En effet, une faillite de l’État est redoutée depuis par les observateurs, et les analystes économique n’ont de cesse de tirer la sonnette d’alarme. Pour une certaine opinion, la guerre contre la secte islamiste dans le septentrion est un gouffre à sous et peut plonger le pays dans une crise à nulle autre pareille. «Faux !», rétorque un haut responsable de la primature, pour qui « le Cameroun a connu pire ». « La guerre de Bakassi était beaucoup plus coûteuse. En plus, le pays était en plein ajustement structurel et le franc cfa venait d’être dévalué », argumente-t-il. Petit bémol apporté par notre source, « mais la menace de cessation de paiement n’était pas aussi grande ».
Pour conclure, il soutient que « les recettes douanières et fiscales sont largement supérieures aux attentes. Les projets structurants et le plan d’urgence ont leur mode de financement. Toutes les dispositions ont été prises pour que l’économie camerounaise soit bien soutenue, malgré le conflit dans le septentrion. Mais aujourd’hui, on parle d’un taux de croissance en dessous de zéro. Le problème est ailleurs».
Pour de nombreux économiste, à l’instar de Dieudonné Essomba, ancien ingénieur statisticien au ministère de l’Economie, la mauvaise qualité de la dépense publique est à l’origine de la tension de trésorerie observée. En effet, soutient-on, les dépenses d’apparat augmentent d’années en année, la dette intérieure s’est considérablement accrue, sans que l’Etat ne sache vraiment pourquoi. «Il est urgent de faire un audit de la dette intérieure. A chaque exercice budgétaire, la loi de Finances prévoit l’apurement de celle-ci. Mais curieusement, elle ne cesse d’augmenter», susurre notre source à l’Immeuble étoile.
L’Etat insolvable?
Quelques curiosités se dégagent des derniers bons du trésor assimilables émis par le Cameroun sur le marché monétaire. Le 2 septembre dernier, l’Etat a sollicité 5 milliards Fcfa. Seuls 3,52 milliards Fcfa ont été mobilisés par la Beac et 3,5 milliards servis au Cameroun. Le 5 août, le trésor public a émis des bons à hauteur de 5 milliards Fcfa, 4,8 milliards Fcfa ont été rassemblés et 4 milliards Fcfa remis aux pouvoirs publics camerounais.
A l’observation, les investisseurs ne se bousculent pas trop devant les titres émis par le Cameroun. Car, pour la même période, la direction générale de la comptabilité publique et du trésor du Gabon, a procédé le 26 août 2015, à une émission de bons du trésor assimilables d’une valeur de 6 milliards. Le montant des soumissions a atteint 6,2 milliards. Le 19 août, le Tchad a sollicité 50 milliards Fcfa et les souscripteurs ont réuni 50 milliards Fcfa, même si au final, la Beac n’a pu servir que 48,7 milliards Fcfa au pays d’Idriss Deby. Une autre constance apparaît dans les transactions, le Cameroun se limite uniquement à des émissions de 5 milliards Fcfa.
Finances publiques : L’État camerounais au bord de la faillite?
Par Ludovic AMARA, Le Messager
Pour payer les salaires des fonctionnaires de l’Etat pour le mois d’août, le gouvernent a eu recours à une levée de fonds auprès de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac).
Grosse frayeur dans les couloirs du ministère des Finances le mois dernier. Jusqu’au 20 août, à quelques jours de la rentrée scolaire, les salaires des personnels de l’Etat étaient toujours incertains, indique-t-on au ministère des Finances (Minfi), le principal ordonnateur du budget de l’Etat. Il se rapporte que l’administration publique a multiplié des stratagèmes pour sauver les meubles.
Ainsi, apprend-on, le trésor public Camerounais a procédé le mercredi 19 août 2015, à l’émission des bons du trésor assimilables d’une valeur de 5 milliards Fcfa. Le 2 septembre, l’Etat une fois encore, a émis des bons du trésor assimilables à hauteur de 5 milliards Fcfa. Dans la même foulée, le gouvernement a puisé dans le stock de réserves de change et a fait des tirages sur les avances statutaires au niveau de la Beac, pour requinquer ses caisses.
Pour certains responsables du Minfi approchés, ces opérations ne sont pas étroitement liées au paiement des salaires mais obéissent plutôt à un calendrier fixé d’avance. Par contre, ceux-ci reconnaissent à l’unanimité que l’économie camerounaise est à bout de souffle. «La tension de trésorerie est perceptible.
L’Etat paie difficilement sa dette intérieure. Les prestataires de services vivent un véritable calvaire. La menace d’une cessation de paiement de salaire plane» confie un inspecteur de trésor ayant naturellement requis l’anonymat. Devoir de réserve oblige. Pour ce haut cadre de l’administration, si l’Etat n’avait pas entrepris certaines démarches, il y avait de fortes chances que les fonctionnaires ne perçoivent pas leur salaire du mois d’août.
Quant à l’avenir, notre interlocuteur est un peu inquiet. Il précise à cet effet : « les réserves de change à la Beac ont chuté de 171 milliards de Fcfa en 2014. Le plafond des avances statutaires à la Beac serait déjà atteint ou presque. Le pays n’arrive plus à lever des fonds comme il l’entend. Nous ne sommes pas à l’abri d’un autre ajustement structurel ». Qu’à cela ne tienne, les ex employés des sociétés d’Etat liquidées au restructurées ne désespèrent point quant à leur indemnisation qu’ils attendent depuis plus de 25 ans.
© Le Messager : Ludovic AMARA