De 25 ans de prison au départ, la Cour suprême a ramené la peine de l’ex-ministre de l’Administration territoriale de la Décentralisation à 20 ans à l’audience du 17 mai dernier. La haute juridiction a ainsi entériné une condamnation pour détournements de deniers publics sans la moindre preuve et avalisé une vendetta politique en règle.
Marafa Hamidou Yaya acquitté par la Cour suprême pour faits non établis ? C’est le pire des scénarios qu’il ne fallait surtout pas attendre de la Cour suprême le 17 mai dernier. Du moins, au goût de ceux qui le préfèrent dans le trou qu’en dehors. La haute juridiction y est donc allée. Comme on la voyait venir. Et Marafa en aura pour 16 ans encore-il est détenu depuis le 16 avril 2012- dans sa cellule du secrétariat d’État à la défense (Sed). Les juges de la Cour suprême ont en effet ramené sa peine à 20 ans de prison ferme. Soit 5 ans de moins qu’en instance.
Le crime de Marafa ? Avoir détourné en 2001 (volé, pour emprunter au langage camerounais) une somme de 29 millions de dollars (environ 24 milliards de F CFA) destinée à l’achat d’un avion pour les déplacements du chef de l’État. Il occupait les fonctions de secrétaire général à la présidence au moment des faits. Par quels moyens frauduleux a-t-il retenu ou obtenu tout ou partie de cet argent ? A-t-il fait virer tout ou partie de ce pactole dans un compte privé même sous un prête-nom ? Si oui, quel en est le numéro ? Logé dans quelle banque située dans quel pays ? S’est-il personnellement enrichi à partir de tout ou partie de cet argent ? Si oui, comment ? Des questions qui restent sans réponses au sortir de cette procédure judiciaire.
Tout au moins a-t-on appris à la Cour suprême qu’ « il n’est pas nécessaire pour que le détournement soit punissable qu’il ait profité personnellement à son auteur ». Un fragment de l’arrêt rendu en 1964 par la Cour suprême et évoqué en jurisprudence au cours de cette audience alors que le Code pénal sur la base duquel Marafa se retrouve devant les tribunaux date du 12 juin 1967 ! Mais cette jurisprudence a le mérite de ne tromper personne sur un fait : le détournement en question n’a pas profité à Marafa Hamidou Yaya.
Crime politique
Quel est finalement le crime du fils de Bibemi (nord du pays) ? Il n’est pas pénal de toutes les façons, mais politique. On le sait, en 2007, les câbles diplomatiques américains de Wikileaks relaient une conversation entre lui et l’ambassadrice des USA au Cameroun de l’époque, Janet Garvey, au cours de laquelle il lui confie ses ambitions présidentielles. Un crime de lèse-majesté dans un Cameroun où trône un chef inamovible qui ne jure que par son pouvoir à vie. Feu à volonté ! Cabale médiatique sur sa prétendue fortune et ses détournements présumés, rapport parlementaire incendiaire sur une supposée volonté de sa part de prendre le pouvoir par la force, filature des services secrets, vont s’en suivre. Avant que n’intervienne l’arrestation en avril 2012 puis son transfèrement du pénitencier de Kondengui pour le Sed le 26 juin 2012.
Ce n’est donc plus un secret pour personne. Marafa Hamidou Yaya est un prisonnier politique. Les Etats-Unis l’ont reconnu dans au moins 2 rapports annuels sur l’état des droits de l’homme au Cameroun. L’ONG française Comité de libération des prisonniers politiques au Cameroun se bat pour sa cause. L’Internationale socialiste tient à sa libération comme à la prunelle de ses yeux. Une campagne internationale baptisée « Libérez Marafa, maintenant » est en cours depuis le 10 février dernier. Rude s’annonce la bataille pour sauver le soldat Marafa.
Par Michel Biem Tong, Hurinews.com