Le verdict a été rendu hier au TCS après deux (02) années d’une imposture judiciaire.
Il aura fallu environ deux heures de temps au président Yap Abdou, à la tête de la collégialité des juges, pour lire la déclaration de culpabilité du procès, ministère public, État du Cameroun, Sodécoton contre Iya Mohammed, Christian Clavier, Minlend Jérôme, Baygon Christophe, Kapténé Pierre, Mahamat Karagama. Pour détournement de fonds, détournement en coaction de deniers publics à hauteur de près de 12.180.092.442 Fcfa.
Lorsque les juges font leur entrée dans la salle d’audience No1 du Tribunal criminel spécial, en cette mi-journée du 03 septembre 2015, celle-ci a fait son plein d’œuf et quelques personnes sont à l’extérieur. Le président de la collégialité, Yap Abdou prend aussitôt la parole, pour la lecture des minutes et la déclaration de culpabilité des accusés. Iya Mohammed est assis dans le box des accusés en compagnie de Lucien Fotso, ex-comptable de la Société de développement du coton (Sodécoton). On remarque aussi dans l’assistance, la présence de nombreux journalistes et membres des familles des accusés.
À la fin de la lecture de la déclaration de culpabilité, la parole revient tout d’abord au ministère public et à la Sodécoton. Le procureur général demande que la loi soit appliquée pour les accusés, et requiert la condamnation à vie pour Baygon Christophe, en fuite et qui ne s’est jamais présenté aux débats. Me Sama, avocat de l’État du Cameroun réclamera des dommages et intérêts à hauteur de 5 milliards de Fcfa. Me André Marie Owono, avocat de la Sodécoton réclamera quant à lui une somme totale de 13.437.347.549 Fcfa, à titre de préjudice commercial et financier et de frais de procédure. Les avocats de la défense, intervenant à leur suite, vont demander au tribunal de surseoir à toutes ces demandes. Iya Mohammed dira tout simplement en guise de dernière prise de parole devant cette juridiction « je ne suis pas condamné pour les faits pour lesquels j’ai été poursuivi devant ce tribunal. J’ai l’impression que mes plaidoiries n’ont pas été prises en compte. Je suis jugé pour des faits inavoués, mais j’ai fais confiance à la justice de mon pays ».
Le verdict qui s’en suit est clair. 15 ans fermes pour Iya Mohammed. Baygon Christophe et Mahamat Karagma condamnés à vie. Christian Clavier, Jérôme Minlend et Pierre Kapténé, relaxés au bénéfice du doute. Iya, Karagama et Baygon devront en outre payés solidairement une somme de 12.180.092.442 Fcfa à l’État du Cameroun. Compte tenu de son âge, Iya Mohammed est exempté de la contrainte par corps de cinq ans qui incombe aux deux autres condamnés. Les parties disposent en outre de 48h pour se pourvoir en cassation.
Source: Georges Parfait Owoundi, Quotidien Mutations
[spacer style="1"]
Iya Mohammed : De Tsinga à Kondengui
L’amour pour la Fecafoot semble avoir perdu l’ex-Dg de la Sodecoton.
Les Camerounais, surtout les amateurs du football, connaissent Iya Mohamed comme celui qui a été le tout puissant président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot). Une fédération qu’il a dirigé à partir du 11 avril 2000 à la suite d’une assemblée générale extraordinaire au cours de laquelle il a obtenu 134 voix sur 148, face à ses concurrents notamment Charles Noumangué président d’Akom football club de Sangmélima, Emmanuel Mvé, ancienne gloire du football camerounais, et Philippe Mbarga Mboa, président d’Olympique Club de Mvolyé.
Iya Mohamed voit le jour en 1950 à Garoua dans la partie septentrionale du Cameroun, de père nigérian et d’une mère camerounaise, foulbé, originaire de Garoua. Il suit ses études primaires au Nigeria, pays de son père, où il finit par obtenir une maîtrise en sciences économiques à Zaria University en 1974.
Le parcours professionnel de Iya Mohamed débute véritablement à la Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Cameroun (Bicic) comme chef d‘agence de Kumba dans la région du Sud ouest entre 1975 et 1979. Sa carrière prendra une autre tournure avec la création de Selcam (Sels du Cameroun) par El Hadj Moussa Yaya et El Hadj Mohamadou Abbo qui sollicitent ses services pour diriger cette entreprise. Il va assurer les fonctions de directeur général adjoint de Selcam jusqu’en 1981. Iya Mohammed finit par quitter la société à cause des dissensions avec El Hadj Abdoulaye Fadil Houssoumai, devenu président du Conseil d’administration, après le rachat par le fondateur du groupe Fadil des actions de Mohamadou Abbo. C’est en 1981 qu’Iya Mohammed fait son entrée à la Sodecoton. Sa compétence et son dévouement marquent son patron Ahmadou Bassoro, qui va le nommer au poste de délégué régional de la Sodecoton pour le Littoral pendant un an. De 1983 à 1984, il assure les fonctions de secrétaire général de la Sodecoton.
Il devient directeur général de cette entreprise en 1984. Société d’Etat placée sous la tutelle du ministère camerounais en charge de l’Agriculture, la Sodecoton sera marquée par un processus de privatisation qui prévoyait le rachat de 48% du capital de l’entreprise. Mais, le processus de privatisation de la Sodecoton sera annulé, pour raison d’irrégularités, par Justin Ndioro, ancien ministre des Finances de regretté mémoire. Iya Mohamed conservera son poste de directeur général jusqu’à son arrestation, après une défaite des Lions indomptables face aux Eperviers du Togo.
© Mutations : G.P.O