CAMEROUN: POURQUOI NOUS CONSIDÉRONS DÉSORMAIS LE JOURNALISTE ANCIEN DG DE LA CRTV, AMADOU VAMOULKÉ, COMME UN PRISONNIER POLITIQUE?
M. Amadou Vamoulké, journaliste et ancien DG de la Cameroon Radio and Television (CRTV), est un homme dont la réputation d’intégrité et d’honnêteté est établie au Cameroun mais aussi à l’international où il bénéficie de de nombreux soutiens dans le cadre d’une campagne de libération associant des figures aussi prestigieuses que M. Hervé Bourges ainsi que les dirigeants actuels ou anciens de TV5 Monde, Radio Canada, Radio France, URTI, RFP et d’autres organismes audiovisuels publics africains (Nigéria, Bénin, Burundi, Tunisie, Tchad, …). Même des personnalités camerounaises, bravant parfois leur devoir de réserve et les représailles officielles (ambassadeurs, magistrats, juristes, banquiers, entrepreneurs, ingénieurs, comédiens, journalistes, …) ont signé la pétition en ligne puis témoigné ouvertement en faveur de sa libération.
C’est dire si notre organisation a pris le temps et le recul nécessaires pour parvenir à la conclusion que M. Amadou Vamouké est bel et bien un prisonnier politique dans le contexte de négation systématique et d’instrumentation récurrente de la justice à des fins politiques dans ce pays.
Pourquoi considérons-nous M. Amadou Vamouké comme un prisonnier politique?
M. Vamoulké est «injustement emprisonné depuis le 29 juillet 2016 à la Prison Centrale de Kondengui à Yaoundé (Cameroun), principalement pour des faits supposés de malversation qui n’ont rien à voir avec de l’enrichissement personnel». À ce jour sa situation correspond principalement à deux des critères objectifs édictés par notre organisation au moment de sa création (
1-Lapersonne soutenue a été
L’ancien directeur général de la CRTV, arrêté le 29 juillet 2016 est soutenu par le Comité international pour la libération et la réhabilitation d’Amadou Vamoulké (CIRLAV), l’Alliance internationale pour la défense des lois et des libertés (AIDLL) et le Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac), entre-autres . Tous ces organismes considèrent Amadou Vamoulké comme un prisonnier politique, mieux, un otage politique. Journaliste, Amadou Vamoulké bénéficie également du soutien de Reporters Sans Frontières (RSF) qui demande sa libération immédiate.
2-Le justiciable fait face à
L’ancien directeur général de la CRTV est au centre de deux affaires : l’une dans laquelle il est accusé du détournement de près de 3 milliards de F CFA. Depuis fin août 2017 que le procès s’est ouvert, la cause a déjà fait l’objet d’une dizaine de reports devant le Tribunal Criminel Spécial (TCS) à Yaoundé). L’autre contentieux porte sur une affaire décousue de détournement de 25 milliards de F CFA. Amadou Vamoulké est lié sur cette accusation à 8 autres ex-cadres de la CRTV détenu depuis le 8 février 2018 à la prison centrale de Kondengui.
Curieusement et comme le souligne Reporters Sans Frontières (RSF) dans son communiqué du 23 novembre 2018, deux ans et quatre mois après l’arrestation de l’ancien dirigeant de la Cameroon Radio Television (CRTV), aucun élément probant n’a été fourni par l’avocat général pour justifier les poursuites et son maintien en détention provisoire. Vamoulké est poursuivi pour détournement de fonds publics, non pas à des fins personnels, mais au profit de la chaîne de télévision publique qu’il a dirigée entre 2005 et 2016. Il ne s’est jamais vu opposé aucun rapport d’audit, le moindre témoin qui puissent appuyer ces accusations durant les 14 audiences qui se sont tenues à ce jour et qui n’ont duré qu’une poignée de minutes.
Nous retrouvons là la matérialisation de la faillite du système judiciaire camerounais que nous décrions depuis deux décennies dans une certaine indifférence générale. En effet, dans une démocratie, la justice est une grande institution qui joue à la fois le rôle de contre-pouvoir et de régulation sociale. Instrumentalisée, la justice camerounaise a failli à cette mission essentielle. Elle est devenue un instrument de répression politique. Les règles de la procédure pénale universellement reconnues et incluses dans la loi camerounaise ont été régulièrement bafouées et sans états d’âme. Dans le cas Vamoulké on est clairement face aux pratiques maintes fois dénoncées pour les autres prisonniers politiques, dont
- La pratique de la disjonction de procédure par les juges d’instruction. Cela leur permet de saucissonner un dossier pour le renvoyer par petits bouts devant le tribunal spécial, ici le Tribunal Criminel Spécial. Résultat, le justiciable se trouve confronté à une multitude de procès programmés de manière à le maintenir indéfiniment en détention.
- La détention qui devient la règle et non ce qu’elle doit être, une exception, et se double d’un refus systématique de mise en liberté provisoire.
- Les délais de détention préventive et de jugement excessivement longs, la multiplication des renvois qui font durer les procès sur plusieurs années.
- Une théâtralisation à outrance de l’arrestation puis de la détention avec le déploiement de dizaines de policiers et devant les caméras de la télévision, puis la violation de l’intimité carcérale du prévenu dans le seul et unique but de l’humilier.
- L’institutionnalisation d’une véritable présomption de culpabilité directement inspirée et orchestrée par le pouvoir exécutif.
C’est pourquoi nous exigeons purement et simplement la libération immédiate du journaliste ancien directeur général de la Cameroon Radio Television (CRTV), Amadou Vamoulké, qui est un prisonnier politique.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques -CL2P
Paris le 29 décembre 2018