La justice républicaine est un outil indispensable pour la réussite. Il faut réconcilier notre justice avec la société camerounaise parce qu’elle ne répond pas à nos attentes. Pour ce faire, elle doit être équitable, efficace et rapide. Il en va de sa crédibilité. Il faut redonner ses titres de noblesse à notre système judiciaire pour renforcer son indépendance, reconstruire sa crédibilité et son efficacité. Ainsi il faudra tout d’abord lui allouer à cet effet des moyens conséquents pour améliorer son cadre et ses conditions de travail, mobiliser des moyens pour la formation et le recrutement des magistrats, réhabiliter des bâtiments, poursuivre l’informatisation des greffes pour accélérer les procédures, et enfin poursuivre la décentralisation de notre système judiciaire et la consolider avec l`érection de nouveaux tribunaux.
Pour respecter la personne humaine, l`assainissement et la modernisation de notre système pénitentiaire s`imposent, en tenant compte des normes internationales. De nouveaux établissements pénitenciers devront être construits y compris ceux spécialisés dans la réhabilitation. Les jugements doivent être rendus dans des délais raisonnables. La délivrance des documents devra se faire plus rapidement et gratuitement. Par ailleurs, les parquets, les brigades de gendarmerie, les commissariats de police n’étant pas des juridictions judiciaires chargées de régler les litiges entre les personnes, ils ne serviront plus d’agences de recouvrement des dettes, ou de gestion des affaires civiles. Les gardes à vue seront l’exception et non la règle. Des organes de contrôle pour le respect des règles et lois en vigueur devront être crées. La torture que ce soit dans les centres de détention ou les commissariats devra être sévèrement punie par la loi.
L’État respectera l’impartialité et l’indépendance de la Justice. Comme première mesure le Ministère délégué à la Présidence chargé de l’inspection de l’État, la direction de la police judiciaire, ainsi que la DGRE devront être transformés en une agence nationale d’investigation avec les pouvoirs de police judiciaire, rattachée directement au Ministère de la justice et non plus à la présidence de la république. Les compétences de cette Agence d’Investigation devront porter notamment sur la lutte contre la corruption, le grand banditisme, le crime organisé, les enlèvements, les viols et autres crimes crapuleux, le crime à col blanc et la criminalité financière, et enfin la collecte des renseignements généraux. En plus des trois organes précités, on devra compter parmi ses agents des ingénieurs, des économistes, des comptables, des auditeurs, des fiscalistes, des médecins légistes, des informaticiens et enfin des avocats. Sa devise sera : Intégrité, Fidélité, Courage.
Chapitre 1 : Une puissante constitution
Outre ces préalables, il faudra s’atteler aussi à la création d’un vrai État de droit par la mise en place de la systématisation du référendum comme technique d’adoption et de modification de la constitution, ceci afin d’éviter les modifications opportunistes par voie parlementaire qui semblent toujours servir des intérêts occultes, sinon ceux de la majorité du moment. L’installation véritable du Conseil Constitutionnel dont les attributions sont indéfiniment exercées par la Cour Suprême depuis des années devra prendre corps.
Chapitre 2 : Démocratisation du contrôle de constitutionnalité.
Faciliter la saisine du Conseil Constitutionnel
Il faudrait, au-delà des trois personnalités qui peuvent directement le saisir (Présidents de la République, de l’Assemblée nationale et du Sénat), ramener le nombre des députés ou sénateurs à 10 au lieu du tiers actuellement exigé et dont la réunion s’avère quasi impossible pour un autre parti que celui au pouvoir.
Instaurer l’exception d’inconstitutionnalité
L’exception d’inconstitutionnalité est la faculté accordée à tout justiciable à qui on veut appliquer une disposition légale ou réglementaire dans le cadre d’un litige et qui en constate l’inconstitutionnalité, d’en écarter l’application dans ce cadre circonscrit. Concrètement, je propose qu’elle soit traitée comme une Question préjudicielle qui permettrait au Président de la Juridiction en question de saisir le Président du Conseil Constitutionnel qui statuera alors par la voie d’un avis dont la portée se limitera au litige en cours.
Chapitre 3 : Une magistrature crédible
a- Assurer la compétence des Magistrats.
Au niveau du recrutement il faut s’assurer que le concours de l’ENAM ne fait passer que les meilleurs. Aussi les résultats devront désormais être publiés par ordre de mérite avec publication des notes. Il sera par ailleurs instauré un système obligatoire de formation permanente.
