Alors que l’opposant camerounais Maurice Kamto a été arrêté il y a près de dix jours, les réactions des capitales occidentales se font attendre. La DW tente de comprendre les raisons de ce silence.
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Depuis presque dix jours, l’opposant camerounais Maurice Kamto est emprisonné avec des dizaines de ses proches. Les accusations de rébellion, d’incitation à l’insurrection ou encore d’hostilité à la patrie qui pèsent sur lui pourraient, s’il était condamné, l’envoyer en prison pour une très longue période. Face à un régime qui réprime son opposition, la communauté internationale reste pourtant silencieuse – et le contraste est frappant avec, par exemple, la mobilisation autour du Venezuela.
Le poids de la France
Le silence des capitales occidentales face à la crise politique au Cameroun s’expliquerait d’abord par l’absence de réaction de la France. L’ancienne puissance coloniale reste en effet le premier partenaire économique de Yaoundé. La situation pourrait donc changer si la France initiait une discussion politique sur le Cameroun au sein des Nations unies, ou bien proposait une résolution au Conseil de sécurité.
Il y a aussi l’Allemagne et le Royaume-Uni qui ont des liens historiques avec le Cameroun. Mais Berlin et Londres ne bougeront pas sans la France. C’est ce qu’estime en tous cas, Patrick MBoyo, chercheur à l’université Paris Saclay et spécialiste de l’Afrique centrale. “C’est une situation assez confuse au Cameroun qui risque d’exploser à tout moment”, dit-il. “Laisser cela se passer ainsi, c’est n’est pas rendre service au Cameroun. Et Paul Biya, qui est au crépuscule de son pouvoir, n’a rien à perdre aujourd’hui, que le Cameroun implose après lui ou à la fin de son mandat.” Patrick MBoyo estime que ce sont les Camerounais qui risquent de beaucoup perdre et les pays de la région qui vont en pâtir.
Pour sa part, Jean-Claude Shanda Tomne, de la Commission indépendante contre la corruption et la discrimination au Cameroun, voit la situation politique figée au Cameroun comme le résultat des intérêts stratégiques. Le Cameroun est certes engagé dans la lutte contre le terrorisme et Paul Biya continue d’avoir de solides liens avec de nombreux dirigeants européens. Malgré tout l’intérêt stratégique du Cameroun reste de second ordre pour les grandes puissances.
“On n’est pas le Venezuela. On n’est pas l’Irak. On n’est pas la Syrie. On est juste ce qu’on peut appeler le pré-carré ou la continuité du territoire colonial français”, déplore-t-il. “En plus, ces pays là ont leurs propres problèmes. Le capitalisme est en crise. Ça a toujours été ainsi parce que nous sommes sans doute au cœur de nombreuses articulations géopolitiques et géostratégiques qui font que dans la planification des puissances tutélaires, il n’est peut être pas encore temps. Ou bien elles n’ont pas d’alternatives appropriées pour gérer le cas camerounais.
Maurice Kamto “droit dans ses bottes”
En attendant que la communauté internationale se penche sur la crise politique au Cameroun, Maurice Kamto reste en prison. Joint par la DW, un des avocats de Maurice Kamto reconnait avoir vu son client ce mardi matin, “pendant un peu plus d’une demi-heure“. Selon maître Emmanuel Simh, l’opposant camerounais qui n’est toujours pas inculpé reste “reste droit dans ses bottes” pour faire face aux accusations qu’il qualifie de “falacieuses.”
Source : dw.com