Ça Suffit: Prisonniers politiques, Violence et Dette éthique
Dans la dernière lettre à ses partisans, le Pr. Maurice Kamto principal opposant camerounais en détention arbitraire insiste sur le rôle des mères et des êtres chers des prisonniers politiques, qui supportent également le fardeau de leurs proches incarcérés injustement avec des peines sévères infligées par un pouvoir judiciaire qui n’agit jamais indépendamment des considérations politiques comme il se doit. Ce genre de despotisme légal est basé sur la vengeance et la mentalité sociopathique du « Nous contre Eux ».
En effet, l’exigence de vengeance fait partie de la culture juridique du régime de Biya. Aussi, pour aspirer à une vraie justice, dans ces cas, elle doit aller au-delà de la peine pour impliquer des pratiques de restauration et de réhabilitation de toutes les personnes abusées. Car au-delà du traitement injuste et de la déshumanisation que peuvent subir directement les prisonniers politiques, leurs familles et leurs proches subissent également d’autres préjudices, en particulier lorsque ces victimes et des institutions de défense des droits humains, telle que le CL2P, ne parviennent pas à infléchir la culture du crime politique ou ne peuvent pas être entendus par un gouvernement autocratique qui nie en permanence les accusations sur les atrocités ainsi infligées à ses opposants désignés ou assumés. Par ricochet cette négation officielle interdit formellement aux victimes de revendiquer toute forme de réparation, simplement ce qui leur est dû pour avoir souffert dans leurs chairs des injustices et sévices commises par le régime Biya.
Évidemment, cette situation a des répercussions sur la façon dont les gens ordinaires traitent et repensent notre compréhension de la responsabilité du préjudice, le travail d’évaluation des dommages causés, le travail de réhabilitation, le rôle de la réparation et de la justice restorative, puis la manière dont nous sommes moralement structurés pour être à même de comprendre puis de nous efforcer de guérir des actes injustes quand nous les avons subis, même dans des cas d’atrocités de masse comme celles encours au Cameroun anglophone. D’où la nécessité de se concentrer sur les pratiques d’audience et de compréhension en matière de justice. En cela, il est nécessaire de réfléchir aux notions de ressentiment et au rôle de la dette éthique, en particulier la manière dont cela affecte l’impact du travail de réparation du préjudice.
Voilà pourquoi il est important d’analyser comment les guerres de représailles peuvent se perpétuer indéfiniment, y compris par les personnes ayant l’intention d’aider et de changer ces situations toxiques. Comme le préconise fermement le CL2P, la nécessité d’un travail de réparation par le biais de la vérité et de la réconciliation permet de remédier à ces traumatismes. Ainsi, il est nécessaire que les institutions conçues pour les comprendre résolvent ce qui est brisé et réunissent les conditions dans lesquelles les pratiques de guérison et de pardon ont un sens. D’où l’importance de l’écoute pour réunir les conditions propices au rétablissement de la confiance, de la guérison et du pardon. En bref, comment cette pratique d’écoute rend possible des actes d’égalité réparatrice, qui n’auraient jamais dû être violée.
Ici, intervient l’introduction de la notion de complicité active et passive de tous, de responsabilité collective, que nous l’aimons ou pas.
Nous sommes en effet tous complices à des degrés divers de la culture de la violence de Biya au Cameroun, parce que nous refusons tous de défendre les sans voix et les victimes de la violence, pour protéger notre illusion de sûreté et de sécurité.
Voilà pourquoi l’introduction des notions de temporalité s’avère nécessaire, où pour que nous puissions tous aller de l’avant, il faut restituer le passé au passé, ce qui ouvre des possibilités pour l’avenir. Nous aboutirons alors à une justice réelle et durable nous obligeant tous à assumer notre part de responsabilités à travers le mantra « Ça Suffit », car une société de l’après Biya ne peut être identique à une société de l’avant Biya. Avec au moins le bénéfice que cette justice réparatrice est centrée sur les besoins réels des victimes, sans pour autant transformer les auteurs en parias.
Le Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P
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English version
Never Again: Political Prisoners, Violence and Ethical Debt
In his recent letter to his partisans, Pr. Maurice Kamto emphasizes the role of mothers and the loved ones of the political prisoners who also bear the burden of their loved ones being unfairly incarcerated with harsh punishments handed out by a judiciary not acting independently from political concerns, as it ought to be. This kind of legal despotism runs on revenge and the sociopathic us versus them mentality. Demanding revenge is part of the Biya’s regime legal culture. Therefore, how true justice, in that case, must go beyond punishment to involve restoration and healing for all involved.
Hence, beyond the unjust treatment and deshumanization political prisoners can experience, their families and loved ones can also experience further harm, especially, when these individuals and human rights institutions such as the CL2P, are struggling or cannot heard by an autocratic government which continuously denies claims about the atrocities that they suffered and what they are owed for having suffered.
Evidently, this situation has ramification for the ways in which ordinary people process and rethink, how we understand responsibility for harm, the work of assessing the damages done, the role of retribution in repair, and how we are constituted as subjects such that we are capable of striving to undo unjust deeds, even mass atrocities. Hence, the need to focus on hearing and what practices of hearing justice demands. In this, the necessity to think about notions of resentment and the role of ethical debt, particularly, the way that affects impact the work of recovery from harm.
In this, the importance to analyze how the ways battles for retribution can be inflicted, even by people with intentions to help and change the toxic situations. As the CL2P advocated strongly, the need for reparative work through truth and reconciliation to heal from these toxic situations. Thus, the needs for institutions designed to understand these traumas to fix what is broken and put together the conditions where practices of healing and forgiveness make sense. Thus, the importance of listening in order to put together the conditions where practices of reestablishing trust, healing and forgiveness make sense. In short, how this practice of listening makes possible acts of restorative equality, which should have never, be stolen.
Here, the introduction of notion of complicity and how, we like or not, are all complicit of Biya’s culture of violence in Cameroon because we are all refusing to stand up for the voiceless and the victims of violence in order to protect an illusory sense of safety and security.
More, the introduction of notions of temporality where in order to all move forward, the past has to be given back to the past which open up possibilities for the future. Thus, how a real and sustaining justice required us all to take our share of responsibilities through the mantra of “never again” because a society after Biya cannot be the same as a society before Biya with the benefit that restorative justice is centered on a victim’s needs, without turning perpetrators into pariahs.
The Committee For The Release of Political Prisoners – CL2P