Garantir l’indépendance de la Magistrature
Indépendance à l’égard des autres pouvoirs. Il s’agit ici notamment du pouvoir exécutif. En l’état l’article 37 de la constitution fait du Président de la République le potentat de la Magistrature qui nomme les magistrats, le Conseil Supérieur de la Magistrature n’étant qu’un organe consultatif qui n’émet que des « avis » que le Président n’est du reste pas obligé de suivre. J’estime que cet état de choses crée obligatoirement une subordination de la justice vis à vis de l’exécutif. Le Président de la République doit dès lors être totalement exclu de cette institution où il peut tout au plus être représenté. Son intervention personnelle ne serait requise que pour promulguer en décret certaines décisions du Conseil Supérieur de la Magistrature dans un délai bien déterminé au delà duquel son Président lui-même les rendrait exécutoires.
Indépendance à l’égard des justiciables. Le renforcement de cette indépendance s’analyse à ce niveau en la répression systématique de la Corruption dont la sanction serait la révocation systématique pour tout Magistrat convaincu sans préjudice des poursuites pénales. La mise en application des autres mécanismes classiques sera effective (récusation, prise à partie favoritisme, etc.)
Chapitre 4 : Le renforcement de l’égalité de tous devant la loi
L’entrée en vigueur du nouveau code de procédure pénale a multiplié les privilèges de juridictions pour certaines personnes dont les professions sont potentiellement liberticides à l’instar des officiers de Police et des membres de certaines administrations. Il faut supprimer sinon réduire au maximum ces privilèges. Il faut en outre briser tous les obstacles à la saisine directe des juridictions d’instruction et de jugement. Il s’agit notamment à ce niveau d’éliminer la pratique dans certains parquets du visa obligatoire du procureur préalable à toute citation directe de particulier, ainsi que du réquisitoire introductif en matière de Plainte avec Constitution de partie civile, pratiques qui très souvent assurent l’impunité de véritables coquins. L’initiative de poursuite accordée aux justiciables ne saurait souffrir de l’intervention de ceux au détriment de qui elle leur a été accordée.
Chapitre 5 : Le renforcement de la présomption d’innocence et de la protection des libertés individuelles
Il faut asseoir un véritable système juridictionnel pénal accusatoire. A cet effet, il est question d’assurer le respect des dispositions du code de procédure pénale limitant les gardes à vues et les détentions préventives tant dans leur principe que dans leur durée. Il faut ainsi instaurer au niveau tant du parquet que du siège de chaque juridiction une permanence assurée pour un magistrat pouvant être saisi à toute heure avec obligation de décider dans les 24 heures de sa saisine. En outre il sera prévu, au-delà des sanctions administratives, des sanctions pénales pour toutes les autorités ayant porté atteinte aux libertés individuelles. En plus, il sera installé à bref délai la Commission d’indemnisation des victimes des gardes à vues et détentions abusives, qui ne sont toujours pas en place plusieurs années après la promulgation du Code l’ayant instaurée. A ce niveau l’État va en faciliter tant la saisine que la procédure et généraliser l’admission à l’indemnisation à toutes les irrégularités de détention et non plus en la simple déclaration de non culpabilité à l’issue de la procédure qui fragilise tout le débat sur les conditions formelles.
Chapitre 6 : Création d’une Cour d’Assises
La cour d’assises est l’instance judiciaire qui juge les crimes les plus graves. Les crimes sont le répertoire d’infractions les plus graves. Elle juge les personnes accusées d’avoir commis l’un des crimes suivants : assassinat, meurtre, empoisonnement, rapt, viol, vol à main armée, terrorisme, et crimes contre l’humanité. Elle sera aussi compétente pour juger les infractions connexes à un crime qui serait l’infraction principale, ainsi que les délits et contraventions commis à l’occasion d’un crime. Ce sera une juridiction non permanente. Elle sera organisée au niveau de chaque Tribunal. Elle sera composée de :
– Trois juges professionnels,
– Un jury 12 citoyens tirés au sort,
– Un avocat général et un greffier.
C’est une juridiction non permanente. Elle se réunit généralement tous les 3 mois pendant une quinzaine de jours. Elle est organisée au niveau départemental et présente une originalité par sa composition : trois juges professionnels, un jury (9 citoyens tirés au sort), un avocat général et un greffier.
