Cameroun. Des détenus « entassés comme des sardines » dans les prisons à la suite des manifestations dans les régions anglophones
. Plus de 500 personnes placées en détention dans plusieurs villes, dont Bamenda et Buéa.
· Des manifestants blessés fuient les hôpitaux par peur d’être arrêtés.
· Des manifestants arrêtés sont contraints de verser 50 euros de pot-de-vin pour être libérés.
Au moins 500 personnes sont toujours enfermées dans des centres de détention surpeuplés à la suite des arrestations arbitraires massives qui ont eu lieu dans les régions anglophones du Cameroun et de nombreux manifestants blessés fuient les hôpitaux pour éviter d’être arrêtés, a déclaré Amnesty International le 13 octobre 2017.
Les personnes détenues ont été arrêtées à la suite des manifestations organisées dans des dizaines de villes des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest au Cameroun le 1er octobre, au cours desquelles plus de 20 personnes ont été illégalement abattues par les forces de sécurité.
« L’arrestation massive de manifestants, pour la plupart pacifiques, constitue une violation des droits humains et, par ailleurs, risque fort de s’avérer contre-productive, a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse sur le lac Tchad à Amnesty International.
« Les autorités camerounaises doivent libérer toute personne détenue uniquement pour avoir exercé son droit de manifester pacifiquement. »
Les arrestations ont eu lieu dans plusieurs villes des régions anglophones. À Bamenda, capitale de la région du Nord-Ouest, au moins 200 personnes ont été arrêtées et la plupart ont été transférées à la prison de Bafoussam. À Buéa, capitale de la région du Sud-Ouest, au moins 300 personnes ont été arrêtées depuis les manifestations du 1er octobre, notamment dans le cadre d’une série d’arrestations arbitraires massives entre le 6 et le 8 octobre. Dimanche 8 octobre, les policiers ont arrêté jusqu’à 100 personnes qui se rendaient à l’église dans le quartier Mile 16, à Buéa, et sont entrés dans le bâtiment pour arrêter le personnel de l’église. Certaines de ces personnes ont été relâchées.
Les forces de sécurité, notamment l’armée – dont le déploiement aux fins de maintien de l’ordre devrait rester une mesure prise à titre exceptionnel en situation d’urgence – ont recouru à une force excessive ou injustifiée lors des arrestations et ont détruit des propriétés et pillé des biens. Le 3 octobre, à Buéa, un policier a lancé une grenade lacrymogène dans un véhicule où se trouvait une dizaine de manifestants, qui ont dû briser la vitre pour pouvoir respirer. Dans tous les cas recensés par Amnesty International, les autorités ont procédé aux arrestations sans mandat.
Des témoins ont raconté que les prisons ne cessent de se remplir depuis cette vague d’arrestations. À Buéa, la population carcérale est passée d’environ 1 000 détenus avant le 22 septembre à environ 1 500 aujourd’hui. À Buéa, dans un centre de détention géré par le Groupement mobile d’intervention (GMI), une unité de police mobile, les détenus seraient « entassés comme des sardines ».
Parmi les personnes arrêtées, certaines sont inculpées de sécession, d’autres d’infractions diverses incluant le défaut de papiers d’identité, la destruction de biens publics ou la désobéissance à un ordre du gouverneur. Certaines ont déjà comparu devant les tribunaux. D’autres ont été libérées après avoir versé des pots-de-vin, des familles de Buéa indiquant avoir versé à des policiers environ 50 euros pour chaque membre de la famille détenu.
La crainte des arrestations et le déploiement à grande échelle des forces de sécurité ont poussé des dizaines de manifestants blessés à fuir les hôpitaux où ils étaient soignés pour des blessures par balles infligées lors des manifestations, mettant leur vie en danger. Dans au moins un hôpital, les forces de sécurité sont entrées dans le bâtiment pour interpeller des patients.
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Cameroun: sous pression, le gouvernement lance une enquête sur les violences
Amnesty International épingle encore une fois les autorités camerounaises pour les violences qui ont touché les provinces du nord-ouest et du sud-ouest, le 1er octobre, lors de manifestations indépendantistes dans ces deux provinces anglophones. L’organisation des droits de l’homme parle de plus de 500 personnes victimes d’arrestations « massives et arbitraires » et qui croupissent en prison, de gens « entassées comme des sardines » au Groupement mobile d’intervention de la police de Buea. Dans ce contexte et sur fond d’une guerre des chiffres sur le nombre de victimes, le gouvernement camerounais vient d’annoncer une enquête sur ces événements.
« Accusations fallacieuses », « chiffres fantaisistes », se défend le gouvernement camerounais qui continue de nier farouchement toutes les accusations portées par Amnesty International. Et il tente de couper court à une polémique qui n’en finit pas.
Il vient de demander au ministre de la Justice de diligenter une enquête pour faire la lumière sur le nombre exact de victimes. Le gouvernement évoque à peine dix morts, tandis que l’ONG parle de vingt morts et que d’autres sources encore estiment que les violences ont fait une trentaine de morts. Mais aussi sur les biens de l’Etat ou de particuliers qui ont été détruits, brûlés ou saccagés lors des manifestations indépendantistes du 1er octobre notamment.
