Sans être dans le déni, on ne peut intellectuellement et factuellement pas rendre tout un groupe ethnique et même social coupable “d’une culture de l’impunité et de la fabrique de la haine”.
Cette manière globalisante de stigmatiser l’ensemble d’une population à partir de faits regrettables et condamnables d’atteintes répétées aux biens et aux personnes en raison de leur origine ethnique, participe malheureusement du climat délétère de guerre de tranchées tribales qui sévit au Cameroun depuis l’élection présidentielle contestée du 07 octobre 2018.
En effet, les émeutes à caractère tribal qui ont lieu dans la ville d’origine du Président Biya au Cameroun, (Sangmelima pour ne pas la nommer), procèdent d’un effet boomerang du tribalisme étatique distillé à petites doses depuis 37 années au sein des différentes populations locales, par des élites dites ressources et principaux dignitaires du régime en place, qui pensent ainsi pouvoir se dédouaner des conséquences désastreuses sur l’ensemble du Cameroun – et notamment dans ces localités de la province du Sud – d’une mauvaise gouvernance chronique.
Non seulement la réaction du gouvernement ne doit souffrir d’aucune ambiguïté. Mais les auteurs des crimes perpétrés en l’occurrence ici sur les ressortissants Bamoum doivent être systématiquement pourchassés et sévèrement condamnés.
Parce qu’on ne peut simplement pas tolérer – en république – la survenance répétitive dans des villes du Sud du Cameroun des espèces de pogroms anti-ressortissants de l’Ouest du pays (pourtant eux-aussi souvent natifs du Sud), avec un arrière fond d’instrumentalisation politique.
Cependant nulle part dans la culture millénaire Fang-Beti-Bulu sont inculquées une quelconque impunité, encore moins la haine de l’autre en raison de ses origines ethniques ou tribales. La mixité des couples, le mélange des populations, et le vivre-ensemble qui prévalent dans cette région du Cameroun, y compris dans les coins les plus reculés, peuvent suffisamment en témoigner.
Alors de grâce une émeute, fut-elle à caractère tribal, ne doit pas être exploitée à des fins politiques et partisanes. Il s’agit d’abord du Cameroun et de l’obligation qui incombe à chacun de ses ressortissants et habitants, quelque soit sa sensibilité politique et son origine tribale, de prôner puis de veiller jalousement à sa cohésion nationale.
Joël Didier Engo, Président du Comité de Libération des Prisonniers Politiques – CL2P