Chapitre 7 : Création d’une Haute Cour de Justice
La Haute Cour de Justice est un organe compétent pour juger les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, par le président de la république en cas de haute trahison, et par les ministres en cas de complot contre la sureté de l’État. Elle est composée de neuf juges nommés par le président de la République pour une durée de 9 ans.
Chapitre 8 : Une législation incitative des affaires
Il faut obligatoirement :
– Sécuriser l’environnement des affaires notamment par le respect des diverses transactions;
– Assurer la célérité dans le règlement des litiges commerciaux devant les juridictions étatiques ;
– Démocratiser l’arbitrage par une limitation de ses coûts le rendant accessible au plus grand nombre ;
– Sécuriser l’outil du travail et l’environnement social en décourageant les voies d’exécutions et saisies conservatoires fantaisistes. A ce niveau, il faut soumettre par exemple l’immobilisation du patrimoine des entreprises employant un personnel important aux préalables de procédures contradictoires.
Chapitre 9 : Une mise en application concrète des conventions internationales
Il se développe une véritable problématique sur l’application concrète des conventions internationales au Cameroun. En effet alors que la Constitution leur donne une force supérieure aux textes nationaux, il est maintenu une véritable prédominance de ces derniers, tant devant les juridictions que devant les administrations. C’est ainsi notamment que dans le cadre des procédures relatives à « l’opération Épervier », les qualifications des Actes uniformes OHADA sont écartées au profit des articles du code pénal, notamment le 184. C’est aussi le cas de diverses Conventions relatives au droit de la femme et des enfants qui sont rejetées au profit des dispositions inégalitaires internes. À cet effet, voici mes propositions. Il faudra :
D’une part systématiser et intégrer comme textes nationaux, mais dans le respect des procédures, toutes les Conventions Internationales ratifiées par le Cameroun ;
D’autre part instituer dans toutes les Procédures, dans le cadre du respect de la hiérarchie des normes et celui de la constitutionnalité des lois, d’une exception d’inconventionnalité par laquelle tout justiciable pourra empêcher l’application d’une disposition interne contraire à une convention internationale. Cette Exception serait réglée dans le cadre d’un Jugement Préalable de la juridiction saisie du fond du litige.
Chapitre 10 : Deux lois à abroger absolument
A. La loi portant création du Tribunal Criminel Spécial
Le nouveau tribunal d’exception qui vient d’être créé au Cameroun opte pour la voie qui le mettra au ban des nations, car cette loi qui porte création du Tribunal Criminel Spécial est tout simplement une “Violation du Pacte relatif aux Droits Civils et Politiques de l’ONU”.
La Loi votée par l’Assemblée Nationale le 6 Décembre 2011 et portant institution d’un Tribunal Criminel Spécial chargé de lutter contre les crimes économiques comporte des dispositions qui violent des Accords et Traités Internationaux ratifiés par le Cameroun, en application du principe général de Droit qui confère aux Traités et Conventions Internationales une portée supérieure aux lois domestiques.
Premièrement, l’article 4 de cette loi dispose que : le Tribunal Criminel Spécial «statue en premier et dernier ressort», supprimant le «double degré de juridiction» matérialisé par le jugement d’instance et le jugement d’appel, mécanisme qui est l’une des marques essentielles d’une Justice moderne dont la saine administration et la manifestation de la Vérité sont la préoccupation essentielle voire exclusive.
Cette suppression du “double degré de juridiction” viole le Pacte international relatif aux Droits Civils et Politiques qui a été adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l’adhésion par l’Assemblée Générale de l’ONU dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, est entré en vigueur le 23 mars 1976, conformément aux dispositions de son article 49, le Cameroun y ayant formellement adhéré le 27 Juin 1984, sous votre présidence. L’article 14-5 de ce “Pacte” stipule en effet que : “Toute personne déclarée coupable d’une infraction a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation…”
Deuxièmement, en son article 18, cette loi instaure une “Justice duale” en créant une catégorie de citoyens soumis a une “justice d’ exception” à qui semble s’ appliquer une “présomption de culpabilité”, au contraire des citoyens ordinaires qui bénéficient a la fois de la “présomption d’ innocence” et du double degré de juridiction. Dans cette nouvelle catégorie, au prétexte du remboursement de ce qu’ils auraient volé, certains seront livrés au seul jugement du Ministre de la Justice, lequel pourrait ordonner un ‘”abandon de poursuites” au terme d’une “médiation judiciaire” dont il sera le seul à maitriser les contours, ouvrant ainsi la porte aux marchandages les plus sordides.