« Il est indispensable de savoir ce qui s’est passé, estime le porte-parole du gouvernement, Issa Tchiroma Bakary. Au terme de cette démarche, le gouvernement aura une vision globale, incontestable, dès lors que ces enquêtes seront menées de façon transparente, sans complaisance. »
Le porte-parole du gouvernement camerounais se veut rassurant : nul n’est au-dessus de la loi, affirme-t-il. « Si d’aventure, il était établi que quelques brebis galeuses auraient fait indûment usage d’une force excessive, il va sans dire que les responsables militaires prendront les décisions qui s’imposent, assure-t-il. Mais je doute fort, compte tenu du professionnalisme de nos forces de défense et de sécurité, que tel soit le cas. »
Des officiers de police judiciaire issus de la police et de la gendarmerie seront chargés de ces enquêtes sous la supervision des autorités judiciaires. De quoi alimenter encore la polémique puisque ce sont ces corps qui sont justement mis en cause dans ces violences par les ONG.
Ayant recueilli des informations auprès des familles, des témoins, d’avocats et de centres médicaux dans les régions concernées, Amnesty International a appris que dans au moins neuf hôpitaux, des blessés graves sont partis avant que les soins ne soient terminés. Leurs familles sont passées les chercher ou ils ont demandé à signer une décharge contre l’avis du personnel soignant, parce qu’ils avaient peur d’être arrêtés.
Un jeune homme souffrant de fractures multiples après que des membres des forces armées lui ont tiré dans les deux jambes a été ramené chez lui par sa famille avant que son état ne soit stabilisé. Selon un médecin qui l’a soigné : « Il avait perdu plus d’un litre de sang. J’ignore s’il est encore en vie, il va probablement mourir. »
Un autre médecin a déclaré à Amnesty International : « Certains de nos patients quittent l’hôpital avant même d’être stabilisés, craignant que la police ne vienne les arrêter. » Un troisième médecin a ajouté que les forces de sécurité l’empêchaient, tout comme ses collègues, d’examiner les cadavres afin de confirmer cliniquement des blessures par balles.
Dans un autre cas, un jeune homme a été tué juste devant l’hôpital : alors qu’il s’enfuyait d’une manifestation, il a reçu une balle à l’arrière de la tête. Les balles ont atteint les murs de l’hôpital, pénétrant dans une pièce où un médecin et des infirmières étaient en train d’opérer un patient.
« En raison du climat de peur qui règne dans les régions anglophones, d’autres personnes risquent de mourir des suites de leurs blessures parce qu’elles ont trop peur de recevoir les soins médicaux dont elles ont tant besoin, a déclaré Ilaria Allegrozzi.
« Les forces de sécurité doivent mettre fin aux arrestations arbitraires de manifestants et permettre aux blessés de se faire soigner sans avoir peur. Enfin, les organisations internationales doivent déployer des observateurs chargés de veiller au respect des droits humains afin d’évaluer la situation et du personnel soignant afin de dispenser les soins de premier secours. »
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Cameroun – Crise anglophone: Les secessionnistes traduisent Paul Biya et certains membres du Gouvernement devant la Cour Penale Internationale pour genoicide et crimes contre l”humanite
Un groupe des sécessionnistes anglophones vient de saisir la Cours Pénale Internationale (CPI) au sujet des actes de violences enregistrés dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Leur requête datée du 12 octobre 2017, demande au Procureur de la CPI d’ouvrir une enquête sur « le génocide en cours et des crimes contre l’humanité » dans ces deux régions du pays.
Leur plainte auprès de la CPI vise
Paul Biya (Président de la République),
René Emmanuel Sadi (ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation),
Laurent Esso (ministre de la Justice),
Jacques Fame Ndongo (ministre de l’Enseignement Supérieur),
Joseph Beti Assomo (ministre délégué à la présidence en charge de la Défense),
Martin Belinga Eboutou (Directeur du Cabinet civil),
Jean-Baptiste Bokam (Secrétaire d’Etat à la gendarmerie nationale),
Adolphe Lélé Lafrique (Gouverneur du Nord-Ouest)
Bernard Okalai Bilai (Gouverneur du Sud-Ouest).
« Ces personnalités ou membres du Gouvernement sont directement responsables des tueries, de la torture, des viols et des enlèvements depuis octobre 2016 », disent les plaignants.
Les accusateurs indiquent que si des mesures urgentes ne sont pas prises, le génocide en cours et les crimes contre l’humanité pourraient s’intensifier. Ils soulignent que les personnalités citées plus haut, ont donné l’ordre pour que des manifestants qui marchaient « avec l’arbre de paix en main », soient abattus. «Plus de 50 manifestants y compris des enfants ont été confirmés morts, certains qui ont reçus des balles sont encore hospitalisés et plus de 100 autres sont portés disparus», précisent-ils.
Par Peter KUM | Cameroon-Info.Net