Avec ou grâce à la globalisation économique, l’Afrique et singulièrement le Cameroun, a évidemment besoin d’investissements directs. Ceux du groupe Bolloré seront toujours les bienvenus, à l’instar de tous les autres (Chinois, américains, Turcs, Brésiliens et j’en passe).
La vraie critique que nombre d’entre-nous pouvons faire à ce groupe, qui n’est nullement une critique personnelle encore moins contre la France, concerne essentiellement ses méthodes (assez bien relatées dans ce reportage de France 2 ), qu’il emploie notamment pour s’imposer en Afrique noire francophone.
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Au-delà M. Bolloré est un de ces managers français dont le dynamisme, la vision, et le flair sans pareil forcent le respect. Une partie de son succès et de son immense fortune tient indéniablement d’abord à cela.
Pourvu qu’il comprenne et entérine enfin que, y compris en Afrique noire, il y a des méthodes inhumaines et des connivences politiques qui ne sont plus acceptables.
JDE
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Quand François Hollande vole au secours de France 2 contre Bolloré
Attaquée en diffamation par l’industriel breton, la chaîne publique a reçu le soutien de l’ancien Président de la République, qui a confirmé les informations de son reportage.
Ceux qui s’attendaient à voir des stars ont été déçus. Ni le plaignant Vincent Bolloré, ni la prévenue Delphine Ernotte (jugée en tant que directrice de la publication) ne se sont déplacés à leur procès, qui s’est tenu mardi 3 avril au tribunal de grande instance de Nanterre. Seule Elise Lucet est venue assister au début des débats…
Ce procès résulte de la plainte en diffamation déposée par l’industriel contre son portrait diffusé le 7 avril 2016 dans l’émission Complément d’enquête sur France 2, reportage qui a reçu le prestigieux prix Albert Londres.
Procédure bâillon
Pour Jean Castelain, l’avocat de France 2, c’est une procédure “pour faire pression, pour faire peur, pour inciter les journalistes à ne pas enquêter. Car Vincent Bolloré poursuit systématiquement en justice les journalistes qui s’attaquent à ses affaires africaines”. Sa consoeur Juliette Félix abonde: “c’est une caricature de procédure bâillon dont le seul objectif est de faire peur et de faire taire les journalistes qui enquêtent notamment sur ses affaires africaines”.
Cité comme témoin, le journaliste de Ouest France Patrice Moyon explique que son reportage il a atténué ce qu’il avait vu en Afrique, car “on est très observé quand on écrit sur le groupe Bolloré à Ouest France…”
De même, l’auteur du reportage de France 2, Tristan Waleckx, explique avoir pesé chaque mot au trébuchet: “on savait qu’on pouvait être attaqué si on déviait d’un iota. On sait que Vincent Bolloré est très procédurier, même s’il retire souvent sa plainte juste avant l’audience”. Quant au fait d’être jugé pour diffamation, “c’est pénible et éprouvant, ça m’épuise. Ca arrive à vous polluer la tête même quand on sait qu’on a raison”.
“Pire que du Cash investigation“
En face, Olivier Baratelli, avocat historique de Vincent Bolloré, relativise: “j’ai créé une alerte Google pour recevoir tout ce qui paraît sur Bolloré. Je laisse passer plein de propos diffamatoires. J’ai seulement engagé 16 procédures en vingt ans, soit moins d’une par an. Vincent Bolloré me laisse faire. Je choisis d’attaquer tel ou tel propos quand les bornes sont dépassées”.
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Ce que France 2 a fait selon lui, avec cette “charge hallucinante”, ces termes “inacceptables et injurieux”, cette “vision colonialiste”, qui est une “insulte à l’Afrique”, réalisée par un journaliste “tout en nuisances, emprunt d’une malhonnêteté viscérale”, dont “le seul objectif est d’égratigner Vincent Bolloré, de lui faire mal”. Bref, “c’est pire que du Cash investigation“, ce qui dans sa bouche n’est pas un compliment…
François Hollande fournit une attestation
Sur le fond, Vincent Bolloré juge seulement diffamatoires les 10 minutes du reportage consacrées à ses activités africaines, notamment l’attribution en 2015 d’une concession pour exploiter le port de Kribi au Cameroun.
Sur ce dernier point, le reportage affirme que l’offre du consortium mené par le groupe Bolloré est d’abord écartée par une commission d’experts techniques, mais finit par l’emporter grâce à l’intervention du président François Hollande, qui rencontre le président camerounais Paul Biya juste avant cette attribution.
Pour l’avocat de Bolloré, “le terme de corruption est à tout le moins suggéré. François Hollande qui aide Vincent Bolloré à corrompre le gouvernement camerounais, c’est tellement invraisemblable, c’est absurde!”
En face, le journaliste de France 2 assure n’avoir jamais parlé de corruption, mais uniquement de “jeux d’influence” et de “diplomatie économique”. Surtout, il fournit une attestation de l’ancien Président de la République. “Dans cette attestation, François Hollande dit: ‘oui, bien sûr, j’ai évoqué le dossier, j’en ai parlé personnellement à Paul Biya'”, résume l’avocate de France 2.
Dans le reportage, le journaliste résume l’affaire au moyen d’une question: “Vincent Bolloré bénéficierait-il de passe-droits au nom des intérêts français?”. Intervenant en fin d’audience, le procureur a estimé que cette phrase, “un peu plus imprudente” que les autres, “constitue une diffamation”, qui pourrait toutefois bénéficier de l’excuse de la bonne foi du journaliste. Toutefois, le procureur a refusé de prendre clairement parti, ne requérant ni relaxe ni condamnation.
L’âge des travailleurs
En revanche, le procureur a jugé non diffamatoires les autres passages attaqués par Vincent Bolloré concernant la Socapalm, société produisant de l’huile de palme au Cameroun dont le groupe Bolloré est actionnaire. De longs débats ont eu lieu sur la palmeraie filmée dans le reportage et notamment sur le travail de mineurs. France 2 a fait citer quatre témoins qui ont tous confirmé y avoir vu travailler de nombreux mineurs. En face, le président de la Socapalm a assuré qu’aucun de ses salariés n’était mineur. Mais les employés directs de la Socapalm ne représentent qu’une moitié de l’effectif travaillant dans la palmeraie, l’autre étant constituée d’intérimaires ou de sous-traitants.
Quant au travailleur mineur qui témoigne dans le reportage, Guillaume Ebo Dipanda, son âge réel semble avoir été enfin éclairci. Lors du tournage, il n’avait pas 14 ans (comme l’indique le reportage), ni 20 ans (comme l’assure un constat d’huissier exhibé par Bolloré), mais 17 ans (à en croire un acte d’état civil qu’il a fourni dans une plainte en diffamation déposée en France contre Bolloré).
Le tribunal rendra son verdict dans deux mois dans cette affaire où Bolloré réclame 450.000 euros de dommages. Pour mémoire, il a engagé une deuxième procédure en diffamation au Cameroun, et une troisième procédure pour “dénigrement” devant le tribunal de commerce de Paris, où il réclame 50 millions d’euros de dommages…