Ce sera en fait la consécration de l’arbitraire, l’avènement d’une justice hors de la Justice, où le Pouvoir Exécutif empiète sur un domaine constitutionnellement réservé au Pouvoir Judiciaire, où la sanction pénale n’est plus attachée au corps d’un crime, mais est dissoute dans un procédé assimilable au “paiement d’une rançon”, et qui révèle une dimension plus accablante encore de la régression de la pratique judiciaire que cette loi induit. Ce sera l’empiètement du principe des délits et des peines.
Même si cette pratique semble avoir les faveurs de la “rue”, le traitement différencié des citoyens devant la Justice constitue une violation de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée en par l’Assemblée Générale de l’ONU à la Charte de laquelle le Cameroun a adhéré. L’Article 7 de cette Déclaration dispose en effet: “Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi.”. La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme est érigée en norme juridique supérieure à laquelle se soumettent les pays membres de l’ONU, engagement confirmé à la Conférence Internationale des Droits de l’Homme tenue à Téhéran et dont la Déclaration Finale paraphée par le Cameroun le 13 Mai 1968 proclame que “Le respect de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme constitue une obligation pour tous les membres de la communauté internationale.”
Appliquer une justice à deux vitesses comme l’envisage cette nouvelle loi constitue donc une violation irréfutable de cette obligation internationale et de portée universelle. Qu’il soit clairement dit et compris que notre démarche ici ne vise pas à permettre que ceux qui ont abusé de la fortune publique échappent aux rigueurs de la Loi, bien au contraire, dirons-nous. Nous sommes plutôt guidés par une exigence du respect des valeurs de la République, elles qui, obligent à une vigilance sans concession sur la préservation des fondements et acquis d’un État moderne au Cameroun, et justifient notre inquiétude de ce qu’une vision de la Justice par certains esprits frustres ne se traduise en un recul durable de ce pilier de la République, avec un retour insidieux vers un État sauvage par des Lois d’exception dont par le passé notre pays a tant souffert.
Par ailleurs et cela n’étant pas une considération de moindre portée, tout patriote avisé aurait des appréhensions sur les retombées économiques négatives qu’aurait le fait que le Cameroun soit perçu comme un pays dont les Lois et Règlements violent les Traités, Conventions, et Normes et Pratiques juridiques internationalement établies. À Wall Street, New York, dans l’industrie du “Rating” où s’attribuent les notations de risque-pays, un des facteurs critiques qui déterminent la note synthétique attribuée à un pays est son respect des normes juridiques et des pratiques judiciaires internationales.
La mise en place d’une législation incluant des dispositions qui en font une Loi d’exception aura un impact inévitable sur la note du Cameroun, ce qui mécaniquement contribuerait à dissuader les investisseurs à venir dans notre pays et y créer l’activité et les emplois dont nous avons tant besoin. Les vrais problèmes de la Justice au Cameroun sont connus de tous. Le plus manifeste est la lenteur des procédures judiciaires, la cause première de celle-ci étant l’insuffisance des effectifs et des moyens techniques et logistiques mis à la disposition de la Justice. S’y ajoutent entre autre une tendance à la marchandisation des décisions par certains juges, la servilité à la tutelle observée chez certains autres.
On pourrait également prendre en compte une expertise insuffisante des domaines et pratiques de la gestion financière sur lesquels les juges doivent statuer, ce qui est à la source des confusions grossières relevées dans la qualification et l’évaluation des préjudices annoncés. Les dysfonctionnements qui en découlent appellent à une solution de gestion qui requiert des responsables plus compétents. Certains de ces dysfonctionnements tels que l’encadrement de la durée des procédures sont pris en charge par des dispositions de la loi évoquée, et tout un chacun se féliciterait qu’elle soit maintenue.
En revanche et de manière absolue, la solution à ce qui n’est qu’un problème de management ne saurait être le prétexte d‘insérer dans cette loi des dispositions qui en font une loi d’exception par laquelle le Pouvoir politique utilise l’ Exécutif pour prendre en otage la Justice, instaurant l’ère d’une justice expéditive que certains diraient être au service des desseins inavoués. Nous déplorons que ceux qui dans l’appareil étatique ont la charge de s’assurer que les Lois et Règlements de la République sont respectueux des normes et des engagements internationaux du Cameroon aient failli à leur tâche. Pour y pallier, nous recommandons fortement que ce texte soit renvoyé en seconde lecture devant les députés aux fins d’un toilettage car, lorsqu’ il est averti, le Président de la République du Cameroun ne saurait endosser délibérément une forfaiture exposant notre pays à être mis au ban des Nations pour non-respect de ses engagements internationaux et des normes et pratiques juridiques internationalement établies.
