dans son ancienne ville de résidence aux Yvelines. « Ce jour-là, ils voulaient l’assassiner en simulant un braquage qui aura mal tourné. Il sortait du magasin Coco Chanel avec deux sacs blancs à la main. Ce qui l’a sauvé, c’était la présence sur les environs de la police. M. Moulenda est monté dans sa voiture puis il a démarré sans se douter des menaces qui pesaient sur lui. Il faut dire que le plan Vigipirate en vigueur dans la région parisienne sauve beaucoup de vies », a conclu la source.