Détenue depuis le 11 janvier 2010 dans des conditions particulièrement difficiles à la prison centrale de Kondengui, à Yaoundé, l’état de santé de Me Yen Eyoum s’est d’ailleurs considérablement dégradé. Elle a été arrêtée dans le cadre de la campagne de lutte anti-corruption lancée en 2006 par le gouvernement camerounais, dite opération «Epervier».
À l’époque, l’avocate défendait les intérêts de l’État camerounais dans un contentieux contre la Société générale de banques au Cameroun et avait reçu un mandat pour recouvrer une partie de la somme disputée. Elle était accusée d’avoir détourné une somme de 1,077 milliard de francs CFA (1,5 million d’euros). Selon la justice camerounaise, elle aurait détourné ladite somme avec le ministre des Finances de l’époque, Polycarpe Abah Abah, et celui du Budget, tous deux incarcérés depuis. Pour les avocats de Me Yen Eyoum, elle aurait prélevé en accord avec le ministre des Finances ses honoraires, impayés depuis plusieurs années.
Une affaire qui rappelle le cas de Michel Thierry Atangana pour lequel une conférence a été organisée à la Maison du barreau le 1er avril 2015. Michel Thierry Atangana, franco-camerounais lui aussi, détient le record mondial de la plus longue détention arbitraire à l’étranger après avoir été détenu arbitrairement pendant 17 ans au Cameroun, dans le sous-sol du Secrétariat d’État à la Défense. Cette conférence avait notamment permis de mettre en lumière le travail formidable du Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies. Ce mécanisme créé par l’ancienne Commission des droits de l’homme des Nations Unies en 1991 reste mal connu. Il a pourtant contribué à la libération de M. Atangana le 24 février 2014 en reconnaissant officiellement qu’il était arbitrairement détenu.
L’avocate de Me Yen Eyoum a d’ailleurs saisi le groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire. Ce dernier aurait déjà commencé à adresser des questions au gouvernement camerounais. Ses avocats avaient également déposé plainte en août 2011 devant le juge d’instruction de Paris pour détention arbitraire, tortures et actes de barbarie. La Cour d’appel de Paris a toutefois refusé au juge d’instruction la possibilité de poursuivre son information dans cette affaire.
Le barreau de Paris suit depuis quelques années le cas de cette consœur. Il s’est notamment mobilisé pour elle en adressant aux autorités camerounaises des courriers au soutien de Me Eyoum. Le barreau de Paris entend rester particulièrement attentif à la suite de cette affaire.
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