B. La loi antiterrorisme
Il faut des hommes exceptionnels pour apporter des solutions aux problèmes exceptionnels. C’est pour cela que toute loi doit être encadrée par des bonnes institutions et des bonnes personnes pour ’appliquer. Dans le cas de la Loi N° 2014/028 du 23 décembre 2014, portant répression des actes de terrorisme, dite loi “antiterroriste”, votée début décembre 2014 par le Parlement qui instaure la peine de mort, peut-on dire que c’est une bonne loi ? L’article 2 déclare passible de la peine de mort quiconque “commet tout acte ou menace susceptible de causer la mort, de mettre en danger l’intégrité physique, d’occasionner des dommages corporels ou matériels, des dommages de ressources naturelles, à l’environnement ou au patrimoine culturel“. Plus loin, le même article précise que « toute personne reconnue coupable de fait de perturbations du fonctionnement normal du service public ou qui peut créer une situation de crise au sein des populations ou encore créer une insurrection générale dans le pays, tombe également sous le coup de la peine capitale ».
Le code pénal camerounais prévoit déjà la peine capitale pour les coupables de meurtres et d’assassinats, le texte de la loi y ajoute donc désormais les personnes qui ne commettent qu’une menace… On mesure la latitude que se donne le pouvoir pour renforcer brutalement la répression et criminaliser la protestation sociale. En clair elle criminalise les réunions et manifestations publiques. La description qui suit montre de manière explicite ce qui est dénoncé dans cette loi scélérate. Vous serez considéré comme terroriste si, par exemple, lors d’une manifestation publique organisée pour exiger l’amélioration du code électoral, pour dénoncer l’incurie des gouvernants en place, pour revendiquer la revalorisation des salaires ou l’harmonisation de l’âge de départ à la retraite à 60 ans pour tous, votre action peut, selon les humeurs des tenants du pouvoir, tomber sous le coup de “tout acte ou menace d’acte susceptible :
– De causer la mort,
– De mettre en danger l’intégrité physique si en défendant vos droits vous résistez à Abraham et aux forces du désordre,
– D’occasionner des dommages corporels ou matériels si vous cassez les kiosques du PMUC,
– De causer des dommages aux ressources naturelles, à l’environnement si vous brûlez les pneus en polluant l’atmosphère ou au patrimoine culturel si vous vous en prenez à la statue du monument LECLERC.
Manifestement le pouvoir veut se prémunir contre d’éventuels troubles avant la présidentielle de 2018. Président depuis 1982, Paul Biya, 81 ans, entretient le mystère sur ses intentions mais il est clair qu’il est tenté de prolonger une fois encore son mandat. Ce texte apparaît manifestement comme sa réponse au soulèvement populaire qui a entraîné la chute du régime dans divers pays africains et en particulier au Burkina Faso en novembre 2014.
Le régime cherche à terroriser les mouvements sociaux et la jeunesse pour les empêcher de sortir en masse dans la rue, même si le dispositif légal pour réprimer la protestation sociale est déjà très grave avant même l’entrée en vigueur de cette loi. Le pouvoir en use et abuse. Par exemple, la garde à vue est d’une durée de quinze jours renouvelables. En-dehors des activités organisées par le parti au pouvoir et ses satellites, toute manifestation ayant trait à la protestation, à la dénonciation ou à la revendication se heurte toujours à l’abus d’autorité et à l’excès de zèle de l’administration qui crée sciemment l’amalgame entre «déclaration» et «autorisation», et pour qui ces réunions et manifestations sont toujours susceptibles de troubler l’ordre public.
Chapitre 11 : Loi anti dépendance vis-à-vis des grands intérêts de l’occident
Dans un souci de préservation de notre indépendance et de notre sécurité, un projet de loi sera envoyé au parlement pour adoption dès ma prise de fonction. Il concernera la participation des sociétés étrangères dans les domaines souverains tel que les secteurs de l’énergie, de l’eau, du transport par rail et sur route, de la gestion des ports et des aéroports du Cameroun, des télécommunications, etc. Cette loi va principalement :
– Limiter la participation des sociétés étrangères à un maximum de 49%
– Limiter la participation des sociétés étrangères à un maximum d’un secteur souverain
– Imposer à chaque société étrangère de construire un siège au Cameroun.
Chapitre 12 : Loi contre le crime absolu
Le crime absolu peut être défini comme « tout acte inhumain de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale ». Le crime absolu est celui qui porte atteinte non seulement à l’ordre public interne mais également à l’ordre public international puisque, ultimement, c’est l’humanité elle-même qui est attaquée dans sa dignité. Il doit obligatoirement demeurer imprescriptible, c.-à-d. que le seul écoulement du temps ne peut jamais absoudre ses auteurs ni les mettre à l’abri de la justice. Un crime absolu commis il y a 10, 50, ou même 250 ans demeure perpétuellement un crime absolu et engage perpétuellement la responsabilité de ses auteurs. L’âge avancé ou la santé défaillante de son auteur ne peut en aucun temps le dispenser de faire face à la justice pénale internationale. L’écoulement du temps est, pour les auteurs d’un crime contre absolu, une pure illusion. La loi sur les crimes absolus est caractérisée par trois points :
– La loi s’applique sans considération du lieu où l’auteur présumé peut être trouvé,
– Le mode de plainte est la simple constitution de partie civile,
– L’immunité ne met pas fin aux poursuites.
A. Définition complète et détaillée du crime absolu
Les actes constitutifs de crime absolu sont ceux commis « dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre toute population civile et en connaissance de l’attaque » :
– Le meurtre ;
– L’extermination ;
– La réduction en esclavage ;
– La déportation ou le transfert forcé de population ;
– L’emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;
– La torture ;
– Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
– La pédophilie;
– La persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ;
– La disparition forcée de personnes ;
– Le crime d’apartheid ;
– Le génocide ;
– Les crimes économique, et écologique, national, transnational et planétaire ;
– D’autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.
B. Compétence absolue
La compétence absolue est celle exercée par un État qui poursuit les auteurs de certains crimes commis sur son territoire, sans égard à la nationalité des auteurs ou des victimes. Ce genre de disposition légale sert à empêcher l’impunité de crimes graves appelés crime absolus, en particulier les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, qui seraient commis dans des régions particulièrement instables dont les habitants, citoyens du monde, ne bénéficieraient pas de protection légale adéquate. Le passage de la responsabilité de la procédure de l’exécutif vers le judiciaire la neutralise en n’en laissant pas la responsabilité au système politique soumis aux aléas des accords diplomatiques. La compétence absolue sera donc obligatoire pour les crimes absolus.
C’est ainsi que tous les accords entre le Cameroun et les autres États devront dorénavant spécifier le caractère inclusif de la loi contre le crime absolu, ce qui obligerait la soumission de tous face à cette loi. Ainsi aucun accord entre le Cameroun et un pays tiers ne pourra se satisfaire des exceptions telles, l’immunité des soldats de maintien de la paix, ou ceux des contingents faisant partie de l’assistance militaire. Par conséquent, un soldat faisant parti d’un corps expéditionnaire, qui commettrait un crime absolu sur le territoire camerounais, pourra être jugé au Cameroun, par les juridictions camerounaises.
Avec mon gouvernement, le Cameroun sera le premier pays à détruire le mur d’impunité derrière lequel les soldats des Nations Unies et autres corps expéditionnaires faisant partie de l’assistance militaire s’abritent pour couvrir leurs crimes.
Par ailleurs, la compétence universelle de cette loi permettra d’inculper toute personne ayant commis un crime absolu sur le territoire camerounais et ainsi pouvoir arrêter tout suspect par le biais d’un mandat d’arrêt international. C’est pour cela que le parquet camerounais pourra ouvrir une enquête à la suite de plaintes déposées par des victimes contre toute personne ayant commis un crime absolu sur le sol camerounais. De plus la constitution camerounaise va élargir les prérogatives des magistrats camerounais, en validant une enquête pour crime absolu, même en l’absence de victimes – par exemple, celles qui sont décédées -.
À titre d’exemple, la justice camerounaise pourra ouvrir une enquête contre les responsables des bavures ayant causé des victimes, des armées étrangères sur le sol camerounais. Cette loi va s’appliquer à tout plaignant sans distinction de nationalité. L’enquête pourra toutefois être close si une procédure est déjà en cours dans une autre juridiction supra nationale pour le même crime.
C. Aboutissement de la définition
Le crime absolu peut être commis en tout temps. Il est imprescriptible. Personne ne peut échapper à la répression, des chefs de l’État aux exécutants.
Par Fabien Assigana, acteur sociopolitique